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Actualités - ANALYSES

Beyrouth redouble d’efforts pour sauver Paris II

Fais ce que dois : bien que la voix libanaise ait peu de chances d’être entendue dans l’actuel tumulte mondial, les dirigeants de chez nous s’efforcent de multiplier les relances diplomatiques afin de sauver Paris II. Car du fait du déclenchement planétaire de la guerre contre le terrorisme, après les coups portés à l’omniprésente Amérique, cette conférence du sauvetage paraît fortement retardée, sinon sérieusement compromise. Alors même qu’elle se fait plus nécessaire voire plus urgente que jamais, étant donné que ce malheureux pays, déjà en difficulté sur le plan économique, risque d’entrer dans le rouge à cause des retombées des frappes sur Manhattan. Le simple report éventuel du colloque des donateurs et des créanciers peut entraîner pour ce pays des pertes comptables ou, si l’on peut dire, un manque à gagner substantiel. C’est une question non seulement d’intérêts de traites qui courent, mais également de capital de dette qui ne diminue pas. Un contrecoup aggravé par la proximité de l’entrée en vigueur, à partir de l’application du budget 2002, par les dispositions d’ordre fiscal ou compressif que le gouvernement a adoptées. Et dont la brusque augmentation de 3 000 LL sur l’essence n’est qu’un avant-goût. Ces mesures «at home first» sont prises pour répondre aux conditions posées par la Banque mondiale ou le FMI, en vue de Paris II justement ! Sans compter que si d’aventure le prix du brent devait s’inscrire durablement à la hausse, dans la foulée de la flambée de + 3 dollars le baril enregistrée le 12, la vie deviendrait une fois et demie plus chère. Ce qui n’est pas peu dire dans l’état actuel de récession et de chômage que subit la scène libanaise. Dès lors, c’est sous l’angle de vision qu’induit son attachement à Paris II que les observateurs commentent la réaction remarquée du président Rafic Hariri à la destruction des tours du World Trade Center de New York, haut symbole de la puissance financière et économique US. On sait en effet que, solidaire au maximum avec le bienfaiteur potentiel US, le Premier ministre a été jusqu’à absoudre d’avance tout acte punitif frappant la partie coupable, une fois bien identifiée. C’est que sans l’apport des Américains, ne serait-ce que par le biais de la Banque mondiale comme du FMI, la conférence de Paris II ne représenterait pas grand-chose comme planche de salut pour le Liban économique. Il serait du reste vraisemblable qu’en cas de défection US, la plupart des donateurs occidentaux, excepté sans doute la France et les Méditerranéens comme l’Italie, se défileraient. Comme après le triste Forum des amis du Liban organisé en 1996 pour M. Hariri à New York par ses bons amis de là-bas et qui finalement n’a rien donné des 3 milliards de $ promis. Sur un plan ponctuel et local, l’éventuelle annulation de Paris II laisserait aux ministères libanais des Finances et de l’Économie un arrière-goût d’amertume bureaucratique. Dans ce sens que ces départements-clés sont mobilisés à plein temps depuis des mois pour préparer les dossiers techniques à plaider lors de Paris II. Sans compter l’effort fourni pour pondre avant l’heure le projet de budget 2002, alors que d’habitude ce document accuse un retard d’au moins un semestre. Un zèle qui s’explique par l’impatience des chancelleries, désireuses d’indices comptables clairs pour livrer à leurs gouvernements les signaux, vert ou rouge, concernant l’opportunité de répondre favorablement aux demandes d’assistance libanaises. Pour emporter la décision, le gouvernement a donc fignolé un budget prometteur : compression somptueuse des dépenses somptuaires, surtaxes et réduction sensible (mais évidemment purement prévisionnelle) du déficit annuel du Trésor, appelé à retomber de quelque 50 % (avoués, car en réalité avec les créances aux entrepreneurs ou aux hôpitaux conventionnés gardées hors budget l’on n’est pas loin de 60 %) à quelque 40 %. Pour bien frapper l’imagination des Occidentaux, assez sensibles à certains aspects dits démocratico-civils, le gouvernement a prévu des coupes sombres dans les crédits de départements forts comme la Défense ou l’Intérieur. Il a voulu ainsi montrer qu’il est déterminé à se serrer la ceinture, comme les donateurs le lui demandent. Qui réclament en outre des mesures de réforme administrative, pour laquelle on a prévu un train de nominations, et économique, pour laquelle on envisage des privatisations. Lesquelles devraient servir, il faut le rappeler, à réduire le volume de l’endettement public. Des privatisations, il convient également de le souligner, qui ne sont pas toujours faciles à opérer vu que la rentabilité de certains secteurs-clés comme l’électricité reste hautement aléatoire dans un pays à taux de resquille élevé. De plus, notent les spécialistes, le brusque bouleversement des données mondiales risque de porter un coup sévère au programme libanais de privatisations. Ce qui, redisons-le, rend Paris II encore plus nécessaire. Surtout si l’autre béquille en perspective, le sommet de la francophonie prévu dans deux petites semaines à Beyrouth, devait se ressentir négativement des retombées du 11 septembre. Soit en se trouvant reporté, ce qui paraît heureusement exclu ; soit en enregistrant un nombre élevé de défections ou un rabaissement du niveau des délégations. Sur ce plan, M. Hariri, disent ses proches, compte relancer sous peu le président Chirac auquel le lie, comme on sait, une solide amitié personnelle. Pour le prier de mettre toute son influence dans la balance afin d’assurer le succès du sommet. Tout comme le chef de l’État français avait contribué à ce que l’on dissocie Paris II de tout volet politique à consonance régionale, pour n’en retenir que l’aspect technique. C’est-à-dire que, contrairement à la France, certains Occidentaux étaient au départ tentés d’exiger le déploiement de l’armée libanaise à la frontière avec Israël et l’arrêt des actions de la résistance ainsi que son désarmement. Lors de sa visite à Paris, le président Émile Lahoud a su convaincre le président Chirac que le Liban ne peut rompre son jumelage avec la Syrie. Et tout ce que cela implique, face à Israël l’agresseur et l’occupant.
Fais ce que dois : bien que la voix libanaise ait peu de chances d’être entendue dans l’actuel tumulte mondial, les dirigeants de chez nous s’efforcent de multiplier les relances diplomatiques afin de sauver Paris II. Car du fait du déclenchement planétaire de la guerre contre le terrorisme, après les coups portés à l’omniprésente Amérique, cette conférence du...