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Actualités - ANALYSES

Tout pour le budget - La détente ne signifie pas le gel des dossiers brûlants

Après la pluie, le beau temps. Et, pour rester dans cette imagerie météo à la mode, l’on aurait tendance à ne voir dans le récent orage qu’un court-circuit de simples nuages d’été. D’autant qu’il est rare qu’un passé aussi récent appartienne déjà au passé. Composé. Car le replâtrage en accéléré a été visiblement préfabriqué par les décideurs. Sans leur intervention conciliatrice, confirme-t-on de tous côtés et même dans les rangs de leurs contempteurs, le gouvernement aurait volé en éclats. Et peut-être aussi, le système tout entier. Le pays a donc eu chaud, c’est le cas de le dire. Mais l’on est maintenant en septembre, mois de décrue caniculaire. Et en attendant octobre, émondeur des systèmes selon Lénine et des vieux arbres selon Baudelaire, le fond de l’air s’adoucit. Sur un air d’harmonie, les dirigeants promettant de mieux accorder leurs violons. Désormais jusqu’à dorénavant, c’est-à-dire au moins jusqu’à Paris II, date cruciale pour amorcer ce redressement dont on parle tant. Et que les divisions intestines ont sérieusement entravé, sinon compromis. À propos de compromis, il se réalise dès lors, tout naturellement, autour de la priorité économique. Qui se fait d’autant plus pressante que le discours officiel se montre rassurant. Par le verbe, et surtout par le comportement, seule une recimentation des pouvoirs pouvant vraiment lever les inquiétudes d’une population aux abois. La nécessité d’une récollection est si évidente que même un Walid Joumblatt, réputé pour sa pugnacité, décide d’enterrer la hache de guerre. Pour contribuer à la détente, comme à l’union, en se félicitant des bons rapports que commencent à nouer les présidents Lahoud et Hariri. Et en souhaitant que cette orientation se traduise par une réhabilitation du pouvoir législatif dont le rôle pondérateur mais aussi les prérogatives ne doivent plus être tenus pour quantité négligeable, sinon méprisable. En d’autres termes, la normalisation devrait signifier le retour à un système de démocratie parlementaire bien comprise, bien plus qu’une redéfinition des rapports de force entre pôles de l’Exécutif. Mais cela, c’est la théorie. Aussi plusieurs pôles opposants se hâtent-ils de souligner l’urgence de mesures concrètes traduisant l’amélioration du climat politique ambiant. Pour ces personnalités, le bon peuple ne peut plus se contenter d’envolées lyriques sur la beauté des retrouvailles interprésidentielles. Et il faut donc, après lui avoir offert le plaisir douteux des jeux du cirque, lui fournir maintenant du pain. Ce qui ne peut absolument pas se faire, affirment ces sources, si l’on décide de remiser sur une étagère les sujets qui fâchent, les dossiers de fond. Il est nécessaire, à leur avis, de prendre le taureau par les cornes et de vider, courageusement, l’abcès, là où les sédatifs ne suffisent plus. C’est le cas principalement pour le budget. Qui, bien au-delà de son rôle comptable fonctionnel, constitue le nucléus même de la politique (on dit plus volontiers aujourd’hui stratégie) économique et financière de l’État. Or, comme en atteste la relance critique effectuée par le président Hoss, ce projet de loi primordial suscite de fortes divergences d’écoles. Les uns, comme M. Hoss justement et les néochéhabistes, plaident pour la bonne vieille méthode pseudo-scientiste d’un plan de longue durée (quinquennal, septennal ou décennal). Afin, disent-ils, que les gens aient un repère dans le temps pour savoir quand le pays sortira de l’ornière. Les autres, postmodernes ou ultralibéraux, répliquent que de telles options sont bonnes pour les systèmes d’économie dirigée. Dont on sait ce qu’il est advenu. Cependant, depuis l’avant-dernière intervention de l’ancien chef du gouvernement, les choses ont changé. Il y a trois semaines, les loyalistes proches du régime ne cachaient pas leur étonnement que l’on pût prétendre agir sans plan quinquennal ou autre. Aujourd’hui, ils se contentent d’indiquer, ou de confirmer, que le chef de l’État confirme son appui à l’action projetée par le gouvernement en place. Et qu’il abonde dans le sens de M. Hariri quand celui-ci propose d’accélérer l’examen du budget de l’an prochain. Pour que le Liban dispose d’un atout (majeur) de plus lorsque Paris II se tiendra. L’opposition, tout en prenant acte de cet important accord des chefs, persiste cependant à marteler d’autres clous sensibles si l’on peut s’exprimer ainsi. Ses piliers s’interrogent en effet dans les salons, sur un ton évidemment sceptique, sur les chances qu’il y aurait de voir les présidents (Lahoud et Hariri mais également Berry) continuer à s’entendre aussi bien quand il faudra procéder aux nominations administratives, enclencher les privatisations ou encore régler les contentieux du cellulaire, de l’électricité, de l’Intra, du Casino, des offices autonomes ou conseils à supprimer et autres babioles. Qui cloutent sur le tableau noir, selon les opposants, les graphiques indiquant les parts des actionnaires du pouvoir, la hausse ou la baisse de leurs actions, de leurs dividendes, de leurs obligations. Et de leurs titres respectifs. L’opposition va encore plus loin quand elle affirme qu’outre les questions précitées, les dirigeants doivent veiller à bien corriger la trajectoire en ce qui concerne les dérives institutionnelles. C’est-à-dire, précisent-ils, il faut que non seulement les coupables des bavures d’août soient sanctionnés, discrètement ou ouvertement, mais encore que l’on prenne des dispositions précises pour que les services ne puissent plus n’en faire qu’à leur tête, en outrepassant l’autorité civile centrale. Dans le même ordre d’esprit, les opposants veulent des garanties en ce qui concerne l’application de la loi à tous, sans discrimination, à l’ombre d’un véritable État de droit. Ils réclament dès lors la poursuite, en toute transparence, d’enquêtes sur des scandales comme les quittances d’électricité ou les écoutes. Autrement dit, aux yeux des opposants, pour réduire la pollution comme la corruption, il faut à tout prix non pas laver le linge sale en famille, ni pousser la poussière sous les canapés ou les tapis. Mais bien passer l’aspirateur, même s’il fait beaucoup de bruit.
Après la pluie, le beau temps. Et, pour rester dans cette imagerie météo à la mode, l’on aurait tendance à ne voir dans le récent orage qu’un court-circuit de simples nuages d’été. D’autant qu’il est rare qu’un passé aussi récent appartienne déjà au passé. Composé. Car le replâtrage en accéléré a été visiblement préfabriqué par les décideurs. Sans...