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Actualités - REPORTAGES

HISTOIRE - La pluralité et le pluralisme au Liban - Aspects de la vie politique et sociale - - Par Hareth BOUSTANY

Les communautés religieuses Pour commencer, un rappel indispensable : le Liban est un pays multiconfessionnel, formé de dix-huit communautés religieuses : treize chrétiennes, quatre musulmanes ou issues de l’islam et, enfin, la communauté juive. Les communautés chrétiennes catholiques comprennent : les maronites, les grecs-catholiques, les arméniens-orthodoxes, les syriaques-catholiques, les latins, les chaldéens et les coptes. Les communautés chrétiennes non catholiques incluent les grecs-orthodoxes, les arméniens-orthodoxes, les syriaques-monophysites, les assyriens, les protestants, les coptes-orthodoxes. Dans les communautés musulmanes, on distingue les sunnites et les chiites et dans les communautés issues de l’islam les druzes et les alaouites (Nousairy). Toutes ces communautés qui composent le Liban actuel se sont réfugiées dans la Montagne entre le Ve et le XXe siècle. Seuls les sunnites peuvent se réclamer des premiers conquérants musulmans. Ce qui explique leur présence dans les villes de la côte et dans certaines plaines, car la conquête arabe s’arrêta, comme partout ailleurs, aux pieds de la Montagne. Il va sans dire, cependant, que les sunnites actuels de Saïda, de Beyrouth et de Tripoli ne sont pas exclusivement les descendants des conquérants arabes. Mais, une fois les foyers sunnites établis à tel ou tel endroit, il devenait facile aux différentes vagues déferlant sur la côte à travers les siècles – et surtout après le départ des croisés – de s’installer sur ces mêmes foyers. Ces éléments seraient à peine plus nombreux dans la communauté chiite où la grande majorité paraît être persane. Au Xe siècle, le géographe Al-Muqaddassi évoque Tyr et Baalbeck en affirmant que leurs habitants sont d’origine persane. Le premier contingent chiite fut envoyé vers la côte par les Omeyyades, d’abord pour les éloigner des centres sunnites, ensuite pour les charger de repousser les Byzantins dans le cas où ceux-ci aborderaient sur la côte. Beaucoup de chiites sont arrivés par la suite en réfugiés. Ils se sont installés de préférence dans les montagnes du Sud (Jabal Amel) et, surtout, dans le Kesrouan, où ils ont été massacrés, en même temps que les maronites, par les Mamelouks sunnites au début du XIVe siècle. La première grande communauté réfugiée en masse au Liban fut celle des maronites, arrivée en deux grands exodes : le premier à la suite du massacre de trois cent cinquante martyrs dans la vallée de l’Oronte, entre Apamée et Antioche, en 517 ; le second après la conquête musulmane de la Syrie, vers le milieu du VIIe siècle. Vers la fin du VIIe siècle, coupés de leur patriarcat d’Antioche du fait de l’occupation de cette métropole par les Arabes, les maronites du Liban, en nombre suffisant, créent un patriarcat propre et élisent, parmi leurs moines, le premier patriarche maronite de tout l’Orient. Au Liban, les maronites rencontrent d’autres réfugiés : des païens ayant fui les plaines byzantines après la proclamation du christianisme comme religion unique et des chrétiens chalcédoniens ayant fui, comme les maronites, l’hégémonie des monophysites dans les plaines de la Syrie. Avec la consolidation et l’organisation, dans la Montagne, de leur communauté-État, les maronites entreprennent auprès des païens un travail de prédication et de conversion. La communauté de langue, le syriaque, facilite d’ailleurs leur tâche. Ces maronites, de race araméenne comme tous les habitants de la Syro-Mésopotaine, ont vite fait d’absorber les descendants des Cananéens qui peuplaient encore, outre la côte phénicienne, les localités florissantes de la Montagne. Des apports sémites, chamites (Éthiopiens), indo-européens (Arméniens, Persans, Grecs, Francs, Albanais, Tcherkesses, Polonais, etc.) viennent plus tard se fondre dans le creuset libanais pour produire cette mosaïque, unique au monde, de races et de religions. Au début du XIe siècle a lieu l’exode de la petite communauté druze. Chassée d’Égypte et réfugiée d’abord à Wadi al-Taym où elle fait tache d’huile dans les milieux ismaéliens, elle occupe par la suite la montagne du Chouf dont elle fera, au XVIe siècle, le centre de l’émirat libanais. Au milieu du XIe siècle, le grand schisme d’Orient divise le monde chrétien en deux grandes communautés. À partir de ce moment, les chrétiens qui restent attachés à Rome sont appelés catholiques, et l’Église d’Orient est appelée orthodoxe. C’est ainsi que le Liban s’enrichit encore d’une communauté qui y existait certes depuis l’aube du christianisme mais au sein de l’Église universelle. À l’époque des croisades (XIe – XIIIe s.) toutes ces communautés, réfugiées dans la Montagne, profitent de la présence européenne pour consolider la position du Liban, refuge des minorités, face au monde oriental. Aussi la réaction est-elle terrible après la retraite des croisés. La bourrasque mamelouke déferle sur le Kesrouan en 1305. Elle ravage tout, brûlant, massacrant, anéantissant hommes et biens. Les survivants maronites trouvent asile à Chypre et dans la haute montagne. Pour les chiites rescapés, les uns prennent le chemin de l’Irak, d’autres accompagnent leurs amis maronites dans leurs refuges inaccessibles. C’est ainsi que quelques familles chiites, et non des moindres, se convertissent au maronitisme. Sans renier leur origine, elles occupent jusqu’à nos jours une bonne place parmi les vieilles familles maronites. D’autres enfin, pour échapper à cette extermination systématique, font semblant de se convertir au sunnisme. Les Mamelouks les prennent au mot et, ne faisant aucunement confiance à leurs cheikhs, leur envoient des prédicateurs d’Égypte et du Maghreb. La domination mamelouke ayant duré plusieurs siècles, ces nouveaux sunnites n’auront pas la possibilité de revenir à leur première communauté. Ils constituent le groupe des sunnites du Chouf, seul exemple de l’implantation de l’islam orthodoxe dans la Montagne libanaise, qui n’ont plus aucun souvenir de leur origine chiite. Au cours de la période ottomane, spécialement à partir du XVIIIe siècle, le Liban accueille plusieurs minorités fuyant la persécution sporadique ou systématique : grecs et syriaques catholiques y trouvent non seulement un gîte pour leurs communautés naissantes, mais des couvents pour leurs moines et un siège pour chacun de leurs patriarcats récemment créés. Sous l’émirat de Béchir le Grand (1789 – 1840), quatre cents familles druzes, fuyant la persécution sunnite au Djebel el-A’la dans la région d’Alep, s’installent auprès de leurs coreligionnaires du Chouf. Et que dire des exodes successifs des Arméniens, échelonnés sur plus d’un siècle et réglés au rythme des massacres organisés par la Turquie tant ottomane que kémaliste ? Leurs deux patriarches, orthodoxe et catholique, après de pénibles pérégrinations, s’installent définitivement au Liban. Après la Seconde Guerre mondiale, et surtout suite à l’instauration dans les pays arabes des régimes dits révolutionnaires, libéraux, progressistes, socialistes, etc., arrivent au Liban les dernières vagues des minorités devenues suspectes ou indésirables dans leurs propres pays : assyriens, syriaques et chaldéens d’Irak ; syriaques, maronites, grecs et alaouites de Syrie ; chrétiens d’Égypte, viennent rehausser les couleurs de cette mosaïque communautaire. Les institutions politiques Le système politique au Liban est donc basé sur la multiplicité des confessions religieuses. Chacune est représentée à la Chambre des députés au prorata du nombre de ses adeptes : sur les 128 députés qui forment le Parlement, 64 sont chrétiens et 64 sont musulmans ou de confessions issues de l’islam. Le Conseil des ministres est également divisé à part égale entre chrétiens d’un côté, musulmans et druzes de l’autre. Seules les confessions du président de la République, du président du Parlement et du Premier ministre sont fixées par entente tacite (le pacte national et la tradition). Le premier doit être chrétien maronite, le deuxième chiite et le troisième sunnite. De ce fait, au Liban, la laïcité n’existe pas et par conséquent la vie civile et sociale des Libanais est gérée par leur instance religieuse. Ainsi, le mariage civil n’est pas appliqué. Il n’est reconnu par l’État que s’il est contracté en dehors du pays. Chaque communauté gère ses propres ouailles en matière de mariage, mais aussi en matière de divorce, de succession…
Les communautés religieuses Pour commencer, un rappel indispensable : le Liban est un pays multiconfessionnel, formé de dix-huit communautés religieuses : treize chrétiennes, quatre musulmanes ou issues de l’islam et, enfin, la communauté juive. Les communautés chrétiennes catholiques comprennent : les maronites, les grecs-catholiques, les arméniens-orthodoxes, les...