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Actualités - CHRONOLOGIES

Parlement - Une majorité se ferait autour du vote des amendements du code de procédure pénale - Rafles, « aveux » filmés : les débats s’annoncent - houleux aujourd’hui à la Chambre

C’est une séance ordinaire que le Parlement tiendra aujourd’hui. Ordinaire, parce qu’elle est destinée à examiner vingt et un textes de loi, dont la très étonnante proposition de loi revêtue du caractère de double urgence et stipulant l’amendement du nouveau code de procédure pénale voté il y a juste seize jours par la Chambre. Mais dans le contexte actuel de crise et étant donné la levée de boucliers parlementaire contre les agissements scandaleux des services de sécurité, la réunion parlementaire promet de ne pas l’être du tout. Pour deux raisons : d’abord parce qu’elle risque de déboucher sur un bras de fer entre deux courants parlementaires : le premier cherche, à travers la proposition d’amendement du code pénal, à rétablir le contrôle de l’autorité politique sur l’appareil judiciaire et à proroger les délais de détention qui avaient été réduits à la base dans le principal but de barrer la route devant les abus. Le deuxième tente de préserver les acquis consacrés par le nouveau texte. La réunion promet ensuite de ne pas être ordinaire à cause des positions qui pourraient être adoptées par rapport aux rafles opérées dans les rangs de l’opposition et aux pratiques qui les ont accompagnées. Mais le Parlement – cette autorité issue du peuple qui reste «la source des pouvoirs» selon la Constitution – réussira-t-il là où le Conseil des ministres a fait un flop ? Saura-t-il se montrer à la hauteur de la responsabilité qui lui incombe aujourd’hui ? Dans certains milieux parlementaires, on estime que l’importance donnée à la réunion d’aujourd’hui est démesurée, surtout que le temps de parole imparti aux députés à l’ouverture de la séance est d’une demi-heure seulement, conformément au règlement intérieur de la Chambre. On sait cependant que le chef du Parlement, Nabih Berry, peut sans problèmes le proroger d’une demi-heure supplémentaire, ou plus. Il l’a déjà fait. Tout dépendra donc de son bon vouloir aujourd’hui. Son attitude revêt d’ailleurs une importance capitale dans la mesure où elle permettra de situer quelque peu le camp dans lequel se pose M. Berry, qui adopte un profil bas depuis que les rafles ont commencé et qui s’est abstenu de commenter les agissements des Services de renseignements. Mais quelle que soit le temps imparti aux interventions parlementaires, il sera toujours suffisant pour permettre aux ténors de la Chambre de laisser passer l’essentiel de leur message, de crier leur colère et de pousser le gouvernement dans ses derniers retranchements. C’est-à-dire d’exiger des explications sur ce qui s’est passé au cours de ces derniers jours et notamment sur l’attitude que l’Exécutif a adoptée vis-à-vis des abus commis par les services de sécurité, sur le pouvoir que ces derniers s’arrogent et sur le rôle et la responsabilité de l’autorité politique. Appel à un débat de politique générale ? Député de Batroun, M. Boutros Harb, qui a adressé au gouvernement une interpellation en ce sens, a laissé entendre qu’un appel à un débat de politique générale sera lancé au cours de la réunion. Rappelons qu’une deuxième interpellation sur le même sujet a été également adressée vendredi au gouvernement par huit députés membres des Assises de Kornet Chehwane. Mais à ce niveau, un problème se pose : les vacances parlementaires commenceront mercredi et finiront le 10 septembre. Pour que le débat de politique générale puisse se tenir, l’ouverture d’une session extraordinaire est nécessaire. On voit mal toutefois le chef de l’État prendre une telle initiative dans les circonstances actuelles. La seule issue reste une demande parlementaire d’ouverture de la session. Et là un autre problème se pose : selon l’article 33 de la Constitution, Il faut que la majorité absolue des membres de l’Assemblée, soit 65 députés, formule une demande en sens pour que le chef de l’État soit contraint de convoquer la Chambre. Et cela relève aujourd’hui presque de l’impossible. Dans les milieux proches de M. Nabih Berry, on s’efforce de minimiser l’importance de la réunion d’aujourd’hui, en soulignant notamment que le communiqué de l’armée sur les «aveux» attribués à Toufic Hindi contribuera grandement à tiédir les prises de position parlementaires par rapport aux rafles et aux événements qui leur ont succédé, «surtout que la justice s’occupe à présent du dossier». Mais les députés membres des Assises de Kornet Chehwane ne sont pas de cet avis. Au contraire, la diffusion de la vidéocassette sur les «aveux» attribués à M. Hindi est venue s’ajouter à la longue liste des abus qu’ils dénoncent et accentuer leur détermination à lutter contre une modification quelconque du nouveau code de procédure pénale. De diverses sources parlementaires, on soulignait en soirée que la proposition d’amendement du texte obtiendra une majorité parlementaire dans la mesure où elle est cosignée par dix députés représentants plusieurs blocs parlementaires alliés de M. Berry et du chef de l’État. Les signataires sont Ali Hassan Khalil, Ammar Moussaoui, Abdallah Kassir, Antoine Haddad, Robert Ghanem, Mohammed Ali el-Mayss, Yassine Jaber, Jihad Samad, Fayez Ghosn et Sélim Saadé. Ils proposent la prorogation de la durée de la mise en garde à vue et estiment que lorsque des poursuites pénales commandent une autorisation préalable d’une autorité non judiciaire, il appartient au parquet (qui répond directement de l’autorité politique) et non pas à la cour d’appel (autonome) de trancher dans tout différend qui émergerait entre cette autorité et le parquet de la cour d’appel, ou le parquet financier ou le commissaire du gouvernement près le tribunal militaire. Ils proposent aussi que le parquet puisse en cas de besoin mener directement une enquête. Dans les milieux proches de M. Berry, on justifie ces amendements par des «considérations purement juridiques», définies dans l’exposé des motifs du texte et «sans rapport quelconque avec ce qui se passe actuellement». Ce que les détracteurs du texte rejettent catégoriquement en insistant sur le caractère politique des amendements proposés. Comment expliquer autrement la précipitation avec laquelle la proposition d’amendement d’un texte qui vient juste d’être voté a été présentée ? Au-delà des remarques que de nombreux parlementaires formulent sur le fond et sur la finalité des amendements, c’est la forme qui est contestée. M. Nabil de Freije, membre du bloc Hariri, désigne comme «aberrante et contre toute logique» cette précipitation affichée pour modifier une loi votée pourtant par 81 voix contre trois. Il rappelle un précédent relatif au code de procédure civile, voté en 1983 et qui devait entrer en vigueur en 1985 : il avait été entre-temps amendé plusieurs fois. Mais aucune loi n’a jamais été modifiée en quinze jours. «La Chambre se discréditera si elle approuve la modification d’une loi, votée il y a deux semaines et qui a recueilli la majorité absolue des voix parlementaires. Ce n’est pas sérieux», souligne une source parlementaire indépendante qui insiste sur le principe de la «stabilité législative». Comble de l’ironie : le président de la Chambre, dont le bloc fait partie des signataires de la proposition de loi, ne serait pas très convaincu par le bien-fondé des amendements proposés.
C’est une séance ordinaire que le Parlement tiendra aujourd’hui. Ordinaire, parce qu’elle est destinée à examiner vingt et un textes de loi, dont la très étonnante proposition de loi revêtue du caractère de double urgence et stipulant l’amendement du nouveau code de procédure pénale voté il y a juste seize jours par la Chambre. Mais dans le contexte actuel de crise et...