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Actualités - CHRONOLOGIES

libertÉs - Arrestations dans les rangs aounistes et FL au lendemain de la tournée patriarcale au Chouf - Tollé général dans les milieux de l’opposition

Les milieux politiques locaux s’attelaient hier à analyser les retombées positives de la visite historique que le patriarche maronite, le cardinal Nasrallah Sfeir, a effectuée le week-end dernier au Chouf, à Jezzine et à Aley. Coïncidence ou riposte des «services» ? Moins de quarante-huit heures après la fin de la tournée du patriarche maronite, l’armée libanaise, plus précisément les Renseignements militaires, a opéré des rafles dans les rangs du courant aouniste et des Forces libanaises. Près de 150 responsables, cadres supérieurs et militants de ces deux formations ont ainsi été arrêtés dans l’après-midi d’hier et conduits dans des permanences de l’armée. Pour la première fois depuis 1994, deux hauts responsables de l’opposition chrétienne ont été appréhendés dans la foulée : il s’agit du général Nadim Lteif, représentant officiel du courant aouniste au Liban, et M. Toufic Hindi, ancien conseiller politique du leader des FL, Samir Geagea. Parmi les personnes arrêtées figurent, notamment, le responsable estudiantin des FL, M. Selmane Samaha, Élie Keyrouz, haut responsable au sein des FL (qui a été appréhendé à Becharré, en même temps que ses trois enfants en bas âge), et la plupart des responsables et cadres du courant aouniste, parmi lesquels MM. Georges Haddad, Fady Abou Jamra (fils du général Issam Abou Jamra) et Tony Harb. Les arrestations ont eu lieu au cours de perquisitions effectuées par une unité de l’armée, hier après-midi, dans les locaux du courant aouniste et des Forces libanaises, à Antelias. Un documentaire sur l’arrestation des aounistes, filmé par un amateur, devait être diffusé en soirée par la MTV. Ces rafles ont provoqué un véritable tollé généralisé dans les milieux politiques et parlementaires ainsi que dans les rangs de l’Ordre des avocats de Beyrouth (plusieurs des personnes appréhendées étant membres du Barreau, dont le général Lteif). Pour la plupart des députés et personnalités qui sont intervenus en direct, en soirée, sur les ondes de la MTV – qui a interrompu ses programmes pour consacrer son émission nocturne à cette affaire – ces arrestations constituent «une riposte des services» (de Renseignements) au climat politique qui a entouré la visite du patriarche maronite au Chouf. Face à la gravité du comportement des services de sécurité au cours des dernières quarante-huit heures, le cardinal Sfeir a chargé hier soir le vicaire patriarcal, Mgr Roland Aboujaoudé, d’entreprendre les contacts nécessaires afin de trouver une issue à la situation créée par ces rafles. Le conseil des évêques maronites, qui tiendra sa réunion mensuelle ordinaire ce matin, devrait prendre position au sujet de ces arrestations. Le président Amine Gemayel a déclaré quant à lui que «ces arrestations font honneur aux personnes appréhendées», précisant que le comportement des «services» dans cette affaire nous rappelle «les pires moments vécus par les pays totalitaires». «Je voudrais tranquilliser les parents (des jeunes arrêtés), a déclaré l’ancien chef de l’État. Les parents devraient être fiers de leurs enfants qui méritent une décoration». Le président Gemayel a indiqué que des réunions intensives auront lieu aujourd’hui pour arrêter une position unifiée émanant des différents responsables et courants politiques. Le leader du PNL, Dory Chamoun, a également vivement stigmatisé le comportement des services de Renseignements, s’interrogeant sur le fait de savoir si des critiques adressées à l’encontre de la Syrie constituent «un crime ou un délit». Le Amid du Bloc national, Carlos Eddé, a annulé un voyage privé qu’il devait effectuer hier soir et a convoqué les instances dirigeantes du B.N à une réunion extraordinaire qui aura lieu ce matin. Les assises du rassemblement de Kornet Chehwane (qui regroupe les personnalités, les partis et les courants de l’opposition chrétienne) tiendront également aujourd’hui une réunion extraordinaire pour suivre de près la situation. Le Forum démocratique, qui regroupe les représentants du rassemblement de Kornet Chehwane ainsi que le PSP, des responsables du Parti communiste et de nombreuses personnalités mahométanes de l’opposition, s’est élevé également contre les rafles dans les rangs des aounistes et des FL, stigmatisant l’attitude des «services» et de l’État dans cette affaire. «Alors que la visite du patriarche Sfeir au Chouf, à Jezzine et à Aley a constitué une étape historique sur la voie du dialogue et de la réconciliation, l’État sécuritaire est intervenu pour porter atteinte aux retombées positives du climat d’entente», a souligné le Forum démocratique dans un communiqué. Le député Nassib Lahoud a déclaré pour sa part que si le gouvernement ne parvient pas à faire appliquer la loi, il devrait démissionner ou être remplacé. «Ces jeunes n’ont fait qu’exprimer leur opinion, a souligné le député du Metn-Nord. Or, la liberté d’expression est garantie par la loi et la constitution dont le président de la République est le gardien». M. Boutros Harb, député de Batroun, a condamné de son côté «les mesures répressives du pouvoir». «Nous ne pouvons plus nous taire, il s’agit d’une atteinte au système démocratique», a déclaré M. Harb. Le député Farès Souaïd s’est également élevé contre le comportement des services de Renseignements, réfutant la thèse de l’armée selon laquelle les aounistes et les FL se livraient à des actions portant atteinte à l’ordre public. Les députés Farès Boueiz, Pierre Gemayel, Farid el-Khazen, Karim Racy et Pierre Daccache ont également vivement stigmatisé la vague d’arrestations. M. Gebrane Tuéni a qualifié de «coup de force militaire» les rafles d’hier, mettant en garde contre la gravité d’une telle attitude. M. Samir Frangié a qualifié le comportement des services de sécurité de «crime contre le Liban et contre le climat de réconciliation initié par la visite du patriarche». «Est-ce là le dialogue que le président de la République nous a promis», a-t-il déclaré. M. Michel Moawad, fils de Mme Nayla Moawad, a qualifié pour sa part ces arrestations de «tentative avortée de riposter à l’initiative du patriarche maronite au Chouf». M. Sami Nader, responsable aouniste, a comparé pour sa part les rafles à «l’arrestation des pères de l’indépendance du Liban», en 1943. Dans l’après-midi, la direction de l’orientation de l’armée avait publié un premier communiqué au sujet des arrestations dans les rangs de l’opposition. «À l’heure où la région est quotidiennement le témoin de massacres perpétrés par Israël à l’encontre du peuple palestinien, lesquels maintiennent la région au bord de l’explosion, certains éléments internes profitent du climat de liberté et de stabilité pour semer le désordre et la zizanie et s’attaquer aux instances (étatiques), avec une haine qui n’a rien à voir avec la politique et l’éveil national», a affirmé le communiqué. «La direction de l’orientation de l’armée met en garde contre les tentatives de tirer profit de cette situation à des fins négatives. Elle a pris et prendra toutes les mesures légales nécessaires et appropriées pour remettre les choses dans leur contexte et empêcher les atteintes à la stabilité nationale générale en cette phase délicate et cruciale», a-t-il poursuivi. Le bureau de l’ancien commandant en chef de l’armée, le général Michel Aoun, a répondu en soirée au communiqué de l’armée, estimant que le lien entre la situation régionale et la campagne d’arrestation de dizaines de militants aounistes et FL «cherche à justifier l’injustifiable». «Il s’agit de vieux arguments et de vieux slogans importés», a estimé le général Aoun. «Les jeunes qui ont réclamé la souveraineté et l’indépendance à Kahalé et dans la Montagne et ceux qui distribuaient le bulletin hebdomadaire qui contenait la réponse du général Aoun aux propos du président de la République, selon lesquels la Syrie a redonné sa souveraineté au Liban, ont fait allégeance à la patrie et à sa dignité», a souligné le bureau de l’ancien Premier ministre. «La demande du retrait des forces d’occupation syriennes au Liban est un droit sacré que la répression organisée par les services de renseignements ne pourra jamais ôter aux Libanais», a poursuivi le communiqué, appelant «toutes les instances morales, juridiques et spirituelles à ne pas se taire devant les exactions qui touchent le peuple libanais». M. Toufic Hindi avait pour sa part déploré (avant son arrestation) le niveau du communiqué de l’armée, jugeant irrationnel le lien entre la situation locale et régionale. «Où est la relation entre la répression menée par les Israéliens contre les Palestiniens, sur laquelle notre position est claire, et ce que le communiqué appelle le désordre et la zizanie ? Pourquoi le communiqué n’a-t-il pas précisé quels sont ces actes, qui se sont déroulés dans un climat de dialogue et d’unité lors de la visite du patriarche maronite au Chouf ? Quel est le rapport avec la stabilité du pays ? Comment peut-on légaliser l’interpellation de dizaines de jeunes ?», a demandé M. Hindi.
Les milieux politiques locaux s’attelaient hier à analyser les retombées positives de la visite historique que le patriarche maronite, le cardinal Nasrallah Sfeir, a effectuée le week-end dernier au Chouf, à Jezzine et à Aley. Coïncidence ou riposte des «services» ? Moins de quarante-huit heures après la fin de la tournée du patriarche maronite, l’armée libanaise, plus...