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Actualités - ANALYSES

Réforme : le pouvoir se dit résolu à aller de l’avant

L’État ne veut plus être cette vache à lait naguère chantée par un président issu du terroir. C’est du moins ce que soutiennent les dirigeants actuels. Qui bénéficient dans leur action réformatrice d’un avantage paradoxal : les caisses sont si vides, les dettes si élevées, qu’il n’y a pratiquement plus rien à pomper pour les profiteurs. Même les gagne-petit, même les droits acquis sont remis en cause, par la force des choses, comme on le voit avec les salariés de l’EDL. Il n’y a plus de butin à partager entre pôles d’influence. «Il faut désormais apprendre à se serrer la ceinture», soupire mélancoliquement un responsable qui ajoute que «sans forte compression des dépenses, sans éradication du gaspillage public, ni le Fonds monétaire international, ni la Banque mondiale, ni les Occidentaux n’accepteront de nous aider. Et sans une telle assistance, nous courons à la faillite d’ici à une dizaine d’années». En somme, c’est le mot, pour pouvoir dépenser, il faut cesser de le faire. Pendant un bon bout de temps. C’est une nécessité évidente. Et pourtant, par un étrange aveuglement aggravé par la démagogie, certains ne semblent pas réaliser le danger de la situation. «Et continuent, reprend ce responsable, à jouer avec le feu, à avoir les yeux plus gros que le ventre, à s’accrocher à des privilèges variés ou à entretenir un climat de grogne préjudiciable au pays social lui-même. Car il faut se mobiliser en bloc, consentir à tous les sacrifices tous ensemble, pour assurer le redressement. Les Libanais doivent serrer les rangs et avoir confiance. Nous sommes un pays sinistré, comme l’étaient, par exemple, l’Allemagne et le Japon après la Seconde Guerre mondiale. Comme eux, nous devons travailler d’arrache-pied à notre sauvetage économique. Sait-on combien la période 1945-1955 a été dure pour les Japonais et les Allemands, ou même pour un continent entier comme l’Europe ? Ces peuples ont sué sang et eau pour se tirer d’affaire. Sans se plaindre, sans revendications sectorielles, sans grèves, sans dangereuse agitation politique, sans zizanies. Et surtout, sans ce mortel égoïsme qui engendre ce que l’on appelle les luttes d’influence. Notre problème numéro un, aujourd’hui, c’est la mentalité qui imprègne la vie publique. Nous voulons assainir les finances de l’État, et on nous met ouvertement les bâtons dans les roues. Mais nous n’allons pas baisser les bras. Et nous allons continuer à appliquer, étape par étape, le plan de réforme établi dès son avènement par le président Rafic Hariri. Qui a tout de suite jugé qu’il fallait d’abord dégraisser le mammouth administratif, larguer le trop fort excédent de fonctionnaires parasitaires, supprimer les privilèges exorbitants, mettre un terme aux prestations consenties par les administrations à certains politiciens ou fonctionnaires, enfin juguler le gaspillage sous toutes ses formes. Et réorienter ensuite les dépenses d’une manière plus productive, pour réduire le déficit budgétaire, en allégeant du même coup la dette publique». Ce ministre confirme que le programme gouvernemental «bénéficie d’un appui total de la part du régime. C’est même la ferme intervention en Conseil des ministres du président Émile Lahoud qui a permis la concrétisation du premier coup de balai, donné dans le secteur de l’information officielle. Le chef de l’État a de même fortement soutenu le coup de barre à la MEA. Il plaide sans cesse pour que le mouvement ne s’arrête pas en aussi bon chemin et s’étende progressivement à tous les départements publics. Pour la modernisation de l’Administration, instrument économique incontournable. Mais aussi pour la consolidation de l’État de droit et des institutions, à la faveur d’une meilleure transparence publique». Mais le gouvernement, enchaîne cette personnalité, se heurte «à une contre-offensive perverse de la part des instances lésées, politiquement ou matériellement, par la réforme, par l’épuration ou par le redressement. Nos contempteurs, qui ne sont pas nés de la dernière pluie, savent manœuvrer. Ils tentent de faire accroire que tout notre mouvement est d’ordre purement politicien et vindicatif. Ils affirment que nous voulons affamer les Libanais pour mieux nous remplir les poches. Une calomnie qui est toujours efficace dans un pays où la population a appris à se méfier d’un pouvoir souvent laxiste. Malheureusement, beaucoup de politiciens ou de partis croient préférable de prendre le train de la démagogie facile. Au lieu d’expliquer à leurs électeurs que l’intérêt national bien compris commande des sacrifices, ils les encouragent à s’élever contre les mesures adoptées ou envisagées. On l’a vu pour la télé, pour la MEA, pour le mazout, pour le haschisch, pour le piratage des télécommunications, pour le cellulaire, pour l’électricité, pour l’eau, etc. Mais, répétons-le, rien ne nous détournera de la voie choisie, car il y va du sauvetage économique du pays». Sans doute. Mais lorsque ce ministre conclut, sur sa lancée, que l’instruction judiciaire sur les impayés de l’électricité ira jusqu’au bout «aussi importantes que soient les cibles des enquêteurs», le Libanais lambda ne peut retenir un petit sourire sceptique. En se demandant si, finalement, ce ne sont pas les syndicats qui vont se retrouver le bec dans l’eau. Pour avoir fait circuler une liste réquisitoire dont les indications seraient contestées comme erronées, imprécises ou non prouvées. De plus, on ne peut ignorer certains abus criants. Selon une personnalité politique généralement fiable, certains privilégiés revendent le courant obtenu gratis au voisinage. Ainsi s’expliquerait le fait que la consommation mensuelle d’un seul ménage de fonctionnaires atteigne les 5 000 Kw, soit dix fois plus que la moyenne. L’affaire reste donc à suivre.
L’État ne veut plus être cette vache à lait naguère chantée par un président issu du terroir. C’est du moins ce que soutiennent les dirigeants actuels. Qui bénéficient dans leur action réformatrice d’un avantage paradoxal : les caisses sont si vides, les dettes si élevées, qu’il n’y a pratiquement plus rien à pomper pour les profiteurs. Même les gagne-petit,...