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Actualités - REPORTAGES

Agressivité, anxiété, apathie, troubles du sommeil, - un pain quotidien bien difficile à gérer

Agressivité, angoisse, troubles du sommeil et de l’appétit… sont devenus le pain quotidien d’un nombre important de personnes dans notre pays. Et pour cause, le stress sévit et nuit. Définissant le stress comme un mode d’interaction entre une personne, son milieu et un événement spécifique qui met la personne dans une situation difficile, Aimée Nasser Karam, docteur en psychologie clinique et psychothérapeute, expose les causes et manifestations du stress ainsi que les différentes formes de traitement. Des manifestations qui diffèrent d’un individu à l’autre, car chacun réagit à sa manière à un événement donné. Certaines situations particulièrement difficiles sont classées par consensus comme étant des constantes responsables de l’apparition du stress. Situations traumatiques, extrêmes, exceptionnelles, qui mettent en danger le bien-être d’un individu ou de ses proches, comme la guerre, les voitures piégées, les catastrophes naturelles, la crise économique, les vols, les viols... De même, l’incontrôlabilité d’une situation donnée et l’imprévisibilité d’un événement grave sont sources de stress, d’angoisse et d’anxiété. Actuellement, l’imprévisibilité et l’incertitude qui règnent dans le pays, sur les plans politique, économique et dans le marché du travail, empêchent les gens de se projeter positivement dans l’avenir et sont des causes majeures du stress. Certes, ajoute Aimée Nasser Karam, le fait de prévoir un événement, comme par exemple la mort d’une personne malade, n’annule pas ce stress, mais rend la situation moins difficile à gérer et moins douloureuse. Aussi, nombreuses sont les réactions psychologiques au stress, des réactions qui modifient carrément le comportement de la personne. Agressivité, colère, mais aussi perte de la bonne humeur, désenchantement, anxiété, détresse et apathie apparaissent, mettant en relief un important dysfonctionnement de l’humeur. «Cette dysthymie est telle, qu’elle peut mener à des troubles anxieux, voire à la dépression», explique Mme Karam. Parallèlement, la personne vivant une situation extrême d’angoisse et de stress n’a plus goût à rien. Elle présente des troubles du sommeil, de l’appétit, de l’énergie, de la concentration et perd sa confiance en soi. Une passivité nocive La réaction la plus commune au stress est le concept de «l’impuissance acquise», reprend la psychothérapeute. Cette manifestation se traduit par un état d’impuissance face à l’événement, entraînant une passivité et une apathie chez l’individu. Ainsi, lorsqu’un individu vit une situation qu’il ne peut contrôler ou qu’il perçoit comme étant incontrôlable, il ne réagit plus et ne tente même pas de sortir de sa situation d’échec. «C’est comme s’il se laissait mourir», précise-t-elle. Un comportement généralement accompagné d’un schéma de pensée tel que la personne est profondément convaincue qu’elle ne peut plus rien faire pour changer la situation, même si elle a les possibilités de le faire. «Si la personne en est arrivée à ce point extrême, explique-t-elle, c’est que dans une situation donnée, elle a tout essayé sans aboutir à la moindre solution. C’est la raison pour laquelle elle n’explore plus les possibilités et laisse tomber, même lorsqu’une solution est envisageable». Les troubles anxieux apparaissent généralement lorsque la personne est confrontée à des situations ambiguës et confuses, vécues comme une menace permanente, vis-à-vis desquelles elle n’arrive pas à se structurer. Des situations qui ne sont ni positives ni négatives, comme la situation au Liban, et qui mettent la personne dans un état d’indécision continuelle et donc de stress. Le choix est tellement difficile que l’individu n’arrive pas à le faire, plongeant dans une situation de confusion totale ou d’anxiété. Survient alors l’angoisse généralisée, se traduisant par une inquiétude par rapport à tout ce qui entoure l’individu, dans tous les domaines de sa vie, mais aussi par des manifestations de panique dans des situations bien définies. Ainsi, la situation au Liban met-elle bon nombre de personnes en situation de stress, car elles n’arrivent pas à opter pour la décision de rester dans le pays ou pour celle de s’en aller vivre ailleurs. De même, un divorce, ou l’indécision entre la dépendance et l’indépendance pour de jeunes adultes, tiraillés entre l’envie de vivre seuls et la sécurité que représente pour eux le domicile parental, présentent des situations conflictuelles qui les empêchent de construire un équilibre entre les deux options et engendrent le stress. Des ressources personnelles pour gérer son stress Si l’école américaine présente les trois F comme étant les trois réactions aux situations de stress, faire face (Fight), perdre pied (Faint) et fuir (Flight), on est convaincu que la structure individuelle joue un rôle important dans l’adaptation au stress, certifie Mme Karam. Et c’est l’utilisation des ressources personnelles pour conjuguer avec une situation stressante qui fait la différence entre les individus. Chaque personne explique à sa manière, selon son propre style, les raisons d’un événement négatif ou positif. Elle peut attribuer ce qui se passe à des éléments externes, comme la volonté de Dieu, la providence, la chance ou alors penser qu’elle est elle-même responsable de son problème et qu’elle en possède la solution. De même, cet individu peut penser que son problème empoisonne toute sa vie et qu’il est éternel, alors qu’il peut aussi être perçu comme provisoire et se limiter à un seul aspect de sa vie. Aucune étude scientifique ne prouve qu’il y a une relation directe entre le stress et des maladies physiques bien déterminées, remarque la psychologue. Certes, les événements de la vie, les changements, la perte d’une personne aimée, sont susceptibles d’entraîner chez l’individu certains problèmes psychosomatiques. De même, une personne qui vit une situation difficile boit beaucoup de café, fume davantage et se néglige physiquement. Sa santé n’est plus une priorité car elle est immergée dans son problème. C’est ce relâchement et ce manque de prise de soin de soi qui risquent d’engendrer des problèmes somatiques. De plus, un individu peut répondre au stress par une dépression qui, quand elle est sévère et non traitée, peut mener elle-même au suicide. C’est pourquoi on peut dire qu’il est indirectement lié à un acte suicidaire. Il n’existe pas une seule façon de traiter le stress, conclut Mme Karam. Si l’intervention du psychiatre est indispensable pour le traitement de la dépression, vu la nécessité d’administrer des antidépresseurs, deux formes de thérapies liées au stress peuvent être menées par un psychothérapeute. La saisie directe du problème, liée à sa résolution, vise à mobiliser le processus de résolution de la source du stress en définissant le problème, en le reconnaissant et en étudiant les différentes solutions possibles. L’autre forme de thérapie est basée sur la gérance des affects et consiste à enseigner à l’individu à mieux gérer ses émotions, mais aussi à gérer son temps, à le structurer et l’organiser de manière à éliminer toute source de stress. Par ailleurs, il est important de sensibiliser la personne aux plaisirs de la vie quotidienne, en l’aidant à rechercher des sources de plaisir différentes de son travail ou de ses occupations journalières.
Agressivité, angoisse, troubles du sommeil et de l’appétit… sont devenus le pain quotidien d’un nombre important de personnes dans notre pays. Et pour cause, le stress sévit et nuit. Définissant le stress comme un mode d’interaction entre une personne, son milieu et un événement spécifique qui met la personne dans une situation difficile, Aimée Nasser Karam, docteur en psychologie...