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Actualités - ANALYSES

Réforme - Retour nécessaire au respect des textes institutionnels - Le dossier des services : encore un problème réglé - sur le papier, mais pas en pratique

En bonne logique, la campagne contre les abus dans les écoutes téléphoniques et contre les débordements des services devrait provoquer une redéfinition des prérogatives de ces organismes d’État qui semblent échapper au contrôle du gouvernement. En réalité, la réforme consisterait à revenir tout simplement au respect des textes institutionnels. Car les accords de Taëf, rappelle le président Hussein Husseini qui en fut l’un des artisans, ont expressément fixé comme suit la mission de la Sûreté générale : «Renforcement de cette direction, afin qu’elle soit en mesure de contrôler de près le mouvement de sortie ou d’entrée des particuliers en territoire libanais, de franchissement des frontières nationales, par voie de terre, de mer ou par les airs». Il existe dans les accords de Taëf bien d’autres clauses similaires, s’appliquant aux différents départements dits de sécurité. À en croire l’ancien président de la Chambre, on peut comprendre que les circonstances n’aient pas permis antérieurement de promulguer les lois ou les décrets d’application détaillant en termes concrets ces dispositions. Mais, à son avis, l’heure de procéder à la mise en place de législations visant à l’édification effective de l’État des institutions et de droit a sonné pour le gouvernement. L’ancien président de la Chambre attire de la sorte l’attention des responsables actuels sur le fait qu’ils disposent d’un instrument déjà préparé, à travers les projets de lois élaborés par une commission ministérielle animée par MM. Michel Murr et Sami el-Khatib, lorsqu’ils étaient à la Défense et à l’Intérieur. Les trois séries de textes élaborées concernaient la Sûreté d’État, la Sûreté générale et les forces régulières armées. Mais ce programme, pour des raisons que nul n’a jamais explicitées, n’a pas été soumis au Conseil des ministres ni, par voie de conséquence, à la Chambre. Et on ne sait pas dans quels tiroirs dorment aujourd’hui ces recommandations d’ordres organisationnel et juridique. C’est d’ailleurs peut-être mieux ainsi. Car en général, ces projets consacrent une pratique fondée sur des empiètements de prérogatives entre différents départements. Ainsi, M. Husseini continue à protester contre la création, de but en blanc, d’une Sûreté d’État. En soulignant que techniquement le pays n’en a nul besoin. Bien au contraire, puisque dans bien des secteurs cette direction fait double emploi avec la Sûreté générale. M. Husseini ajoute que cette trouvaille de Sûreté d’État n’est motivée que par des considérations d’équilibres confessionnels et des intérêts politiques déterminés. Ce qui va à l’encontre de l’esprit d’un État des institutions. L’ancien chef du Législatif semble, en effet, avoir raison quand il dénonce les empiètements de prérogatives entre les deux Sûretés. Car la Sûreté d’État doit, selon le projet de code qui confirme sa mission de fait, «collecter puis exploiter les renseignements en rapport avec la sûreté extérieure et intérieure de l’État, notamment en ce qui a trait aux données sécuritaires, politiques, économiques, sociales et financières». La panoplie complète, en somme. La loi virtuelle ordonne ensuite à ce même organisme, tout comme elle le fait pour la Sûreté générale, de «lutter contre l’espionnage et contre les activités subversives, en procédant aux investigations requises, en prenant les mesures qui s’imposent, en surveillant les voyageurs, en enquêtant sur les non-Libanais durant leur séjour dans le pays». À l’instar de la SG, le service concerné se voit octroyer le pouvoir de viser les entrées, les permis de séjour, les sauf- conduits, les passeports. Plus exactement, ce pouvoir consiste à approuver ou non toute pièce examinée, avant le contrôle de la Sûreté générale, et cela dans des délais qu’il appartient au ministre de l’Intérieur de fixer. Autre double emploi avec la SG : la SE, dit le projet de loi, «assume la responsabilité sécuritaire des ports et des aéroports. La surveillance des frontières terrestres, maritimes et aériennes lui incombe. Ainsi que l’octroi de permis d’entrée dans les zones interdites. Elle doit contribuer par ailleurs à la protection des officiels ou des personnalités, libanais ou non libanais. Elle doit informer les diverses administrations de questions de sûreté les concernant et, dans ce cadre, donner son avis sur toute candidature à un poste public. Elle doit examiner, sous l’angle de la sûreté d’État, toute demande de permis ou de licence. Enfin, elle doit remettre régulièrement un rapport de synthèse, émaillé de résolutions concernant la sûreté, aux trois présidents sur l’état sécuritaire, économique, social, politique et financier du pays». La même tâche, à la virgule près, que la Sûreté générale ! Qui bénéficie cependant de quelques suppléments, plus ou moins gratifiants, comme la surveillance des associations sociales, culturelles, sportives, religieuses, des syndicats, la censure des médias, de la production télévisuelle ou cinématographique et des publications.
En bonne logique, la campagne contre les abus dans les écoutes téléphoniques et contre les débordements des services devrait provoquer une redéfinition des prérogatives de ces organismes d’État qui semblent échapper au contrôle du gouvernement. En réalité, la réforme consisterait à revenir tout simplement au respect des textes institutionnels. Car les accords de Taëf,...