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Actualités - CHRONOLOGIES

BAABDA-MOUKHTARA - Dossier syrien : « On y arrivera, mais calmement et sans pressions », a dit le président - Lahoud à Joumblatt : La sécurité de l’État, un organisme de trop, sans doute...

Inlassablement, et avec constance, le leader du PSP continue à creuser, patiemment, minutieusement, son sillon. À cultiver son jardin. C’est-à-dire à dialoguer, encore et toujours. En respectant les prérogatives du premier magistrat de la République – président de tous les Libanais –, mais en n’oubliant certes pas que lui-même est un des principaux leaders de l’opposition, comme celui de toute une communauté. Walid Joumblatt a poursuivi, il y a deux jours, le dialogue de nouveau entamé il y a moins d’un mois avec Émile Lahoud. Ils ont parlé, se sont rappelés leurs credos, en ont discuté, ont mis les choses à plat. Et ils ont même déjeuné ensemble. Également en tête-à-tête. «Quand on se souvient de leurs rapports depuis deux ans, ce qui s’est passé mardi est à peine croyable...», a-t-on souri, plusieurs fois, du côté des sources proches de Moukhtara, interrogées par L’Orient-Le Jour. Le dossier syrien évoqué jusqu’au bout «Prêt». Prêt est l’adverbe utilisé par ces mêmes sources pour parler de l’attitude du chef de l’État au cours de la rencontre de mardi. «Il est prêt à engager le dialogue avec tous. Prêt à écouter tous les problèmes, qu’ils soient internes ou autres...». Cela on le savait... Sauf qu’Émile Lahoud et Walid Joumblatt ont été bien plus loin. Ils ont réellement privilégié, avant-hier, l’échange. Une espèce de donnant-donnant somme toute assez pragmatique. Le chef de l’État voudrait à tout prix faire partager au leader de l’opposition qu’est le chef du PSP son message sur le Liban-Sud. Et Walid Joumblatt, son cheval de bataille : la correction des relations libano-syriennes, le redéploiement, l’arrêt des immixtions dans la vie politique, bref, son discours de novembre dernier place de l’Étoile. Les thèmes récurrents du chef de l’État : la «solidarité libano-syrienne avec le Golan», comme l’«impossibilité d’enlever les fermes de Chebaa», ou le non-envoi de l’armée «parce que c’est un état de guerre»... Et en privé, toujours selon les mêmes sources, le chef du PSP «s’en veut». Il s’en veut d’avoir fait partie de cette équipe, qui a été la première à avoir parlé, il y a quelques années, de la concomitance des deux volets. «Nous avons commis une erreur, nous sommes tombés dans le piège. Que signifie le mot solidarité ? Que le Liban va attendre la libération du Golan ? Et doit-on dire alors que les relations libano-syriennes ne seront pas saines tant que le Golan ne sera pas libre ? Mais ces relations ont beaucoup d’autres aspects bien plus importants», ont rapporté ces mêmes sources. Ainsi, et quoique certaines sources aient pu, à la veille de la rencontre, décréter – que Walid Joumblatt pourrait parler de ce que bon lui semble avec Émile Lahoud, à l’exception du dossier syrien –, les deux hommes l’ont bel et bien évoqué, et sous toutes les coutures. Ou presque. Le chef du PSP aurait, naturellement et en toute logique, poliment refusé la solution attentiste. Celle qui veut, donc, que rien ne se règle avant la libération du Golan. «Walid Joumblatt lui a demandé si, en attendant cette “solution”, Damas ne pouvait pas lui accorder, à lui et rien qu’à lui (i.e. le chef de l’État), ce qui ressemblerait de très près à un redéploiement. Dans tous les cas, les Syriens ne le lui donneraient qu’à lui. Évidemment pas, uniquement, pour ses (beaux) yeux...», ont indiqué les sources proches de Moukhtara. «On y arrivera. Mais calmement et sans pressions», lui aurait répondu le général Lahoud. Retour à la case départ ? «Sans doute. À moins que le chef de l’État n’ait une carte cachée dans sa manche...». D’autant plus qu’Émile Lahoud aurait répété à Walid Joumblatt que «le redéploiement avait bien commencé il y a un an, mais qu’avec la reprise de la crise régionale, cela s’était arrêté». La troïka, le Hezbollah et les services... Au cours de leur entretien, le président de la République aurait évoqué l’éventualité de voir les camps palestiniens «en effervescence» en cas de non-règlement de la crise en Palestine. «Il pourrait y avoir une discorde interne», aurait-il craint. «Mais de qui ? Provoquée par qui , lui aurait demandé Walid Joumblatt, les milices chrétiennes comme celles de l’époque n’existent plus». Lahoud : «Je sais, mais elles seraient facilement tentées de provoquer quelques actions...». Et le député du Chouf de demander alors quelle serait la solution. «Si ça traîne plus d’un an, on risque d’être dans un vrai nouveau pétrin», lui a répondu son hôte, d’après lequel, d’ailleurs, le Premier ministre israélien Ariel Sharon serait «au bout du rouleau». Émile Lahoud et Walid Joumblatt ont certainement dû évoquer la troïka. Selon les sources précitées, «c’est la première fois – du moins face à Joumblatt – que le chef de l’État exprime des craintes au sujet de la situation économique. Tout en convenant de la nécessité de collaborer, même étroitement, avec Rafic Hariri. À la condition que ce dernier le mette, au préalable, au courant de chacune de ses initiatives». Et Nabih Berry, dont la brouille avec le locataire de Baabda semble de plus en plus sérieuse chaque jour ? «Nabih Berry est gêné. Très gêné par l’alliance entre le Hezbollah et l’État. Mais cette brouille ne durera pas», répondent ces mêmes sources. Au sujet de l’épisode du très haririen vice-président syrien et du déjeuner à cinq à Baabda, la semaine dernière ? «On aurait “forcé”Abdel-Halim Khaddam à venir. Mais tout cela n’avait pas été programmé. Dans tous les cas, il est hors de question qu’il récupère de nouveau le dossier libanais, ou qu’il recommence à attiser la troïka...». Les sources proches de Moukhtara dixit... Et pour revenir au Hezbollah, L’Orient-Le Jour a appris que le leader druze a demandé au président de la République «s’il se rendait compte que le seul message politique lors de la commémoration à Qardaha du premier anniversaire du décès de Hafez el-Assad a été celui de Hassan Nasrallah. Qui n’a absolument pas tenu compte de l’État». Sur quoi Émile Lahoud aurait souri. Et Walid Joumblatt de revenir à la charge : «Peut-on envoyer un message à Hassan Nasrallah pour qu’il mentionne, au cours de ses discours futurs, l’État ?». Sur quoi Émile Lahoud aurait, de nouveau, souri. Et les «services» ? Les écoutes, la «militarisation» du régime ? «La question a été évidemment évoquée par les deux hommes. Le président Lahoud a réaffirmé que, dans tous les pays, il y a des organismes. Sauf que le locataire de Baabda aurait reconnu qu’il y avait un organisme de trop : celui de la Sécurité de l’État», a-t-on appris de ces mêmes sources. La Sécurité de l’État étant un «service» géré et régi par... Nabih Berry. Continuer à aller à Baabda Et le timing de cette rencontre ? Qui s’inscrit dans une série d’entretiens accordés par le chef de l’État à de nombreux pôles de l’opposition ? «Il est en train de tendre la main, et au patriarche Sfeir et à Walid Joumblatt. Le chef de l’État a envie de se donner une crédibilité chrétienne. Il semble vouloir fédérer, être le président de tous les Libanais, être un zaïm chrétien. En a-t-il l’étoffe ? Le temps sera seul juge. Et Joumblatt avait dit, lors de la première rencontre, que la balle était désormais dans le camp de Baabda. Il considère aujourd’hui que le chef de l’État a utilisé cette balle, il reconnaît sa bonne volonté. Mais il faut maintenant du concret. Si le président peut arracher aux Syriens des ajustements de leur présence et une rectification sécuritaro-militaire, ce serait une bonne chose...». Résumé ? Joumblatt : «Il faut être conscient que le temps ne joue pas en notre faveur.» Lahoud : «Si ça se règle là-bas, ça se réglera ici». Quoi qu’il en soit, force est de constater que le (nouveau) schéma est désormais le suivant. Walid Joumblatt a toujours exhorté le premier magistrat de la République à saisir chaque occasion de dialogue et à lui donner corps. Le chef de l’État a entendu le leader druze. Qui continuera, en principe, à aller à Baabda, inlassablement, mener le dialogue à son bout. Et puis il y a un détail. Si Walid Joumblatt est un fin politique, il est aussi un très fin gourmet. «Il a trouvé le poisson servi à déjeuner très bon», sourient les sources précitées. La (bonne) histoire se parfait quelques fois grâce à ces petits détails-ci...
Inlassablement, et avec constance, le leader du PSP continue à creuser, patiemment, minutieusement, son sillon. À cultiver son jardin. C’est-à-dire à dialoguer, encore et toujours. En respectant les prérogatives du premier magistrat de la République – président de tous les Libanais –, mais en n’oubliant certes pas que lui-même est un des principaux leaders de...