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Actualités - CONFERENCES ET SEMINAIRES

Colloque - Un bilan des relations UE – Moyen-Orient - Kourkoulas : Nous devons continuer malgré les problèmes

Comment comprendre cette dynamique paradoxale qui marque aujourd’hui l’espace euro-méditerranéen et caractérise la relation entre l’Europe et le Moyen Orient ? Car si l’on assiste d’un côté à un processus d’intégration, de paix et de développement qui s’étend de part et d’autre des deux rives, il va sans dire que le Proche-Orient se dirige de son côté vers une dynamique de dislocation et de désintégration. C’est par cette problématique que le politologue Joe Bahout a introduit hier le thème du premier colloque organisé par le Centre d’études sur l’Union européenne à l’USJ. Intitulée «L’Union européenne et le Moyen-Orient : l’état des lieux», cette conférence-débat a été l’occasion, comme son titre l’indique, de faire le point sur la situation, non seulement par rapport au Moyen-Orient, mais aussi au sein même de l’Europe vue sous l’angle des développements institutionnels, et de l’Union «en voie de devenir». Où en est l’Europe aujourd’hui ? Et quel avenir pour l’Union européenne au moment où les débats suscités s’intensifient à l’échelle des hauts responsables, s’interroge le chef de la délégation européenne au Liban, Dimitris Kourkoulas, premier à prendre la parole. «Le débat doit répondre à une question fondamentale : quelle Europe voulons-nous ?» «C’est le projet qui doit permettre d’orienter les choix institutionnels», dit-il. Rappelant que selon le concept d’origine des pères fondateurs, le processus de l’intégration européenne était au départ politique et non seulement économique, M. Kourkoulas a affirmé que le grand défi actuel est d’étendre la zone de prospérité et de stabilité au voisinage immédiat. L’UE est la principale source d’aide au développement et d’assistance humanitaire, principalement dans les territoires palestiniens, rappelle M. Kourkoulas. «Mais il reste beaucoup à faire. Car dessiner une politique étrangère et commune est plus facile à dire qu’à faire», reconnaît le diplomate. Avec un produit intérieur brut de 30 % supérieur à celui des États-Unis, et étant le principal investisseur à l’étranger, ce ne sont pourtant pas les moyens économiques qui manquent à l’Europe, dira-t-il, en précisant que la politique étrangère et de sécurité est étroitement liée à l’économie. «Ce poids économique attend toujours d’être traduit en pouvoir politique». Mais encore que représente l’évolution de la construction européenne pour le Liban et le Moyen-Orient ? Par-delà les objectifs adoptés à Barcelone (œuvrer pour la paix et la stabilité, créer une prospérité partagée, etc.), «les difficultés rencontrées par le processus de paix ont ralenti et continuent de ralentir la progression vers la réalisation de nos objectifs. Mais nous devons continuer à œuvrer en vue de les atteindre malgré tous les problèmes», a soutenu M. Kourloulas. Toutefois, il s’agit de prendre les mesures adéquates afin de «renforcer Barcelone», à savoir activer la négociation, la signature et la ratification des accords d’association, développer le commerce Sud-Sud et la coopération sur le plan sous-régional, et enfin, harmoniser les mesures relatives au marché unique. «En cherchant à décrire l’intervention politique de l’Europe au Liban durant les dix dernières années, nous arrivons à une conclusion quelque peu décevante», constate Michael Young, journaliste et enseignant à l’USJ. Intervenant sur le thème «Le Liban et les pourparlers de paix», le conférencier reprend l’historique des «mésaventures du Liban», comme il dit, dans l’évolution des pourparlers de paix, en mettant en relief les interventions ponctuelles de l’Europe, ou plutôt des États européens, dans ce processus. Celles-ci sont rares, souvent timides. Démontrant le rôle prépondérant de Washington dans les négociations de paix, et durant ce qu’il appelle la «mutation» de la 425 dont le contenu ou l’interprétation a dû évoluer selon les circonstances, le journaliste plaide en faveur d’une rôle accru de l’Europe. Qualifiant la résolution 425 «d’intouchable» durant les mandats de Rabin et de Netanyahu, au sens où Israël aussi bien que la Syrie avaient intérêt tous deux à ne pas y toucher, Michael Young explique : «Hafez Assad cherchait au Liban des cartes lui permettant de mieux gagner la partie du Golan. Il n’avait aucun intérêt à faire partir les forces d’occupation. Sans Israéliens, il n’y aurait pas de morts, donc plus de moyens de pressions (...). L’arrangement de Damas stabilisait et assurait la continuation d’un conflit maîtrisable au Liban-Sud». «Autant la Syrie qu’Israël sont implicitement d’accord pour contourner la résolution : la Syrie, parce qu’elle veut éviter la neutralisation militaire du Liban-Sud et toute éventualité de séparation des deux volets syrien et libanais ; Israël, parce qu’il n’a jamais accepté la légitimité de la 425, et ne voudrait pas le faire sans parvenir à un accord de paix avec le Liban». Les événements qui suivront changeront les donnes, et l’arrivée de Barak précipitera les choses, affirme M. Young. «C’est presque malgré lui que le gouvernement libanais constatera à la fin mai 2000 que les Israéliens partent, et qu’ils ne cherchent pas à revenir. Il faudra alors aller les trouver». Mais encore, par où passe l’Europe après le retrait ? Et que peut-elle faire à court terme dans le volet libano-israélien ? s’interroge le conférencier. La ligne de conduite déjà définie par plusieurs pays européens s’articule autour de trois objectifs, dit-il : éviter un conflit généralisé provoqué par la tension dans la région de Chebaa ; encourager l’armée libanaise à se déployer juqu’à la frontière internationale ; et améliorer le quotidien des habitants du Liban-Sud. Encore faut-il renforcer cette ligne de conduite, soutient l’intervenant. Rappelant que la situation dans la région de Chebaa menace la paix régionale, le journaliste affirme qu’il serait peut-être utile de la part des pays européens «de hausser le ton, en proposant aux libanais davantage de mécanismes qui pourraient confirmer la libanité des fermes de Chebaa. De telles démarches ne seraient certainement pas appréciées à Beyrouth, ni d’ailleurs à Damas, mais un engagement public semble nécessaire, qui lierait une démilitarisation dans la région de Chebaa à une aide économique».
Comment comprendre cette dynamique paradoxale qui marque aujourd’hui l’espace euro-méditerranéen et caractérise la relation entre l’Europe et le Moyen Orient ? Car si l’on assiste d’un côté à un processus d’intégration, de paix et de développement qui s’étend de part et d’autre des deux rives, il va sans dire que le Proche-Orient se dirige de son côté vers...