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Actualités - CHRONOLOGIES

CONCERT - L’Orchestre philharmonique des Nations au Casino du Liban - La musique, ce langage universel…

C’est sous le signe et les volutes de l’espoir et de la paix (un peu rêvée dans notre région embrasée!) que se situe d’emblée l’Orchestre philharmonique des Nations (dont le «la» remonte à 1995) placé sous la houlette de son fondateur et maestro Justus Frantz. Musiciens de tous crins, de tous âges (toutefois avec une nette propension pour une fringante et talentueuse jeunesse !) et de tous horizons pour un orchestre foncièrement cosmopolite où ni frontières, ni couleurs, ni traditions, ni culture ne sont des barrières pour ce langage harmonieux et universel qu’est la musique. Grande musique aux éblouissantes chatoyances, avec des sentiments forts et intenses prônant la glorification de l’amour conjugal, révélant des tourmentes secrètes et inavouées, et opérant une grande rêverie au cœur de la nature selon une tradition bien romantique. Sous les feux de la rampe du Casino du Liban et derrière le velours rouge de ses rideaux, voilà donc l’Orchestre philharmonique des Nations lâchant une imposante troïka sonore composée des pages de trois «géants» du répertoire du XIXe siècle : Beethoven, Tchaïkovski et Brahms. Premières mesures, majestueuses et poignantes, avec l’ouverture Leonore n°3 op 72, tirée de Fidelio, œuvre lyrique du maître de Bonn. «Ouverture» transformée en authentique pièce de concert d’un musicien qui n’avait en fait rien d’un homme de théâtre, quoique dans ce domaine il ait suivi l’enseignement de Salieri. Glorifiant avec ferveur l’amour conjugal, pleine aussi de force, de mystère et de vitalité, cette ouverture (une des quatre écrites pour l’occasion !) exprime dans l’adagio du début la douleur de Florestan captif loin de sa femme Leonore, sous les ordres du gouverneur Pizzarre. L’allegro qui lui fait suite reprend quelques motifs des scènes de l’opéra : l’arrivée de Don Fernand (dont l’intervention providentielle sauvera notre héros de la mort!) par les trompettes et la joie de Florestan retrouvant Léonore dans le cachot, éclate dans un exubérant finale en ut majeur. Atmosphère emportée, volcanique et au lyrisme échevelé avec Peter Illich Tchaïkovski. Pour de nombreux mélomanes, le plus cosmopolite des compositeurs russes est avant tout le musicien du Lac des cygnes, de Casse-noisette ou de La belle au bois dormant. Ici on le retrouve avec le premier et le plus périlleux de ses trois concerti pour piano et orchestre, favori du public, car l’un des plus joués et applaudi au monde. Pour mener à bon port toute la fiévreuse inspiration et les fougueuses tirades d’une narration impétueuse aux accents souvent déchirants, lâchée parfois à brides abattues, pour emboîter le pas à ces accords tourmentés et nerveux, pour garder vivante l’éloquence brusquée de ces chromatismes à la vélocité de vent, pour un clavier déchaîné et explosif, plus présent et puissant que les déferlements d’un orchestre particulièrement véhément et dramatique, il fallait les doigts et la maîtrise du soliste Christophor Tainton (avec un profil «lisztien» de queue de cheval en bas de nuque et une délicate gourmette en cuir au-poignet gauche !) dont l’interprétation à la fois calme et exaltée, au dessus de tout éloge, a mis le feu aux poudres de cette partition éruptive, magnétique et sans nul doute d’une virtuosité à couper le souffle. Pour terminer, comme pour se soustraire à cette incendiaire et incandescente lame de fond tchaïkovskienne, la pensée et la présence, lumineuses, du plus doux et effacé des musiciens, Johannes Brahms. La seconde (en ré majeur) de ses quatre symphonies, surnommée parfois «la pastorale de Brahms» que nous écoutons dans ses quatre mouvements, avec l’aval bien entendu de Clara Schumann qui lui avait prédit, et à raison, un avenir radieux... Sans être particulièrement «paisible» ou totalement «rêveuse», cette œuvre surprenante à plus d’un niveau, riche dans ses rythmes et mélodies, aux ressources innombrables et aux alternances variées, a plus d’une couleur, plus d’une formulation, plus d’un motif, plus d’un parfum… L’esprit de variation y est souvent présent. Exaltation mesurée où le sentiment sylvestre ou pastoral, sans avoir l’apect idyllique ou dévorant de la phrase beethovénienne, ne manque toutefois ni d’ampleur ni d’éloquence sur fond d’une orchestration robuste, touffue et souvent musclée. On s’arrête volontiers sur le troisième mouvement, un allegretto grazioso qui présente une sorte de sérénade enjouée, chantée au-dessus des pizziccati des violoncelles par le hautbois, la clarinette et le basson et qui allie la légèreté un peu frivole et sensuelle d’une danse tzigane à la grâce un peu austère d’un menuet. Finale en apothéose du dernier «allegro con spirito» où tout culmine en une bouillante formulation mêlant cuivre et archets pour une vibrante note d’orgue. En bis, la sémillante et célébrissime «danse hongroise» n°5 de Brahms, suivie de deux airs czardas-tzigane, et pour clôturer, la voix ensoleillée et populaire de Bizet. Tonnerre d’applaudissements d’un public à la fois conquis, enthousiaste et médusé (mais, curieux paradoxe, qui n’a pas pour autant éteint ses «mobiles» résonnant comme de dérangeantes alarmes au milieu d’un trémolo et qui se manifestait bruyamment et inopinément par des ovations injustifiées quand on sait le respect qu’on doit aux artistes se recueillant entre deux mouvements !) pour une prestation alliant, dans un sage dosage, ampleur et virtuosité.
C’est sous le signe et les volutes de l’espoir et de la paix (un peu rêvée dans notre région embrasée!) que se situe d’emblée l’Orchestre philharmonique des Nations (dont le «la» remonte à 1995) placé sous la houlette de son fondateur et maestro Justus Frantz. Musiciens de tous crins, de tous âges (toutefois avec une nette propension pour une fringante et talentueuse...