Rechercher
Rechercher

Actualités - CHRONOLOGIES

THÉATRE - Le légendaire Living Theater en tournée au Liban - Des leçons de résistance

La troupe du légendaire Living Theater (fondée en 1947 à New York par Judith Malina et Julian Beck) a donné deux représentations au Madina de Résistance, une pièce dont on dira qu’elle est physique, tellement physique que les mots eux-mêmes se sont faits corps... Nous sommes en 1943. Au nord de l’Italie, un village solitaire près de Rochetta Ligure. Les habitants refusent d’abdiquer au régime nazi et aux fascistes mussoliniens. Après avoir résisté vaillamment, combattu à cor et à cri, ils se sont trouvés sous l’occupation. C’est alors que la résistance «underground» a commencé avec ses pamphlets, réunions secrètes et attentats. La guerre terminée, ils s’écrient tous ensemble, victorieux : «À présent, il n’y a plus d’ennemi». Judith Malina (dans le rôle d’une vendeuse de châtaignes narrant les évènements) rétorque alors : «Si, il existe toujours, mais pour le trouver, vous devez apprendre à anticiper l’avenir». Judith Malina, qui a repris la direction du Living Theater depuis la mort de Julian Beck en 1985, se trouve avec 11 membres de sa troupe au Liban. Après avoir donné des représentations au Madina, le Living Theater se dirige vers le Nord. Ils donnent à voir Résistance, ce soir, à Tripoli, Tour du Lion, 19h (voir encadré). Le Living Theater, fidèle à sa tradition, se propose comme un lieu de lutte contre toutes les injustices, un lieu de solidarité, de résistance, un lieu aussi d’innovations démocratiques et d’expérimentations. Résistance en est une illustration. Cette pièce accorde le premier rôle à la population elle-même, dans sa totalité et sa diversité. Le corps-à-corps des acteurs se place en avant de la scène. Les spectateurs ont été invités à prendre place sur des chaises entourant la scène. Au milieu de la pièce, une bonne dizaine se sont retrouvés entre les acteurs. Car le Living Theater prône l’abolition des frontières entre les spectateurs et les acteurs. Pour eux, le théâtre est une aventure de l’esprit. Il peut intéresser tout le monde à condition de déceler le bon chemin, d’ouvrir la bonne porte ; autrement dit, de découvrir le mot juste. Ils ne viennent pas animer un quartier de banlieue mais rencontrer des êtres humains qui, soudain, dans l’aventure qu’ils proposent, vont se voir différemment, s’entendront autrement. C’est par le verbe, par le mot, que l’on peut devenir maître de son destin. «Qu’est-ce-qui arrive maintenant ?», demande Judith Malina a la fin de la pièce. Et d’ajouter : «C’est à vous de le décider». Judith Malina se dit anarchiste, elle a fait du théâtre le champ de résistance à tous les renoncements. Malina est une physicienne du spectacle vivant. Depuis longtemps, elle a choisi des chemins de traverse, préférant travailler avec celles et ceux qui n’auraient qu’une vision lointaine de la scène. Pas plus «agit-prop» qu’animation «socioculturelle», elle lance des projets qui paraîtront démesurés. À les voir réalisés, on reste ébahi devant la capacité des acteurs à donner vie à des entreprises de l’esprit aussi audacieuses. Sur scène, les corps se font hommes, frères, amis, ennemis, maîtres, esclaves, ils se heurtent, s’agacent, s’étreignent l’un sur l’autre, suspendus dans le vide ils trouvent le réconfort dans l’inconfort. Pris au piège, ils sont condamnés à être là. Ils ont beau se démener, se tortiller, il n’y a rien à faire, ils attendent qu’on vienne peut-être les sortir de là. Il n’y a donc qu’à attendre, dans cet espace «… assez vaste pour permettre de chercher en vain, assez restreint pour que toute fuite soit vaine». La troupe mène là un travail d’exploration sur le mouvement, le langage du geste et sa théâtralité. Les acteurs se sont appuyés dans leur recherche sur la musicalité du mouvement où le jeu de l’interprète orchestre les émotions, les intentions et les états des personnages. Le mouvement n’illustre pas, mais suggère et accompagne le verbe du personnage, en lui donnant son pouvoir émotionnel. Au croisement de la danse et du théâtre, les partitions gestuelles transforment le geste quotidien en geste de fiction. Le Living Theater affiche ses missions, pêle-mêle : «s’interroger sur nos relations dans l’environnement du théâtre ; effacer la misère, mettre en marche les mécaniques du corps, impliquer les spectateurs dans l’action théâtrale ; aller du théâtre à la rue et de la rue au théâtre». Calendrier des représentations Au programme du 7 juin, en collaboration avec des étudiants de l’Université libanaise, Not in my name, une performance que la troupe donne habituellement le jour d’une exécution afin de protester contre la peine de mort. Au Liban, ils réagiront contre les horreurs du camp de Khiam. Lieu : jardin public de Tripoli, 17h. À la Rabita Saqafia de Tripoli, 19h, un concert de jazz avec Tex Allen, Jack Gregg, Arthur Satian, Steve Philips et Tom Horning. Le 8 juin : Mysteries, une pièce physique sans paroles. Beït el-Fan, 19h. Le 10 juin : Not in my name à la prison de Khiam, avec la participation de 100 acteurs libanais, 16h. Le 14 juin : Tour du Lion, Tripoli, 19h. The Ballad of Reading Gaol, un poème d’Oscar Wilde joué par The Living Theater et des acteurs libanais. Sur une musique de Toufic Kerbage, avec la participation de Tex Allen.
La troupe du légendaire Living Theater (fondée en 1947 à New York par Judith Malina et Julian Beck) a donné deux représentations au Madina de Résistance, une pièce dont on dira qu’elle est physique, tellement physique que les mots eux-mêmes se sont faits corps... Nous sommes en 1943. Au nord de l’Italie, un village solitaire près de Rochetta Ligure. Les habitants refusent...