Rechercher
Rechercher

Actualités - CHRONOLOGIES

CORRESPONDANCE - Gaufres précuites pour Benazir Bhutto et hamburger pour Hussein de Jordanie - La cuisine intime et washingtonienne des grands de ce monde

Des gaufres précuites et achetées au supermarché pour le petit déjeuner de Benazir Bhutto (en souvenir de ses années universitaires à Harvard), des hamburgers pour Hussein de Jordanie (il en raffolait), un sandwich grillé au fromage pour Husni Moubarak (en guise de snack pour fin de soirée)… Les grands de ce monde avaient de telles envies gastronomiques lorsqu’ils se trouvaient en visite officielle à Washington. C’est ce que raconte Russell Cronkhite qui a présidé aux fourneaux de Blair House (la résidence des invités du chef d’État américain, sise face à la Maison-Blanche) de 1988 à 1999. Onze ans de cuisine intime et officielle qui feront l’objet d’un ouvrage de souvenirs et de recettes. C’est toute une affaire que de nourrir ces hôtes très spéciaux, venus de surcroît des quatre coins du globe. D’abord, il faut mettre la cuisine américaine à l’honneur en respectant des palais qui ne lui sont pas toujours familiers. Alors, au maître-queux de réussir le dosage. Cronkhite explique comment il s’y prend : «Quand, par exemple, nous recevons une délégation de l’Afrique de l’Ouest, nous regardons vers les spécialités de la Louisiane, de la Virginie et des deux États de la Caroline. Pour les invités de l’Europe de l’Est, nous nous inspirons du goût de la Nouvelle-Angleterre (gibier, champignons sauvages, fraises des bois, desserts riches et onctueux). Pour ceux venant d’Asie, on sert du bœuf saignant, des poissons hawaïens ou du crabe et tout genre de salades vertes». Il y a aussi à prévoir les viandes «halal» et les produits kascher pour les visiteurs du Moyen-Orient. Détail qui a son importance, tout ce qui doit se dérouler à Blair House passe d’abord par le bureau de protocole du département d’État : de la liste des invités au menu, en passant par tous les aspects du fonctionnement d’une telle maison de convives pour marque. Mais même dans ces lieux les mieux huilés, les choses peuvent ne pas toujours aller comme sur des roulettes. Juste après la rénovation de Blair House, en novembre 1989, un déjeuner donné en l’honneur de la présidente des Philippines, Corazone Aquino, a été agrémenté d’un jeu d’eau non prévu au programme : une faille dans les tuyauteries qu’a bien comprise Mme Aquino qui a gentiment confié qu’elle connaissait ce genre de pépins pour les avoir souvent expérimentés chez elle. Iguane fumé et viande d’éléphant Une autre fois, il y a eu un réel branle-bas de combat. En juin 1989, les instructions avaient bien clarifié que le président zaïrois Mobutu mangeait du veau et non du bœuf. Tout fut arrangé en conséquence. Lorsqu’on lui offrit la viande supposée de son choix, il la refusa et demanda un steak de bœuf ! Il avait fallu faire attendre tout le monde pour lui donner satisfaction. Les repas officiels sont planifiés longtemps à l’avance. Seulement, certains événements mondiaux peuvent aboutir à l’arrivée inopinée de dignitaires de différents pays. Dans les mémoires qu’il a rédigés, ce cordon-bleu de Blair House quitte parfois ses fourneaux pour entretenir les lecteurs des us et coutumes des invités qu’il a eu l’occasion de découvrir. Souvent, explique-t-il, les délégations étrangères débarquent avec leurs provisions locales. Il a vu passer de la viande de chèvre, de l’iguane fumé, toutes sortes de gibiers, du poisson cru, des fruits exotiques et même de la viande d’éléphant. Autre constatation : les dirigeants des pays démocrates font confiance à ceux qui les reçoivent, alors que ceux qui ont pris le pouvoir par la force ont besoin de contrôler les plus petites choses de leur existence. La tradition de Blair House veut que tout le personnel se réunisse dans l’un des salons pour faire ses adieux aux invités, alors que ces derniers signent le livre d’or. Russell Cronkhite, qui a eu l’occasion de rencontrer beaucoup de grands de ce monde, a été fortement impressionné par la reine Elizabeth d’Angleterre qui, lors de sa visite à Washington en mai 1991, lui avait accordé une audience privée.
Des gaufres précuites et achetées au supermarché pour le petit déjeuner de Benazir Bhutto (en souvenir de ses années universitaires à Harvard), des hamburgers pour Hussein de Jordanie (il en raffolait), un sandwich grillé au fromage pour Husni Moubarak (en guise de snack pour fin de soirée)… Les grands de ce monde avaient de telles envies gastronomiques lorsqu’ils se...