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Actualités - CONFERENCES ET SEMINAIRES

TROUBLES MENTAUX - Colloque du 1er au 3 juin à la clinique Rizk - Non à la dépendance patient-psy

Pour son 75e anniversaire, qui coïncide avec l’ouverture d’un service de psychiatrie, la clinique Rizk organise un colloque majeur, qui réunira les 1er, 2 et 3 juin des professionnels locaux et des psychanalystes freudiens ou freudolacaniens éminents, comme Joyce McDougall, Élisabeth Roudinesco, Daniel Wildôcher, Patrick Guyomard ou encore le pédiatre Aldo Naouri, formé à la psychanalyse. Le but est de traiter d’une «éthique commune», pour lutter contre les dérives de l’idéologie scientiste (le scientisme) et le développement anarchique de toutes sortes de psychothérapies (on en compte un millier aujourd’hui). Organisateur du colloque, le Dr Chawki Azoury indique que la présence des psychanalystes et psychiatres de renommée internationale, particulièrement celle de Widlôcher, président de la Société psychanalytique internationale et «représentant de la légitimité freudienne» est un «soutien» à la Société libanaise de psychanalyse (SLP), fondée en 1980. «C’est la seule société de psychanalyse dans le monde arabe habilitée à former des psychanalystes et à garantir leurs pratiques auprès du public», dit le Dr. Azoury. «Il n’y a pas de diplôme comme en médecine pour être psychanalyste. Aussi, depuis de la création de la première internationale psychanalytique, en 1910, des associations sont fondées pour former les analystes et les accréditer auprès du public. Un psychanalyste a besoin, pour officier, d’être habilité par une association», ajoute-t-il. La dépression, au 4e rang des maladies Abordant le thème principal du colloque, le Dr Chawki Azoury souligne l’importance d’une «éthique commune» pour lutter contre les dangers du scientisme. Il dit en substance que l’idéologie scientiste ou «scientisme» est l’effet malheureux du développement vertigineux des progrès de la médecine. À un moment où le génie génétique, les neurosciences ou la bioformatique montrent des perspectives riches en espoir pour le traitement de maladies graves, ou jusque-là incurables, le scientisme ne voit dans le sujet qu’un gène ou un neurone. Les partisans du «tout génétique» réduisent n’importe quel comportement, n’importe quelle pathologie, à une raison génétique : l’homosexualité, l’alcoolisme, le comportement suicidaire, la violence etc. Le patient n’est plus appréhendé comme un individu, qui a une histoire, une famille, un contexte culturel. L’idéologie du «tout génétique» déresponsabilise complètement la société. On ne recherche plus la cause de la violence dans le social, puisque la violence, serait inscrite dans les gènes. De même, l’être en tant que tel se déchargerait de sa responsabilité en disant : «Ce n’est pas moi ; ce sont mes gènes». L’idéologie déviante ne prend donc en compte que le neurone. En psychiatrie, cela conduit à l’équation suivante : «Pour tout trouble, un médicament psychotrope». D’autant plus que l’outil que la psychiatrie américaine a imposé au monde entier est le DSM (Manuel diagnostic et statistique des troubles mentaux). Qui en est à sa quatrième version (DSM4). En 1980, le DSM3 signalait 106 troubles. Aujourd’hui, dans le DSM4, on en recense 300. Les études critiques américaines faites sur le DSM montrent (parallèlement à l’augmentation des troubles) une augmentation des produits pharmaceutiques. La psychiatrie européenne, notamment française, résiste aujourd’hui à l’invasion de la forme de psychiatrie américaine dont les soins sont axés exclusivement sur la pharmacologie. En effet, «c’est en France», rappelle le Dr Azoury, «qu’ est née la psychiatrie relationnelle qui tient compte, non seulement de l’effet des médicaments, mais aussi et surtout de la relation médecin-malade. Relation essentielle pour toute discipline et branche de la médecine, et plus particulièrement en psychiatrie», insiste le Dr Azoury. Il cite les auteurs d’un ouvrage critique sur le DSM, Kirk et Kutchins. Ces deux sociologues historiens américains qui ont écrit Aimez vous le DSM ? disent qu’«il y a une volonté délibérée d’identifier de nouveaux troubles, pour permettre la commercialisation de nouveaux produits pharmaceutiques». Surtout les anti dépresseurs, qui sont les produits les plus commercialisés et les plus vendus. «C’est une mine d’or pour les laboratoires pharmaceutiques», signale le Dr. Azoury. Un constat : «La dépression épidémiologique est au quatrième rang des maladies mondiales ; en 2014, elle sera la première», ajoute-t-il. Voilà en bref à quoi conduit le scientisme. Un service psychanalytique La prolifération de toutes sortes de psychothérapies est le second danger qui menace les malades. Cette prolifération est due à «l’instrumentalisation de la médecine». Les patients en mal d’écoute se tournent vers n’importe quelle oreille qui veut bien les écouter. On assiste alors au développement sans frein de méthodes nouvelles. «En quelques années, leur nombre est passé de 500 à 1 000. Chaque psychothérapeute invente un système qui lui est propre. Par exemple, aux États-Unis, il existe depuis quelques années une psychothérapie par la philosophie. Ces soi-disant psychothérapeutes sont convaincus qu’en faisant lire un texte de Platon ou de Kant à un patient, ils peuvent guérir son symptôme. Quand cela fonctionne, ce n’est pas grâce au texte philosophique lui-même, mais grâce au transfert. Le patient croit en son psychothérapeute. La sujétion marche à fond». «Or, on sait depuis la découverte de la psychanalyse que ce n’est pas tant la méthode qui compte (quel que soit son objet), que la relation transférentielle au psychothérapeute. La relation soignant-soigné. Et c’est là le but de notre colloque», insiste le Dr Azoury. Et d’ajouter que «depuis cent ans, la psychanalyse nous a appris qu’il est important de guérir un patient de son symptôme mais il est aussi, et surtout, important de le libérer de la dépendance qui s’instaure entre lui et le psychanalyste. Sinon, il développera d’autres symptômes. C’est pour cette raison que Freud a renoncé à l’hypnose et à la suggestion. Il s’est rendu compte que les patients traités sous hypnose développaient une relation de dépendance à son égard à tel point qu’ils ne pouvaient plus se passer du psychanaliste. Ils revenaient le voir avec d’autres symptômes… Freud a abandonné l’hypnose et la suggestion pour une nouvelle méthode : la psychanalyse. Elle s’appuie sur la guérison des symptômes mais aussi sur l’analyse du transfert. Et c’est cela qui distingue la psychanalyse de n’importe quel autre type de psychothérapie. Voilà en quoi l’éthique de la psychanalyse permet à la médecine et à la psychiatrie de s’interroger sur la relation médecin- malade». Et de rendre les patients indépendants de leurs soignants. Parallèllement à ce colloque, la clinique Rizk compte annoncer l’ouverture d’un département de psychiatrie. «Ce service sera le premier au Moyen-Orient à fonctionner avec la psychanalyse comme référence. Notre principal souci sera le respect du sujet et de sa souffrance. Nous serons à son écoute avant tout traitement, sans exclure bien entendu tous les avantages de la psychopharmacologie», indique le Dr Chawki Azoury. Le travail d’équipe sera privilégié à l’instar de ce qui s’est développé en France, depuis les années 60, sous le nom de «psychothérapie institutionnelle». Cela veut dire que le personnel soignant est tout aussi important que les médecins dans les soins et l’écoute à prodiguer aux patients. Ce service aura comme particularité de fonctionner dans un hôpital général. Ce qui est aujourd’hui la tendance dans la plupart des pays occidentaux où l’on ferme les asiles dans lesquels les patients sont isolés, pour favoriser la réinsertion dans la cité. Les intervenants Les conférenciers par ordre alphabétique : – Le père Sélim Abou, recteur de l’USJ – Chawki Azoury, psychiatre, psychanalyste et membre actif de la Société libanaise de psychanalystes, de la Société de psychanalyse freudienne, et chef du département de psychiatrie de la clinique Rizk. – Édouard Azoury, professeur titulaire de la chaire de médecine psychosomatique et de psychologie médicale à l’USJ – Alain-Didier Weill, psychiatre, psychanalyste et cofondateur du Mouvement du coût freudien – Dominique Guyomard, psychanalyste, vice-président de la Société de psychanalyse de France – Adnan Houballah, neuropsychiatre, psychanalyste, cofondateur de la Société libanaise de psychanalyse . – Joyce McDougall, membre titulaire de la Société psychanalytique de Paris, membre titulaire de l’Association psychanalytique internationale et membre de la Société freudienne de New York – Aldo Naouri, pédiatre formé à la psychanalyse – Élisabeth Roudinesco, historienne, psychanaliste, directeur de recherche au département d’histoire de l’Université de Paris 7, vice-présidente de la Société internationale d’histoire de la psychiatrie et de la psychanalyse. Collaboratrice au journal Le Monde – Daniel Widlôcher, professeur au centre hospitalier de la Salpêtrière Paris ; professeur émérite à l’université Pierre et Marie Curie ; président de l’Association psychanalytique internationale.
Pour son 75e anniversaire, qui coïncide avec l’ouverture d’un service de psychiatrie, la clinique Rizk organise un colloque majeur, qui réunira les 1er, 2 et 3 juin des professionnels locaux et des psychanalystes freudiens ou freudolacaniens éminents, comme Joyce McDougall, Élisabeth Roudinesco, Daniel Wildôcher, Patrick Guyomard ou encore le pédiatre Aldo Naouri, formé à...