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Actualités - CHRONOLOGIES

DRAME - Le pilote, Stéphan Nicolian, souffrait de troubles psychologiques, selon Murr - La chasse israélienne abat un Cessna venu du Liban

Hier à 10h45, Stéphan Ohannès Nicolian, 43 ans, devait suivre une banale leçon de pilotage avec son moniteur, à l’école de pilotage JT Executive, à l’Aéroport international de Beyrouth (AIB). Mais le moniteur n’a pas le temps de gagner l’appareil que l’élève décolle à bord du Cessna appartenant au club, pour des raisons qui demeurent inconnues, le laissant sur la piste. Il se dirige vers le Sud, direction clairement interdite aux pilotes amateurs libanais. L’avion de Nicolian survole la frontière à 11h17 et il disparaît des radars, selon des informations divulguées par le ministre des Travaux publics Nagib Mikati. L’avion est abattu au-dessus de Haïfa peu après. Que s’est-il passé entre-temps ? Les officiels libanais déclarent que l’avion a été intercepté au-dessus de Sarafand (Liban-Sud) par deux chasseurs israéliens qui l’ont obligé à se rendre au-dessus du territoire israélien avant de l’abattre au-dessus de Haïfa, alors qu’il ne constituait aucun danger sur personne. Les Israéliens affirment avoir descendu l’appareil «au-dessus du territoire israélien, ayant eu peur d’un attentat suicide». Quoi qu’il en soit, un épais mystère plane toujours sur cette affaire. Pourquoi le malheureux pilote s’est-il retrouvé dans cette situation ? Qu’est-ce qui l’a poussé à un acte aussi désespéré ? Le ministre de l’Intérieur, M. Élias Murr, parle de «troubles psychologiques» dont souffrait le défunt. Des témoins dans un complexe balnéaire où a résidé Nicolian près d’un an avec son frère confirment cette explication. Mais cela suffit-il à justifier le comportement insolite de ce pilote amateur, dont la disparition a coïncidé avec le premier anniversaire de la libération du Liban-Sud et de la Békaa de l’occupation israélienne ? Nous avons interrogé Neema Malek, responsable des relations publiques à JT Executive, sur les circonstances qui ont précédé le départ inopiné du pilote. «Il était monté à bord de l’avion et attendait en principe le moniteur pour commencer la leçon», raconte-t-il. «Or, il a surpris son instructeur et tout le monde en décollant seul. Il ne possédait pas encore son brevet et ne pouvait par conséquent pas piloter l’avion sans surveillance». Nicolian était inscrit depuis 1999 au JT Executive, un club privé situé à l’AIB, mais sa formation au Liban était discontinue, et il n’avait suivi qu’un nombre limité de cours au club. Donnait-il l’impression d’être téméraire ? «Non, au contraire. Et il ne parlait jamais à personne», affirme M. Malek. La victime avait-elle connaissance de l’interdiction de voler vers le sud ? «Bien sûr, c’est interdit», répond M. Malek. Qu’est-ce qui peut, à son avis, avoir poussé le pilote amateur à agir comme il l’a fait ? «Je ne peux rien vous dire», affirme M. Malek. «C’est la première fois que nous sommes confrontés à de tels événements». Il déclare ne rien connaître du jeune homme et de sa famille, à part le fait qu’il est célibataire. Croit-il à une simple erreur qui aurait conduit le pilote inexpérimenté en territoire ennemi ? «Sa principale erreur c’est de n’avoir pas attendu son moniteur pour décoller», répète-t-il. Il faut préciser qu’il est permis aux aviateurs de survoler le Liban uniquement jusqu’à Damour, au sud de Beyrouth, ainsi que jusqu’aux régions du Nord de la capitale. «Mais Nicolian n’a jamais coordonné avec la tour de contrôle», précise M. Malek. «Il était supposé connaître les règles, mais il a juste décollé, comme cela, ne faisant même pas fonctionner la radio». Il assure que le club a alerté les forces de sécurité dès 11 heures, au moment de la «fugue» de Nicolian. «Nous avons appris sa mort par les médias», dit-il. Un comportement « bizarre » Nicolian avait résidé durant un an environ dans un chalet, à l’intérieur d’un complexe balnéaire au nord de Beyrouth. Des témoins résidant dans ce complexe, qui ont requis l’anonymat, racontent à L’Orient-Le Jour que «Nicolian avait des comportements bizarres, il ne se mêlait jamais à personne, et son frère et lui ne recevaient jamais de visites». Ces témoins n’ont jamais vu les parents des deux frères. «Ils ont quitté le chalet à l’issue de la saison d’hiver», poursuivent-ils. Cette thèse de «problèmes psychologiques» qui auraient poussé le pilote à agir de la sorte semble avoir été confirmée par le ministre Murr qui a tenu une conférence de presse à l’AIB à 14h, après une réunion avec le chef de sécurité à l’aéroport, le général Wafic Choucair, ainsi qu’avec le commissaire du gouvernement près le tribunal militaire, le juge Nasri Lahoud, qui a été chargé de l’enquête. M. Murr a déclaré que «de nouveaux éléments de l’enquête s’ajoutent tour à tour à ce que nous savons déjà, d’où la difficulté de tirer des conclusions pour le moment, vu que le pilote a résidé hors du Liban et s’est entraîné au pilotage à Chypre». M. Murr a précisé que «le pilote n’a pris que cinq ou six leçons au Liban, alors que les circonstances de son séjour hors du pays et ses contacts demeurent des points d’interrogation» et que «le tribunal militaire est chargé d’établir les contacts à l’étranger et de collecter les informations». Interrogé sur le timing du drame (à un an, presque jour pour jour, du retrait israélien du Liban-Sud et de la Békaa-Ouest) et sur une possible implication de la Résistance dans cette affaire, M. Murr a répondu : «Certainement pas. Toutes nos informations indiquent que, cette personne souffrait de problèmes psychologiques. Je ne veux pas anticiper les résultats de l’enquête, mais il se pourrait que, durant son séjour à l’étranger, il ait été approché par des services, israéliens ou autres, qui auraient pu le pousser à cet acte. Quant au timing, de grands points d’interrogation continuent de se poser. Mais les résultats officiels de l’enquête seront annoncés par le tribunal militaire». À la question de savoir si l’État appuyait de telles opérations dans le cadre de son soutien à la Résistance, il a précisé : «Il ne s’agit pas d’une opération militaire. Il ne faudrait pas donner de prétextes à Israël d’avoir des réactions violentes à l’égard du Liban». Il a insisté sur le fait que «les mesures prises à l’AIB sont assez strictes». Comment a-t-on permis à une personne souffrant de problèmes psychologiques d’effectuer un entraînement ? Qui assume la responsabilité de ces faits ? M. Murr a indiqué : «Il a été formé à Chypre durant environ 35 heures de vol dans un club privé. Il s’est ensuite inscrit au “JR Executive” pour compléter sa formation. Ses moniteurs ont remarqué qu’il souffrait de problèmes psychologiques mais non de troubles physiques, et c’est la raison pour laquelle ils l’avaient empêché de s’exercer ces derniers jours. Mais aujourd’hui (hier), ils ont considéré qu’il pouvait suivre une demi-heure de leçon avec son moniteur». Les premiers éléments de l’enquête judiciaire menée sous la direction de M. Nasri Lahoud n’a pas tardé à donner de premiers résultats. Il est ainsi apparu que «Stéphan Nicolian savait que l’avion contenait assez d’essence pour un aller-retour jusqu’à la frontière, soit une distance de 400 kilomètres pour une durée qui ne dépasse pas les trois heures». Il aurait inscrit sur son carnet de route, en anglais, qu’il ne comptait pas s’emparer de l’avion mais voulait juste le piloter seul. Par ailleurs, l’AFP cite l’instructeur chypriote de Nicolian, John Oratis, qui décrit ce dernier comme «un élève très difficile, qui ne respectait pas l’autorité». Un homme a été abattu par des armes israéliennes, dans des circonstances qui demeurent quelque peu mystérieuses, plongeant dans le désarroi l’opinion publique. Un début de lumière a commencé d’être jeté sur cette étrange affaire. Mais sans doute faudra-t-il attendre quelque temps encore avant que toute la lumière soit faite.
Hier à 10h45, Stéphan Ohannès Nicolian, 43 ans, devait suivre une banale leçon de pilotage avec son moniteur, à l’école de pilotage JT Executive, à l’Aéroport international de Beyrouth (AIB). Mais le moniteur n’a pas le temps de gagner l’appareil que l’élève décolle à bord du Cessna appartenant au club, pour des raisons qui demeurent inconnues, le laissant sur la...