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Actualités - OPINIONS

Courrier - Talk-Show

L’attente dans l’officine qui délivre les extraits des casiers judiciaires n’est pas nécessairement ennuyeuse. Si vous prenez la peine d’écouter les conversations des personnes qui s’y trouvent, le temps passe vite. Deux protagonistes, qui ne se connaissaient pas, animaient ce jour-là le débat. D’un côté, un docteur plutôt menu dans une parka taille «extra large», gardée béante et laissant voir, retenu dans la ceinture de pantalon, un porte-documents en plastique, de l’autre une maîtresse d’école, plutôt grande perche vêtue d’un imperméable garni de fourrure au col et aux manches. Elle était coiffée d’une ample casquette «Jules et Jim» qui ne découvrait de son visage que le nez et la bouche. La discussion, que l’on qualifierait plutôt de monologue en duo adressé à tous, a paru décousue un moment. Elle s’est fixée finalement sur l’indiscipline des gens, un sujet très populaire. Les autres figurants dans la salle intervenaient quand bon leur semblait. Se tenant à côté de la file d’attente, le petit médecin affirme : «Ne croyez pas pouvoir changer facilement les habitudes du commun des mortels. Il y a chez l’homme l’inné et l’acquis (postulat qu’il a redit en anglais), l’un se trouve dans les gènes, l’autre est modifié par l’entourage. Chez nous, les deux ne valent rien, ce qui fait qu’on est indiscipliné de père en fils». – «L’éducation est mal conçue dans notre pays, les enfants finissent par en savoir plus que leurs parents, malheureusement ils sont incapables de les éduquer à leur tour, il faudrait donc ouvrir des écoles pour les grands», annonce de son côté l’institutrice, les deux mains appuyées sur son parapluie. – Le docteur renchérit : «Le permis de conduire à points, comme en France, est très efficace, il s’annule automatiquement dès que vous avez équisé votre crédit d’infractions». – «Ça chez nous, ça ne marchera jamais», rétorque un homme d’âge mur. – «L’éducation est la base de la démocratie, on apprend à respecter les autres», déclare la maîtresse d’école sans attendre son tour. – «Ils parlent, c’est parce qu’ils ont de l’argent, les fauchés eux n’osent pas ouvrir la bouche», murmure un jeune homme avec dépit. Les extraits des casiers judiciaires sont enfin arrivés et immédiatement retirés par les intéressés. L’homme et la femme n’ont pas arrêté pour autant de débiter leurs théories. Malgré leurs divergences de vues, ils sont sortis ensemble. En vous remettant votre feuille verte, l’employé au guichet vous confie avec malice : «Ces deux-là nous ont fait passer un bon moment».
L’attente dans l’officine qui délivre les extraits des casiers judiciaires n’est pas nécessairement ennuyeuse. Si vous prenez la peine d’écouter les conversations des personnes qui s’y trouvent, le temps passe vite. Deux protagonistes, qui ne se connaissaient pas, animaient ce jour-là le débat. D’un côté, un docteur plutôt menu dans une parka taille «extra large»,...