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Actualités - OPINIONS

TRIBUNE - Nous avons la mémoire trop courte

Je me permets de donner un avis au sujet du voyage aux États-Unis et au Canada de S.B. le patriarche maronite, le cardinal Nasrallah Sfeir, en raison de la dimension nationale qu’a revêtue cette visite à caractère avant tout pastoral. Mon commentaire porte sur trois temps de cette tournée : la visite aux États-Unis, l’accueil à l’aéroport et enfin l’accueil à Bkerké. D’abord, j’ai été surpris par le refus des officiels américains de recevoir le patriarche durant son long séjour aux États-Unis, alors que durant son avant-dernière visite à Washington, il avait été reçu à la Maison-Blanche. Compte tenu du fait que le discours du patriarche sur la présence syrienne est d’une actualité brûlante, et qu’il était destiné à être entendu également par les dirigeants américains, peut-on considérer que la visite de Sa Béatitude fut un succès ? N’aurait-il pas été préférable de l’ajourner, tant que l’attitude américaine est ce qu’elle est ? Je me pose cette question en appui au message national du patriarche, car la présence syrienne ne peut être soulevée ou recevoir de solution que sous une forme nationale. J’ai été ensuite choqué par l’absence de personnalités politiques musulmanes à l’aéroport, à l’arrivée du patriarche. Là aussi, nous touchons à quelque chose de dangereux. Cela n’aurait pu se produire au temps de Riad el-Solh, de Saëb Salam ou de Kamel el-Assaad. Je rappelle que, lorsqu’à une certaine époque, des forces aujourd’hui au pouvoir, ont voulu isoler les Kataëb, Saëb Salam avait tenu à se rendre au Parlement et à se faire photographier au côté de Pierre Gemayel. C’était sa leçon. Enfin, j’ai été choqué une troisième fois quand, au cours de la cérémonie d’accueil à Bkerké, j’ai entendu la foule huer un président et en applaudir un autre… Pourtant, ce président applaudi n’était-il pas en partie responsable de l’éclipse de personnalités issues de l’école de Riad el-Solh, Saëb Salam et Kamel el-Assaad ? Pourquoi et qui a causé l’exil de Saëb Salam en Suisse pendant seize ans ? Pour quelles raisons et qui est derrière l’exil politique de Kamel el-Assaad ? Un congrès sur la mémoire de la guerre vient de se tenir à Beyrouth. Il y a été question d’une occultation d’une partie de notre passé qui prive les Libanais de la possibilité d’en tirer les leçons et ouvre la voie à sa répétition. Est-il demandé aux Libanais d’oublier ou de se souvenir ? Et dans le second cas, comment profiter des leçons de la guerre ? Nous avons appris du passé qu’une saine évolution vers l’indépendance ne se produira que si le discours sur la présence syrienne est national et non confessionnel .C’est dans cette direction et sur cette voie qu’il faut se diriger. Si le discours de 1943 n’avait pas été national, nous n’aurions pas eu l’indépendance, même si la présence syrienne au Liban, aujourd’hui, est différente de ce qu’était alors la présence française dans notre pays. Celui qui a défini le mieux la présence syrienne au Liban est Mohammed Hassanein Heykal, un homme respecté par le président Hafez el-Assad et par son fils Bachar el-Assad. Il serait édifiant de rapprocher le discours de Heykal de celui du patriarche. Voilà ce qu’il avait écrit : «Le Liban reconnaît que la Syrie l’a aidé à mettre fin à la guerre civile qui a failli emporter la nation. Cependant, les peuples ne peuvent pas vivre pour toujours avec le sentiment de gratitude (…) Le Liban a le sentiment d’être traité avec infériorité, en ce sens qu’il a perdu le pouvoir de décision. Cela a été accepté de contre-cœur durant une période donnée, mais avec le temps et la fin de la guerre civile, avec l’espoir de la reconstruction et avec la nostalgie d’un recouvrement de son rôle par le Liban, les relations avec la Syrie, qui sont des relations déterminantes, nécessitent une réorganisation qui les rendrait nécessaires entre deux pays, acceptées librement et d’un commun accord». Qui, au Liban, est au courant de ces propos tenus par Mohammed Hassanein Heykal, à l’issue d’une longue audience de huit heures que lui avait accordée le président Hafez el-Assad ? C’est ce discours national qui devrait prévaloir entre tous les Libanais. Qui pourrait croire que les musulmans ne veulent pas l’indépendance, la souveraineté et la dignité du Liban, même si les musulmans qui tiennent ce langage sont absents de la scène politiques pour des raisons connues ? En outre, aux côtés des musulmans et chrétiens qui tiennent ce type de discours doivent se tenir des forces arabes, qui existent et sont prêtes à les soutenir. Avant de réclamer un changement, c’est notre état d’âme qu’il faut changer. Le chemin est dur, mais c’est le seul chemin possible, si nous devons arriver au but.
Je me permets de donner un avis au sujet du voyage aux États-Unis et au Canada de S.B. le patriarche maronite, le cardinal Nasrallah Sfeir, en raison de la dimension nationale qu’a revêtue cette visite à caractère avant tout pastoral. Mon commentaire porte sur trois temps de cette tournée : la visite aux États-Unis, l’accueil à l’aéroport et enfin l’accueil à Bkerké. D’abord,...