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Actualités - INTERVIEWS

RENCONTRE - Jacques Charrette, Michel Grobon et Alain Lecossec - Trois toques de prestige pour le jury du Salon culinaire

Horeca 2001 a clôturé hier trois jours de grande affluence. Ce Salon de l’hôtellerie, de la restauration et du catering a concocté, entre autres activités et dégustations diverses, un Salon culinaire. Il s’agit en fait d’un concours (dont les résultats seront annoncés ce week-end) qui a réuni, côté fourneaux, plusieurs chefs des meilleurs établissements du Liban et, côté jury, trois toques françaises de prestige : MM. Jacques Charrette, président de l’Académie nationale de cuisine de France, Michel Gorbon, ex-directeur des cuisines Euro-Disney Resort et Alain Lecossec, meilleur ouvrier de France. «On juge avec notre âme et conscience», lance M. Charrette. On s’empresse de lui faire remarquer que les papilles et les mirettes sont également sollicitées. Le président de l’ANC, directeur de Toque d’or Magazine et membre de l’Académie culinaire de France opine du chef en riant. Il se déclare ravi d’être au Liban, de découvrir ce fabuleux mezzé et ce mélange d’épices. On apporte nos idées, mais on s’enrichit également. Dans chaque voyage, c’est pareil. Que pense-t-il de la «world cuisine» ? «J’ai fait une conférence au Mexique à ce sujet. Il ne faut pas vouloir tout mondialiser et tout niveler. On a chacun notre particularité, notre spécificité. Si on était fabriqué comme les automobiles, la vie ne serait pas marrante». Il enchaîne sur le développement de la cuisine française. «Il y a 40 ans, la cuisine française était certes de haute qualité mais plutôt riche en graisse, lourde, indigeste à la limite. À cette époque-là, les êtres humains étaient costauds, ils se dépensaient plus physiquement. Aujourd’hui, on travaille de moins en moins, surtout en France, ils sont toujours en grève… Il nous faut une nourriture équilibrée qui apporte beaucoup de vitamines, moins riche en calories. Maintenant la cuisine française est une cuisine dépouillée, qui respecte le goût du produit, on utilise de moins en moins de graisses, de sauces. On fait des cuissons justes, courtes». Dans cette tradition culinaire, déjà ancienne, on peut voir le symbole de l’esprit de corps très profond qui soude vos métiers. «Dans nos métiers, quelle que soit la qualité des formations, rien ne vaut l’apprentissage, l’expérience forgée auprès des chefs». Vous savez donc d’instinct que c’est à vous d’assurer la transmission des connaissances, de repérer les talents et de les distinguer, d’honorer aussi les maîtres. C’est ce que vous avez fait aujourd’hui. Cela témoigne de votre vitalité et augure bien de votre avenir. «L’Académie ne se limite pas à la cuisine, cette forme supérieure de civilisation», remarque le président de l’ANC. «Elle tend à marquer la solidarité de tous les métiers de bouche. On a beaucoup disserté sur la cuisine française et ses mérites, mettant en avant l’originalité des créateurs, la richesse des emprunts, le mérite des terroirs, le mélange des saveurs. Aujourd’hui, une évidence s’impose : une bonne cuisine c’est d’abord le respect des saveurs authentiques, des produits et donc des produits de qualité. À ce titre, la cuisine n’est que la partie émergée, le vaisseau amiral de toute l’agriculture française. À l’heure où des inquiétudes se manifestent pour notre agriculture, sachons prendre conscience que son avenir passe par une marche en avant ininterrompue vers la qualité. Le développement considérable des appellations contrôlées dans tous les domaines et leur succès témoignent bien de l’exigence croissante des consommateurs et de la capacité de nos exploitants à trouver des débouchés à forte valeur ajoutée. En formant le goût, la cuisine ouvre les débouchés d’une agriculture de qualité à forte valeur ajoutée». Revenons au concours du Salon culinaire. Les membres du jury se déclarent «agréablement surpris par les plats concoctés. Les desserts en plat, c’était du top niveau». Les candidats représentent tous les métiers de bouche. Au cours du Salon, ils ont réalisé des plats en direct. «Ils partent tous sur la même base, le même panier contenant des matières premières». Et on y va au charbon. En deux heures de temps, suivant leur créativité, leur dextérité, leur connaissance du métier, on a vu différents plats sortir. Les critères ? «Organisation, propreté, hygiène, dégustation, et bien sûr, présentation». «Suivant le niveau, on décide des médailles à distribuer, note Michel Gorbon. Et d’ajouter : » À la fin du concours, on fait un debriefing avec les candidats. Ils sont curieux, veulent savoir comment améliorer leur niveau». «Nous sommes le seul pays au monde qui a codifié la cuisine.Le monde entier utilise ces bases. Nous avons eu la chance d’avoir des ancêtres comme Escoffier qui ont établi les bases du métier : les grandes sauces, les rôtis, les braisés, les sautés… C’est comme le solfège pour la musique. C’est ce qui a fait la renommée de la cuisine française». Alain Lecossec, meilleur ouvrier de France, professeur à l’École des arts culinaires et de l’hôtellerie de Lyon déclare pour sa part que «le goût c’est aussi une question d’éducation». «Mais même sans goûter, on sait si le plat est bon ou pas. À l’aspect, à l’odeur». Comment devient-on meilleur ouvrier de France ? « D’abord, il faut bien connaître son métier, ensuite il faut faire preuve de curiosité». Poussé par l’envie de se dépasser, il s’est s’inscrit au concours. Il y avait 400 concurrents. «Cela se déroule tous les trois ou quatre ans. Il faut passer les sélections régionales. Dix lauréats atteignent la finale nationale. Cette dernière reprend un thème de trois plats». «Le jour du concours, il est important d’avoir une bonne maîtrise de soi. Techniquement il faut être bon, mais on doit également subir le stress. Tout le monde n’est pas capable de faire cela», conclut le meilleur ouvrier de France. L’Académie nationale de cuisine Jacques Charrette est président de l’Académie depuis 9 ans, 3 mandats. L’Académie s’attache à promouvoir et vulgariser la cuisine française et les produits du terroir. Elle vient en aide aux jeunes dans le cadre de la formation. Elle met en avant des hommes et des femmes compétents. «Nous participons à tous les grands concours nationaux et internationaux et aux Salons gastronomiques, souligne M. Charrette. Ce n’est que du bénévolat. L’Etat ne nous octroie aucune subvention. Et je n’en veux pas». Côté concours, l’Académie en organise deux tous les ans. La Toque d’or est ouvert aux professionnels chevronnés. Le second concours est réservé aux jeunes élèves de deuxième année des lycées hôteliers il s’agit du Trophée Avenir- Raymond Vaudar. L’Académie décerne aux restaurants, après dégustation clandestine, un panneau de «tradition et qualité du terroir». Il y en a 133 en France.
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