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Actualités - CHRONOLOGIES

PARLEMENT - Six textes de loi ont été votés hier dont le projet de fusion des Conseils - Approbation du nouveau code de procédure pénale

Pour la deuxième journée consécutive, la séance est levée, faute de quorum, place de l’Étoile, où la Chambre a quand même eu le temps d’approuver, enfin, les amendements du code de procédure pénale. Si l’on dit enfin, c’est parce que ce texte, élaboré par une commission mixte formée de juristes de renom et de députés, revu par l’Exécutif, examiné et réexaminé en commissions parlementaires puis de nouveau par le gouvernement, a traîné cinq ans entre la place de l’Étoile, le Sérail et le Palais de justice avant d’atterrir à l’ordre du jour d’une réunion plénière. Son importance réside dans le fait qu’avec ses 431 articles, il pose des critères précis pour chaque étape du mécanisme déclenché à partir du moment où la justice est saisie d’une affaire tombant sous le coup du code pénal. Le nouveau code définit une série de règles en rapport, entre autres, avec la mise en garde à vue, les prérogatives de la police judiciaire et les droits des personnes arrêtées. Toutes convergent vers un même but, celui de garantir le respect des droits de l’homme, notamment des personnes mises en examen, et d’éviter les nombreux abus dont s’étaient plaints au cours des dernières années un nombre incroyable de suspects et de prévenus, principalement durant les enquêtes préliminaires. Ils avaient presque tous ceci en commun : arrivés devant le tribunal, ils faisaient état, à tort ou à raison, d’aveux extorqués sous la torture, de traitements inhumains. Des accusations qu’il n’était pas possible de vérifier, auxquelles il avait été fait écho dans les milieux politiques et parlementaires et qui ont surtout mis en relief des lacunes au niveau du code de procédure pénale. Des lacunes que le Parlement s’est fait un point d’honneur de combler en se fondant sur le principe, affermi par la commission de l’Administration et de la Justice, selon lequel chaque personne est innocente jusqu’à preuve du contraire. On retiendra principalement une clause du nouveau texte, celle qui doit normalement barrer la route devant les abus au stade de l’enquête préliminaire. À la suite d’un crime, «le procureur (ou l’avocat) général peut ordonner l’interpellation d’une personne sur qui de lourds soupçons pèsent. Il l’interroge en sa qualité de suspect et la maintient en état d’arrestation pour les besoins de l’enquête, pour une durée ne dépassant pas les 24 heures, à moins qu’il ne juge que l’enquête commande l’extension de ce délai. À ce moment-là, il ordonne le prolongement de sa détention pour le même délai. Le suspect peut réclamer la présence de son avocat au cours de son interrogatoire. Durant cette période de détention, il peut demander à être examiné par un médecin. Cette initiative peut être prise par son avocat ou par un des membres de sa famille. Le procureur (ou l’avocat général) doit nommer un médecin dès que la demande lui est soumise. Ce dernier se doit d’effectuer son examen sans qu’un officier de la police judiciaire ou un de ses adjoints n’y assiste. Il présentera son rapport à celui qui l’a chargé de cette mission et en remettra une copie au suspect dans un délai ne dépassant pas les 24 heures». La présence d’un avocat est d’une importance capitale. On ne le dira pas assez. La fusion des Conseils Place à l’économique ensuite, puisque la Chambre a approuvé le projet de fusion du CDR, du CEGPVB et du CEGP, au terme d’un débat qui a surtout laissé transparaître la parfaite entente Berry-Hariri sur la promulgation du texte de loi sans amendements majeurs, en même temps qu’une appréhension parlementaire à accorder des pouvoirs exceptionnels au gouvernement. C’est d’ailleurs par le projet de fusion que la Chambre a commencé hier. Soucieux d’en finir avec ce texte qui avait suscité un long débat la veille, le chef du Parlement Nabih Berry le soumet directement au vote. C’est compter sans la vigilance de Hussein Husseini qui bondit et réclame son renvoi à la commission des Finances reprenant son argumentation de la veille : «Il implique des charges financières». «À moins bien sûr que la présidence ne tienne à faire passer le texte. Tant pis alors», renchérit-il d’une voix doucereuse. Mais M. Berry fait semblant de ne pas avoir entendu la remarque : «Nous ne sommes pas en train de créer un nouveau CDR pour craindre des charges supplémentaires». Un bras de fer semble être engagé entre les deux hommes : «Je veux savoir quelle autorité est habilitée à renvoyer les textes en commission», reprend M. Husseini. «C’est la présidence de la Chambre», rétorque le chef du Parlement. C’est Mikhaël Daher qui intervient pour suggérer que la proposition de M. Husseini soit soumise au vote. Mais ce dernier la retire sachant fort bien qu’elle ne passera pas. Les blocs de MM. Berry et Hariri et leurs alliés sont les plus importants numériquement à la Chambre et ils feront pratiquement obstacle à toutes les propositions d’amendements avancés. Approuvé par M. Husseini, Nicolas Fattouche met en garde contre l’octroi de pouvoirs exceptionnels à l’Exécutif en faisant référence à l’article autorisant le gouvernement par le biais de décrets d’application à «agir à sa guise». Il estime aussi que le CDR empiète sur les prérogatives des ministères qui se concentrent ainsi au sein d’un seul organisme. Ali el-Khalil propose que les décrets d’application soient transmis au Parlement sous forme de projets de loi. Son idée ne sera pas évidemment pas retenue. Puis c’est le vice-président de la Chambre qui répond au sujet des pouvoirs exceptionnels en commençant par rappeler que les précédents gouvernements Hariri les réclamaient. Rafic Hariri tente de protester, mais M. Berry l’interrompt : «Mais écoute ce qu’il dit, il te défend». Et le vice-président de la Chambre de poursuivre en estimant en substance que le gouvernement se doit d’assumer la responsabilité de tout ce qui est financier. Mais M. Berry n’est pas de cet avis. «C’est une responsabilité partagée». Le débat se prolonge et l’article contesté ne sera soumis au vote que lorsque M. Hariri s’engage à promulguer dans un délai de trois mois les décrets d’application du projet de fusion. «Mais pas à travers des projets de loi», insiste le chef du gouvernement. M. Husseini demande que son opposition au texte soit consignée dans le procès-verbal de la séance. Le gouvernement s’engage aussi à faire le nécessaire pour que les organes de planification et d’exécution soient dissociés au sein du CDR. Un autre amendement est également introduit à l’article autorisant le gouvernement à «mettre fin, quand il le souhaite, aux services du conseil d’administration du CDR ou de certains de ses membres par décret pris en Conseil des ministres sur proposition du chef du gouvernement». Les députés, qui voient dans ce texte une épée de Damoclès brandie au-dessus des têtes des membres du conseil d’administration du CDR, parviennent à y ajouter cette phrase : «À condition que les indemnités de fin de service soient fixées dans le contrat conclu avec chaque membre du conseil». Quand M. Berry annonce l’examen des amendements du code de procédure pénale, des «ah» fusent dans l’hémicycle. Anouar el-Khalil propose le vote du texte en tant qu’article unique, mais M. Berry fait remarquer que des précisions doivent être introduites à certains articles du texte. «D’accord, mais qu’on l’approuve ensuite en tant qu’article unique», enchaîne M. Husseini. Le texte est en effet volumineux. Il comprend 431 articles (dont deux seront abrogés) situés dans 118 pages. Les précisions sont proposées aussi bien par le parquet que par le président de la Chambre, avocat de profession. Elles portent sur 18 articles, mais ne touchent pas aux questions de fond qui font l’unanimité parlementaire. Elles sont énumérées une à une par M. Berry et certaines provoquent un débat animé qui se limite toutefois au président de la Chambre, à Walid Eido, juge de profession, Nicolas Fattouche, Robert Ghanem et Mikhaël Daher, tous trois avocats et accessoirement Antoine Ghanem, Georges Najm et Hussein Husseini. L’article 14 stipulant que le «ministre de la Justice peut donner des instructions écrites au procureur général près la Cour de cassation» est jugé «aberrant» dans la mesure où il est considéré comme étant en contradiction avec le principe de la séparation des pouvoirs. Il est remplacé par l’ancien texte : «Le ministre de la Justice peut demander au procureur d’engager des poursuites judiciaires», mais au terme de vifs échanges. Pour expliquer son point de vue, Walid Eido insiste, s’agite, gesticule, revient à la charge, hurle presque, la bouche collée au micro, au point que M. Berry lance l’air plutôt étonné et un brin amusé : «Si j’avais su que tu allais être comme je te vois, je t’aurais laissé à la magistrature». Il répètera cette phrase un peu plus tard. «Je n’ai pas entendu», réplique l’ancien juge. «Moi non plus», répond M. Berry penaud, comme s’il venait de se rendre compte qu’il risquait de froisser son interlocuteur. Les députés avocats sont partagés sur l’opportunité de l’article stipulant que les avis de recherche sont annulés d’office dix jours après leur émission, sauf en cas de crime. Le terme litigieux est ce «d’office» que certains veulent supprimer. Il sera maintenu mais on ajoutera cette phrase à l’article : «À moins que le procureur général ne décide d’en proroger le délai». C’est dire que les précisions souhaitées par M. Berry ne font pas toujours l’unanimité. Mais la proposition de loi est quand même examinée dans une ambiance qui traduit le désir de la Chambre de promulguer un texte autant que possible impeccable, de nature à barrer la route devant les abus et à consacrer le respect des droits de l’homme. C’est dans ce cadre que se situe notamment l’amendement du chapitre relatif aux prérogatives de la police judiciaire, désormais contrainte de suivre des règles contraignantes dans ses investigations sur des crimes auxquels manque l’élément du flagrant délit. «Dans le passé, son enquête était menée dans ces cas en marge de la loi», note la commission de l’Administration et de la Justice dans son rapport à la Chambre. C’est toujours dans ce même cadre que s’inscrivent les règles d’enquête fixées au parquet ainsi que les critères de toute perquisition. Il est évidemment impossible de rapporter tous les amendements introduits au code de procédure pénale, voté cinq ans après son élaboration la première fois par le comité de modernisation des lois et examiné une première fois par la commission que présidait Chaker Abou Sleiman. Le Parlement approuve en un tournemain quatre propositions de loi dont une non inscrite à l’ordre du jour de la réunion, concernant les établissements qui émettent des bons du Trésor pour le compte de l’État. Les trois autres se rapportent au calcul des indemnités de fin de service des militaires qui ont pris leur retraite à partir du 1er janvier 1995, à l’amendement d’un article de la loi sur la CNSS et de certains articles de la loi concernant la création de deux Ordres des médecins. Une seule modification est apportée au dernier texte : celle de relever de 250 LL à 2 000 livres le timbre fiscal apposé par les médecins sur chaque ordonnance et assumé par ces derniers. Le Parlement s’apprête à s’attaquer à un dernier texte quand un député constate l’absence de quorum. La séance est levée jusqu’au 10 avril.
Pour la deuxième journée consécutive, la séance est levée, faute de quorum, place de l’Étoile, où la Chambre a quand même eu le temps d’approuver, enfin, les amendements du code de procédure pénale. Si l’on dit enfin, c’est parce que ce texte, élaboré par une commission mixte formée de juristes de renom et de députés, revu par l’Exécutif, examiné et...