Rechercher
Rechercher

Actualités - CHRONOLOGIES

PARLEMENT - Poursuite aujourd’hui de l’examen du projet de fusion des Conseils - Service du drapeau : exemption des étudiants à l’étranger

Beaucoup de Libanais dont les enfants poursuivent leurs études à l’étranger laisseront échapper un grand «ouf» à la lecture de ces quelques mots : «Chaque Libanais résidant à l’étranger avec une carte de séjour officielle est exempté à titre provisoire du service du drapeau. Tout Libanais qui a passé cinq ans en dehors du pays est exempté définitivement du service militaire. Toutes les poursuites judiciaires dont il fait l’objet sont annulées. Les sanctions prises à son encontre tombent du même coup». La Chambre qui a repris hier l’examen de son ordre du jour, entamé la semaine dernière, a voté ce texte proposé par le chef du gouvernement Rafic Hariri, franchissant ainsi un important pas sur la voie de la révision de la loi sur le service du drapeau, qui ne fait apparemment que des mécontents, non seulement parmi la population, mais sous la coupole du Parlement aussi. L’unanimité parlementaire autour de la nécessité d’abroger ou du moins de réviser radicalement ce texte, qui contraint tous les jeunes qui ont atteint leur majorité à effectuer une année de service militaire, en atteste. Cette unanimité ne s’est toutefois pas manifestée lors de l’examen des trois autres textes, sur le calcul des indemnités des pensions de retraite et des indemnités de fin de service des militaires, sur la réduction de la pollution de l’air due aux moteurs à diesel et sur la fusion du CDR, du CEGPVB et du CEGP. Aucun de ces projets n’a pas pu être voté. Les trois ont suscité de longs débats animés. Le président de la Chambre Nabih Berry ouvre la séance à 10h45 avec, de nouveau, le projet de loi relatif au calcul des pensions de retraite et des indemnités de fin de service pour les militaires ayant cessé l’exercice de leurs fonctions, de 1994 à 1998. Un sujet qui, immanquablement, concerne ou concernera la quasi-totalité des Libanais. Qu’ils soient militaires ou civils. Et c’est devant tout un hémicycle partagé que Fouad Siniora prend, en premier, la parole. Un hémicycle partagé entre, d’une part, ceux qui ne veulent pas, à ce niveau-là, privilégier les militaires par rapport aux civils – à l’instar du ministre des Finances et de bon nombre de ses collègues, des haririens, des berristes, de Nassib Lahoud ou de Boutros Harb – et de l’autre, ceux qui ne voient aucun problème à ce que les militaires reçoivent leurs indemnités de retraite à partir du 1/1/94, alors que tous les autres salariés du secteur public ne les touchent qu’à partir de 1995. Et parmi eux, les députés joumblattistes, hezbollahis, les ministres Pierre Hélou, Marwan Hamadé, Issam Farès, Hussein Husseini, «les civils ne sont pas lésés : dans le cadre de la loi amendant l’échelle des salaires dans le secteur public, ils ont reçu le double de ce qui leur était dû», dit-il à Nabih Berry... Nabih Berry, qui n’a pas attendu longtemps pour apostropher Fouad Siniora, dont l’enthousiasme presque juvénile n’est plus à démontrer, pendant qu’il s’échinait à expliquer, «je le ferais même en espagnol s’il le faut», que le gouvernement, divisé sur la question, refusait cette loi, parce qu’il voulait rattraper les injustices faites aux militaires – mais uniquement à partir de 1995, par crainte de créer des charges supplémentaires pour le Trésor. «Nous avons mis ce sujet entre parenthèses lors de la dernière session afin que vous nous répondiez à cette question : est-ce que les civils ont reçu leurs indemnités, correspondant au changement d’échelles de salaires, à partir de 1994 ?», demande le n° 2 de l’État à Fouad Siniora. «Non», reconnaît ce dernier. Rafic Hariri, lui, est d’abord ailleurs, sans doute déjà à Amman. Sauf qu’il va vite intervenir : «Les militaires et les civils encaissent tous deux leurs indemnités, certes, mais la question est : sur quelle(s) base(s)», s’interroge-t-il, provoquant par là un long débat technique entre les parlementaires, au moment où les manifestants propalestiniens hurlaient leurs slogans place de l’Étoile. Il n’empêche, la loi n’a pas été votée, d’autant plus qu’il fallait un minimum de 65 voix puisqu’il s’agit d’un texte renvoyé par le chef de l’État – à ranger donc dans le camp de ceux qui ne voulaient pas privilégier les militaires. Résultats du vote, après un immense brouhaha enclenché par les toujours infatigables Hussein Husseini et Boutros Harb, au sujet de la procédure à suivre – vote nominal ou à main levée : 45 voix contre, 41 pour. Les députés voteront dans tous les cas aujourd’hui pour statuer sur l’année 95, après avoir refusé donc la 94. C’est Nabih Berry qui a demandé au député hezbollahi Mohammed Fneich de préparer une proposition de loi rendant justice aux retraités de 1995. La pollution «Cette proposition de loi est l’une des plus importantes. Le Liban n’a pas de pétrole, sa richesse à lui, c’est le tourisme», insiste Nabih Berry au moment où les députés ont commencé à examiner l’indispensable proposition d’Akram Chehayeb – indispensable quelle que soit l’inclination de tout un chacun pour le courant écologiste. Réduire la pollution de l’air due au secteur des transports et encourager l’utilisation des carburants propres. Ce qu’Akram Chehayeb propose, c’est l’interdiction d’importer tout véhicule roulant au diesel, ou d’utiliser le diesel, c’est également de motiver les consommateurs de l’essence sans plomb, en diminuant au minimum de 10 % le prix de ce sans plomb. Un débat qui a extrêmement divisé la Chambre, non pas sur le fond, mais sur les moyens à mettre en œuvre pour arriver à réduire la pollution de l’air. Pour Nassib Lahoud, l’important est certes d’encourager l’utilisation de l’essence sans plomb, «mais interdire le diesel, utilisé partout dans le monde, ne servirait à rien», a estimé le député de Baabdate. L’instigateur du texte a quant à lui rappelé qu’«il y a plus de 30 000 voitures roulant au mazout, et que ce qui provoque de nombreuses maladies, c’est, précisément, le mazout». Mazout, un mot que très peu de députés parviennent à prononcer, puisqu’hier c’était «mazeut» ou «mazotte». Nayla Moawad demandait l’abandon total du mazout industriel, Serge TerSarkissian proposait d’empêcher l’importation de moteurs d’occasion, et Ali Ammar, se rêvant en tribun harangant des milliers d’auditeurs, s’en prenait de sa voix de stentor à tout ce qui pollue, et affirmant qu’«il est grand temps que le Parlement cesse de légiférer sur mesure ou pour le compte des compagnies (importatrices de carburants)». Ce qui a fait fuir, momentanément, Akram Chehayeb. Et pendant que Marwan Hamadé recevait, en pleine tête, le paquet de bonbons que lui lançait Fouad es-Saad – ce qui ne l’a ni empêché d’en proposer à Mohammed Abdel Hamid Beydoun ni de refuser poliment ceux offerts par Issam Farès – le projet du député de Aley était renvoyé en commissions mixtes. Motif : trop d’avis divergents. Quoi qu’il en soit, l’importance de ce dossier ne devrait, répétons-le, échapper à personne. Le service du drapeau Le débat autour du service du drapeau prendra exactement une heure. Une heure de discussions parfois tumultueuses, initiées par une proposition de loi de Georges Kassarji, député de Zahlé, qui suggère «l’exemption de chaque Libanais résidant à l’étranger depuis trois années consécutives du service du drapeau à condition qu’il verse au Trésor la somme de trois millions de livres». En tout, près de trente députés prennent la parole et sont tous d’accord sur le principe – le chef du gouvernement Rafic Hariri aussi – mais pas sur la formule suggérée. Les propositions d’amendement fusent de toutes parts. Les interventions parlementaires se succèdent. Et elles sont nombreuses. Toutes tournent autour du même point : les inconvénients du service du drapeau, auquel les députés ne semblent trouver aucun avantage, «pas même celui de réaliser l’intégration nationale», pour reprendre les termes de Mikhaël Daher qui le qualifie de «catastrophique». Le ton est donné par Farid el-Khazen, qui souligne que le service militaire a «causé chez presque tous les Libanais une crise sociale et parfois économique dont l’un des aspects est reflété par la proposition de loi sous étude». «Heureusement que notre collègue Georges Kassarji a abordé ce sujet. Le service du drapeau n’a pas débouché sur une intégration nationale mais sur l’émigration de nos jeunes», enchaîne Mikhael Daher. «Il a causé une véritable catastrophe. Les jeunes qui font des études de génie ou de médecine oublient tout ce qu’ils ont appris à cause de cette année d’entraînement militaire. Ceux qui vont poursuivre leurs études à l’étranger ne reviennent plus. Le Liban est en train de perdre ses «cerveaux» à cause du service du drapeau», que M. Daher souhaite étalé sur deux mois pendant deux étés consécutifs. Voilà. Tout est dit ou presque car les députés en rajoutent, en dépit de l’intervention du ministre de la Défense Khalil Hraoui, qui annonce que la question dans son ensemble doit être examinée en Conseil des ministres. Il rappelle qu’une proposition de loi portant amendement du texte juridique relatif au service militaire a été soumise au gouvernement par deux députés, Farid el-Khazen et Misbah Ahdab, et transmise au commandement de l’armée. «Nous aurons la réponse ces deux jours et nous l’examinerons en Conseil des ministres. Je suggère que la proposition sous étude soit aussi transmise pour examen au gouvernement», renchérit M. Hraoui avec humeur. Le président de la Chambre Nabih Berry était, à l’opposé, d’humeur badine : «Quand il était simple député, il ne parlait pas de cette manière», laisse-t-il tomber l’air malicieux. À l’instar de M. Daher, Nassib Lahoud mais aussi Ali Ammar jugent que le service militaire favorise l’émigration tout en appelant à une révision radicale de la loi. M. Lahoud est contre la proposition sous étude «parce que nous n’avons pas besoin de raisons supplémentaires pour encourager les jeunes à émigrer». Des voix s’élèvent dans l’hémicycle : «Il a raison». Ammar Moussawi soulève un autre problème : «Se rend-on compte que certains pères de familles ont dix enfants, qu’ils sont obligés de subvenir à leurs besoins parce que ces derniers doivent effectuer leur service militaire ? Que peuvent faire ceux-là ?» «Avoir d’autres enfants», rétorque M. Berry. Décidément, il est d’une humeur bien badine. Le député du Hezbollah met l’accent sur une autre question, reprise par plusieurs autres parlementaires, dont Anouar el-Khalil, celle du caractère «discriminatoire de la loi, qui favorise les étudiants installés à l’étranger au détriment de leurs compatriotes restés au Liban». Empreintes de poules dans la boue... Robert Ghanem et Georges Najm plaident, sans succès, en faveur d’un gel de l’examen du texte en attendant de prendre connaissance de celui qui va leur être transmis par le gouvernement. M. Ghanem propose que les étudiants ayant passé cinq ans à l’étranger soient exemptés du service militaire. «Il ne faut pas donner aux gens un motif pour voyager», insiste-t-il. Serge TerSarkissian a une autre proposition que M. Berry n’apprécie pas : «Non, non, ce que tu dis me fait penser aux empreintes des poules dans la boue». En d’autres termes, à du gribouillage. Nayla Moawad insiste pour obtenir de Hariri un engagement selon lequel le gouvernement soumettra au Parlement dans un délai de deux semaines ou un peu plus un projet de révision de la loi sur le service militaire. «Non, non, je ne peux pas», réplique le chef du gouvernement sans la moindre hésitation. Le nombre de députés qui souhaitent ce genre de révision augmente à vue d’œil. M. Berry se trouve contraint d’intervenir pour souligner qu’«il ne faut pas prendre à la légère des questions aussi importantes que le service du drapeau, en vigueur dans tous les pays démocratiques. Si le service militaire n’a pas contribué à la réalisation de l’intégration nationale, cela ne veut pas dire qu’il faut le supprimer. Nous pouvons toujours remédier aux lacunes». Hariri ne manque pas de constater que l’opposition parlementaire s’amplifie. Apparemment sensible à une révision de la loi sur le service du drapeau, c’est lui qui fait la synthèse de toutes les propositions et propose celle qui sera retenue : «Contrairement à tout autre texte, chaque Libanais résidant à l’étranger avec une carte de séjour officielle est exempté à titre provisoire du service du drapeau. Tout Libanais qui a passé cinq ans en dehors du pays est exempté définitivement du service militaire». Les députés ajoutent cette petite phrase : «Toutes les poursuites judiciaires dont il fait l’objet sont annulées. Les sanctions prises à son encontre tombent du même coup». Curieusement, c’est le ministre de la Défense qui proteste : «Mais ce que nous proposerons en Conseil des ministres est plus global». À juste titre, Mme Moawad relève l’absence d’homogénéité au sein du Conseil des ministres et harcèle pratiquement le chef du gouvernement pour savoir pourquoi il refuse de s’engager à envoyer au Parlement un projet de loi dans un délai de deux semaines. «Je ne peux pas m’engager à élaborer un projet de loi à la demande d’un député, surtout dans ce genre de situation liée à plusieurs questions comme l’entente et l’intégration nationales». On l’entend à peine car les députés parlent tous ensemble. «Celui qui parlera sans autorisation sera privé du droit de parole durant trois réunions consécutives», les tance-t-il. On se serait cru à l’école... La Chambre s’attaque ensuite au projet de fusion du CDR, du CEGPVB et du CEGP sans parvenir à achever son examen, faute de quorum. Le Parlement est divisé en deux camps sur la question. Le premier, proche du chef du gouvernement, et formé notamment de Mohammed Kabbani, Bassem Yamout, Serge TerSarkissian et Mohammed Hajjar, estime que le projet de loi doit être voté tel qu’il a été élaboré par le gouvernement. Le deuxième, constitué notamment de Hussein Husseini, Nicolas Fattouche, Nayla Moawad, juge que le texte a besoin d’un examen plus approfondi en commissions et trouve pratiquement aberrant qu’une même autorité, en l’occurrence le CDR, «décide et planifie un projet, engage les contacts nécessaires à ce sujet, lancent les appels d’offres, accorde les adjudications, exécute et paie». Les députés Nassib Lahoud, Rober Ghanem et Assem Kanso adoptent une attitude plus nuancée. Ils estiment que le texte doit être voté rapidement parce que la fusion des trois organismes est de nature à mettre en marche le mécanisme qui entraînera une dynamisation de l’économie nationale mais jugent indispensable de revoir, plus tard, ses prérogatives. M. Hariri multiplie les navettes entre le perchoir et les rangs des députés. On pense qu’il prépare un amendement du texte. Il n’en est rien. Selon des sources parlementaires, il tentait de convaincre les députés de la nécessité d’approuver le projet de fusion sans amendement. L’examen du texte se poursuivra ce matin, place de l’Étoile, où la Chambre doit aussi plancher sur le projet d’amendement du code de procédure pénale. Tilda ABOU RIZK et Ziyad MAKHOUL
Beaucoup de Libanais dont les enfants poursuivent leurs études à l’étranger laisseront échapper un grand «ouf» à la lecture de ces quelques mots : «Chaque Libanais résidant à l’étranger avec une carte de séjour officielle est exempté à titre provisoire du service du drapeau. Tout Libanais qui a passé cinq ans en dehors du pays est exempté définitivement du service...