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Actualités - INTERVIEWS

RENCONTRES - Ellen Stewart, la célèbre animatrice du théâtre Off-Off Broadway à Beyrouth - La Mama poule des artistes du monde

Ellen Stewart, la célèbre animatrice du théâtre Off-Off Broadway «La MaMa ETC» est à Beyrouth*. Elle vous accueille d’un «Am la MaMa» laconique. Pour l’entrée théâtrale escomptée, c’est raté. Et pourtant. Cette grande dame aux cheveux plus sel que poivre tressés en Demi-Dread Locks , en chaussettes, chemise bariolée et pantalon de jogging, dégage, malgré sa nonchalance apparente, une énergie et une force de caractère extraordinaires. Ellen Stewart est la MaMa. Elle s’est forgée un nom avec ce surnom. Elle est la fondatrice et directrice artistique de La MaMa ETC (Experimental Theater Club) connu pour ses productions avant-gardistes non seulement à New York mais partout dans le monde. La MaMa ETC célèbre cette année son quarantième anniversaire. Voilà sa fondatrice, en quelques mots-clés. Souvenirs : elle se souvient d’une visite à Beyrouth, au début des années 80. Elle était venue voir ses amies. Les bombes, les barrages, elle a passé une soirée inoubliable chez Janine Rubeiz. «Il y avait des gens venus des deux côtés. On a chanté, on a dansé». Baalbeck : les festivaliers de Baalbeck de l’année 1972 gardent en mémoire le superbe spectacle qu’elle a présenté cet été-là. Sa Médée a inauguré le 17e festival, bouleversant le dispositif scénique du temple de Bacchus. La mise en scène était signée par Andrei Serban, pas moins que cela. La musique, «qui fait 50 % du spectacle», était d’Éisabeth Swados. Rêve américain. Originaire de Chicago, elle est descendue à New York en 1950. Elle était employée chez Saks 5th Avenue. Elle fabriquait, en secret, des robes qu’elle portait durant les Lunch Breaks. Une cliente en a vu une par hasard. C’est ainsi qu’Ellen Stewart a été promue Fashion Designer. Cauchemar américain. Elle vous parle de la discrimination impitoyable envers les gens de couleur. «Et cela n’arrête pas», dit-elle. Surnom : juste après la Seconde Guerre mondiale, Saks avait un quota d’employés, réfugiés venus d’Europe. «Ces femmes m’ont beaucoup appris sur le plan de la couture. Il y en avait 15 dans mon département. Les femmes blanches refusaient de m’adresser la parole, encore moins de travailler avec moi. Les réfugiées, elles, bien qu’elles soient plus âgées , m’appelaient la Mama. C’est ainsi que ce surnom m’a collé». Théâtre : dans le sous-sol d’un immeuble du East Nine Street qu’elle louait pour donner une chance à des gens qui voulaient faire du théâtre. Émue. «J’ai appris, en venant de l’aéroport, que Réda Khoury (rencontrée à Baalbeck en 1972, elle a fait partie d’une de ses troupes) n’est plus. Je savais qu’elle était souffrante. Je voulais juste lui tenir la main». La MaMa ETC : c’est expérimental dans le sens où notre théâtre prend sa distance par rapport à ce qui est connu comme le théâtre traditionnel. Lorsque nous avons exporté quelques œuvres vers l’Europe en 1965, celles qui ont eu le plus de succès étaient les plus visuelles, pas si dépendantes de l’anglais. Ce fut une révélation pour moi. Je voulais faire du théâtre qui puisse transgresser les barrières de la langue. Chinois : aux jeunes dramaturges et metteurs en scène en herbe, elle dit une chose : «Je suis une spectatrice et je suis Chinoise. Faites en sorte que je comprenne la pièce». Tournées : ce qui a motivé ses tournées en Europe c’était les critiques des journaux. «En 1965, j’ai pris 22 pièces et 16 jeunes acteurs et actrices. Nous sommes allés en Europe parce qu’on refusait, aux États-Unis, de publier les œuvres. Avec des dossiers de presse bien fournis, nous avions donc plus de chance». Voyages : c’est au gré de ses déplacements continus que La MaMa a rencontré le metteur en scène Jerzy Grutowski, le dramaturge Lucien Slatsen et l’acteur Ricard Cheslak. «Avec l’aide de Ted Hoffman, de l’Université de New York, j’ai pu les amener aux États-Unis. En ce temps-là, les States n’étaient pas en bons termes avec la Pologne». «Le State Department m’a inscrite sur la liste des censurés». Au cours d’un voyage en Roumanie, elle a rencontré le metteur en scène Andrei Serban qui a pu se rendre à New York en 1969. Depuis, il a obtenu la nationalité américaine et il est directeur du Oscra Hammerstein Center for Theatrical Studies à l’Université de Columbia. Tremplin. Un grand nombre d’hommes et de femmes qui ont été associés à la MaMa sont devenus très célèbres. Ellen Stewart mentionne Tom O’Horgan, metteur en scène de Hair. Harold Pinter et Harvey Fierstein entre autres. Côté acteurs, elle cite Billy Crystal, Danny De Vito, Bette Midler, Robert De Niro, Al Pacino… La MaMa, c’est quoi au juste ? Ellen Stewart a fondé La MaMa Experimental Theater Club (ETC) en 1961 dans le but d’encourager et de nourrir les nouveaux talents. Quarante ans plus tard, La MaMa ETC est devenu un pivot dans la scène du théâtre expérimental aux États-Unis et un véhicule de renommée mondiale des œuvres montées à New York. Plus de 2 000 créations théâtrales, musicales, de danse et de mixed-média ont été présentées chez La MaMa ETC New York. Les troupes de la MaMa ont tourné dans 21 pays. Ses productions ont reçu plus de 50 OBIE Awards, des douzaines de Drama Desk Awards, Bessie Awards et Villager Awards. Ellen Stewart conçoit l’art comme un langage international qui transcende les barrières. Le pluralisme artistique et la diversité ethnique sont inhérents aux travaux présentés au club. «Nous sommes fiers de compter 70 pays faisant partie de la famille de la MaMa». Voilà une mère qui prend bien soin de ses petits. Bonne fête Mama. * Elle rencontre les étudiants ce soir dans le cadre du Festival Shams, au Théâtre de Beyrouth, 20h30.
Ellen Stewart, la célèbre animatrice du théâtre Off-Off Broadway «La MaMa ETC» est à Beyrouth*. Elle vous accueille d’un «Am la MaMa» laconique. Pour l’entrée théâtrale escomptée, c’est raté. Et pourtant. Cette grande dame aux cheveux plus sel que poivre tressés en Demi-Dread Locks , en chaussettes, chemise bariolée et pantalon de jogging, dégage, malgré sa...