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Actualités - CHRONOLOGIES

Une journée à thème : le respect des libertés

Il est clair qu’ils ne s’étaient pas, au préalable, concertés. Il n’en reste pas moins que les mots dits, hier, par la quasi-totalité des députés présents lors de la deuxième réunion parlementaire, ont tous suivi un même fil rouge. Hier, place de l’Étoile, c’était une journée à thème – et quel thème ! Quel thème ? Les libertés. La preuve par trois... La question de la présence syrienne au Liban a été, une nouvelle fois sous les lambris de l’hémicycle, au centre du débat, et les «pro» comme les «anti» ont, tous deux, utilisé le même argument choc : le risque de guerre civile. Les déploiements massifs et intempestifs des forces de l’armée, tant lors de la manifestation estudiantine du 14 mars dernier qu’au sein des locaux de la chaîne de télévision privée LBCI, ont été également évoqués. Enfin, surtout, il y eut un Parlement unanime – et houleux – lorsqu’a été abordé le décret 4 545 : un projet de loi amendant la loi sur la juridiction militaire. Moukheiber donne le la La séance plénière a débuté, après la minute de silence observée en mémoire des anciens parlementaires Adnane Jisr et Michel Daher, par la première des 19 interventions : celle du député de Beit-Méry Albert Moukheiber. «Lorsque l’armée israélienne s’est retirée, l’ensemble des Libanais attendait l’évacuation des forces syriennes», a-t-il dit. «Les raisons que donne la Syrie ne sont pas justifiées. Et je me demande également d’où vient cette “légitimité” dont parle le gouvernement lorsqu’il explique la présence syrienne. Il semble que cet “accord stratégique” cache quelque chose de très louche, et je ne vois aucune raison valable au maintien des forces syriennes au Liban», a-t-il ajouté, s’interrogeant sur le pourquoi de cette présence militaire dans les montagnes du Chouf notamment, et sur le mutisme du gouvernement. «Ils sont en train de se préparer à un nouvel Aïn-Dara, cher docteur Moukheiber», a ironisé Mahmoud Abou-Hamdan, faisant sans doute allusion à la bataille de 1982 entre Syriens et Israéliens. Et ignorant totalement son collègue de la Békaa, Albert Moukheiber s’est interrogé sur la position de Damas à l’égard de ce qui se passe actuellement au Liban, affirmant que ce dernier n’est pas en mesure de supporter de quelconques troubles internes, et que le maintien de la présence syrienne au Liban risque de mener à «une nouvelle guerre tribale, à des massacres. Que les Syriens quittent le Liban et aillent plutôt en Palestine où nos frères palestiniens sont en train de se faire égorger», a conclu le député de Beit-Méry. Qui a expliqué à L’Orient-Le Jour qu’il avait pris son temps – malgré les rappels à l’ordre du vice-président de la Chambre Élie Ferzli et malgré la mauvaise humeur manifeste de Hussein Hajj Hassan ou de Mohammed Fneich – parce qu’il attendait l’arrivée du Premier ministre. Et pendant que Marwan Hamadé se levait du siège placé à la droite de celui de Rafic Hariri pour que s’y installe Issam Farès et que commence leur espèce de «flirt», le député de Tyr, Ali el-Khalil, critiquait au micro l’intervention d’Albert Moukheiber, estimant largement suffisante la réponse donnée par Rafic Hariri lors du débat de confiance – «et qui traduisait l’opinion d’une grande partie de la population». Même son de cloche chez le baasiste Kassem Hachem, qui «aurait préféré que (ce dernier) évoque l’occupation de Chebaa et le vol de l’eau libanaise par Israël, plutôt que de confondre l’ennemi avec le frère. C’est cela qui va provoquer le retour aux clans», a-t-il souligné. Quant à Nasser Kandil, il a également brandi le spectre d’une guerre civile, que provoquerait un débat sur la présence syrienne. «Dans tous les cas, je suis persuadé que les opposants à la Syrie abonderont bientôt dans la surenchère contraire, comme ils l’avaient fait avec la résistance», a conclu le député de Beyrouth. Présence syrienne et liberté d’opinions Surprise lorsque le président de la séance lui donne la parole, Nayla Moawad se lève et fait court et dense : «Je voudrais que l’on m’explique ce qui s’est passé la semaine dernière, tout ce qui a entouré la manifestation estudiantine à l’initiative du courant aouniste. Que veut dire cette présence massive des forces de sécurité et de l’armée sur les routes et dans les enceintes de certaines stations de télévision ?», a-t-elle demandé. Quant à Boutros Harb, qui l’a suivie au micro, il a affirmé qu’on «ne pouvait pas ignorer l’intervention d’Albert Moukheiber ou de Nayla Moawad. Ce genre de discours naît naturellement de certaines erreurs commises par le gouvernement, comme de la non-application de l’accord de Taëf. Ce que nous voulons éviter, c’est que tout cela ne se termine en affrontements entre la population et l’État. Il faut ouvrir le dossier syrien librement, objectivement et avec courage, et ce afin que soient consolidées les relations libano-syriennes sur la base d’une amitié, d’une souveraineté et de la libre décision réciproques», a souligné le député de Batroun, qui a appelé à la tenue d’une séance plénière extraordinaire consacrée à l’examen du plan économique du cabinet Hariri. Requête à laquelle ne s’est pas opposé ce dernier, indiquant que ces initiatives font partie des prérogatives de la Chambre. «Mais moi, je ne veux que te faire plaisir», lui a répondu Nabih Berry. Il est d’ailleurs à noter que les rapports entre les nos 2 et 3 de l’État ont semblé, du moins hier, au très beau fixe. Et pour Nassib Lahoud, «l’équation est, aujourd’hui, claire : la réforme économique ne peut se faire actuellement que si l’on rectifie, concomitamment, les relations libano-syriennes. Il faut construire ces dernières sur la base de la confiance, de l’alliance et de la coopération et non sur un rapport de forces. Et la réforme économique doit se faire en même temps qu’une réforme politique : c’est le seul moyen de rétablir la confiance des Libanais, en eux, en leur pays, en leur avenir – le seul moyen également de redonner confiance aux investisseurs, qu’ils soient au Liban ou à l’étranger», a assuré le député de Baabdate. Une opinion largement partagée par Salah Honein, qui a insisté sur l’importance «d’une situation politique qui rassurerait chaque Libanais, faisant de lui un membre actif au sein de la société, un soutien à l’économie de son pays. Mais comment voulez-vous y parvenir, lorsque la liberté d’opinion est réprimée, comme elle l’a été lorsque des jeunes Libanais ont voulu donner leur avis (ndlr : le 14 mars dernier), pacifiquement et légalement ?», a-t-il demandé. «Pourquoi l’État ignore ce qui est frappant ? Et ce qui est frappant, c’est que la relation libano-syrienne, dans sa formule actuelle, ne cesse de s’étioler. Cette relation ne pourra s’épanouir que si les deux peuples en sont satisfaits. Le peuple libanais, comme le peuple syrien, ne pourra plus continuer à donner, s’il n’est pas convaincu qu’il reçoit en contrepartie – qu’il reçoit en souveraineté et en dignité. Les droits des peuples perdurent, et en ceci, notre foi est inébranlable», a conclu le député de Baabda. Quant aux autres interventions, elles ont surtout porté sur des points plus «en accord» avec l’ordre du jour – mesures économiques – ou avec l’actualité. L’infatigable Hussein Husseini Quoi qu’il en soit, l’essentiel de la séance plénière d’hier a été consacré à l’examen de 33 projets de loi. Et là, plusieurs constats s’imposent. D’abord, le bon travail d’équipe entre l’Exécutif et le Législatif – aussi intenses qu’aient pu être bon nombre d’interjections, de part et d’autre. Impossible également de ne pas s’arrêter sur ces 8 propositions qui ont été renvoyées, toutes, pour le même vice de forme : l’absence de signature du(des) ministre(s) concerné(s). Et à chaque fois, c’était l’ancien chef du Parlement Hussein Husseini, qui rappelait à son successeur cet indispensable point – de détail, certes, mais indéboulonnable – constitutionnel. Avec la régularité et la précision d’un métronome, ce ténor de la Chambre a stupéfié, à chaque fois, Nabih Berry, qui, comme la quasi-totalité des députés, ne pouvait s’empêcher de sourire, désarmé devant l’inattaquable requête. Presque tous, à l’exception notable de Mikhaël Daher. L’examen de ces huit projets a été reporté aux 27 et 28 mars, sur décision de Nabih Berry. Quant au projet de loi qui a mobilisé, contre lui, la totalité de l’hémicycle, c’est celui amendant la loi de juridiction militaire. Concrètement, l’ensemble des députés appelait à la réduction – «maximale» pour Nabih Berry – des prérogatives du tribunal militaire, «un tribunal d’exception», selon les parlementaires. C’est-à-dire que les cas de querelles mineures entre un civil et un militaire survenant en dehors de l’exercice, par ce dernier, de ses fonctions (la proposition de Robert Ghanem), ne seraient plus déférés que devant un tribunal ordinaire. Là où l’avis de certains députés divergeait, c’était sur la procédure à suivre. Les uns voulaient que soit adopté le projet avec l’amendement Ghanem, d’autres voulaient qu’il soit, en plus, revu par le gouvernement, les troisièmes, à l’instar des ministres Khalil Hraoui et Samir Jisr, ou du député Sami Khatib, estimaient que cet amendement aurait modifié tout le système judiciaire militaire. D’autres, enfin, voulaient carrément rejeter le projet du gouvernement. Finalement, le projet a été voté à une condition et une seule : que le Cabinet Hariri présente au Parlement, avant la fin du mois d’avril, un projet de loi amendant la juridiction militaire. Sinon, la commission de l’Administration et de la Justice s’en chargerait toute seule. Un sujet qui, rappelons-le, concerne tous les Libanais(es).
Il est clair qu’ils ne s’étaient pas, au préalable, concertés. Il n’en reste pas moins que les mots dits, hier, par la quasi-totalité des députés présents lors de la deuxième réunion parlementaire, ont tous suivi un même fil rouge. Hier, place de l’Étoile, c’était une journée à thème – et quel thème ! Quel thème ? Les libertés. La preuve par trois... La...