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Actualités - BIOGRAPHIES

PORTRAIT - Le ministre d’État chargé des questions parlementaires a perdu quelques illusions - Michel Pharaon, la politique, une affaire de famille

Il aurait sans doute préféré le portefeuille de la Jeunesse et des Sports ou celui du Tourisme. Mais depuis longtemps Michel Pharaon a appris à tout relativiser. Avec son look de jeune homme et ses enfants déjà largement adolescents, il sait où sont les priorités. Pour lui, elles demeurent familiales. Sans doute parce que la politique lui sourit dès son plus jeune âge… Le ministre d’État chargé des questions parlementaires est un homme discret. Pourtant, dans son bureau qui fut aussi son quartier général électoral, ses partisans ont toujours l’air en campagne. Le sourire large et la mine bronzée, ils accueillent aimablement les multiples visiteurs, requérants, alliés réels ou potentiels, hommes politiques… ou, plus rarement, des journalistes. C’est que Michel Pharaon n’aime pas trop parler. Dans sa vie, tout semble aller de soi, les affaires, la politique, le cercle familial et amical, on dirait une machine bien rodée qui fonctionnerait sans la moindre anicroche. À le voir si détendu dans son élégant bureau, on a du mal à croire que cet homme de 42 ans (père de trois enfants dont l’aînée a 16 ans) a déjà deux batailles électorales derrière lui, et une première approche en 1992. La politique, il l’a toujours connue, son père Pierre ayant été élu député en 1968, alors qu’il avait 11 ans. «Mais la personnalité politique de la famille était mon oncle Henri. Son fils Naji étant peu intéressé à prendre la relève, c’est naturellement moi qui devais le faire. Mon oncle m’a d’ailleurs pressé de bien apprendre l’arabe en vue justement de cette carrière à laquelle on me destinait». Entre le terrain et les salons… En 1972, son père ne présente pas sa candidature, espérant le faire en 1976, mais entre-temps il y a eu la guerre, une guerre qui a laissé des traces dans la vie et les convictions du jeune Michel. Elle lui fait en effet très tôt prendre conscience des valeurs que défend sa famille : la tolérance, l’unité, l’entente. Tout en gardant de bonnes relations avec toutes les parties, jamais les Pharaon ne se sont laissés entraîner à trahir leurs convictions et le jeune Michel fait comme ses aînés, malgré parfois un sentiment de révolte contre la violence et ses excès. En 1992, Farid Serhal, ancien député de Jezzine, tâte le terrain pour voir si Michel ou son père souhaitent se présenter dans cette circonscription. Après de rapides concertations, les deux hommes décident de boycotter le scrutin. D’ailleurs, Farid Serhal en fera de même. Jusqu’en 1995, Michel Pharaon se contente de ses fonctions en tant que membre du Conseil d’administration du Port de Beyrouth et de l’Hippodrome. Il s’occupe aussi des affaires de la communauté (grecque-catholique) et lance de grands projets sociaux tels que la carte Mednet. Mais il sait parfaitement qu’il se destine à la politique. En 1995, le député grec-catholique de Beyrouth, Joseph Moghaïzel, meurt et son siège – qui avait été fondé par Henri Pharaon, précise-t-il – est vacant. Michel étudie sérieusement la possibilité de présenter sa candidature et il bénéficie de nombreux appuis, notamment celui de Ghassan Tuéni. Son père, Pierre, est alors ministre et Michel sait qu’il n’interviendra pas en sa faveur. Mais le jeune homme pense que l’occasion est favorable. Il changera d’avis en voyant Nasri Maalouf présenter sa candidature. «Je n’allais tout de même pas me présenter contre lui». Nasri Maalouf est élu pour un an, les prochaines législatives étant fixées à l’été 1996. Le jeune Michel se lance alors à fond dans la bataille. C’est ainsi qu’il découvre que ce qu’il croyait être de la politique, n’est en fait que des conversations de salon. «La politique, dit-il, c’est le terrain, c’est les gens. Rien à voir avec les analyses que l’on fait dans les bureaux». Bien entouré, le jeune candidat fait campagne tout au long de l’année, profitant de la vieille machine familiale. Quelle que soit la liste sur laquelle il figurera, il veut avant tout se faire connaître des électeurs et se doter d’une popularité propre. Avec Hariri, une alliance de conviction Traditionnellement, sa famille s’était toujours alliée aux Salam, mais le jeune homme n’a aucun complexe à briser cette alliance. D’autant qu’en 1996, Tammam Salam ne forme pas lui-même une liste. Michel songe de plus en plus à sonder Hariri, mais il ne le connaît pas encore. Finalement, c’est le président Hraoui qui fait le premier contact et lui suggère de se présenter sur la liste du président du Conseil. Un premier rendez-vous est pris et entre les deux hommes, le courant passe. Michel Pharaon est élu et en quatre ans au Parlement, il perd quelques-unes de ses illusions. «J’avais un programme un peu idéaliste, dit-il. Je rêvais de créer une couverture sociale pour tout le pays et j’ai découvert que le député n’a pas beaucoup de pouvoir. En fait, ce sont les conseillers des ministres qui font le plus souvent avancer ou reculer les choses». Le député est choqué par la force d’inertie du Parlement. «Le député peut plus bloquer que lancer de nouveaux projets». Il comprend dès lors l’importance de l’Exécutif. Mais, pour l’instant, il y a plus urgent : les élections 2000. «Autant celles de 1996 étaient difficiles, autant les élections de 2000 sont faciles. Ma machine était déjà bien rodée et grâce à la longue carrière de mon oncle, mon nom était très bien accueilli à Beyrouth». Michel Pharaon commence par déployer de multiples efforts pour une entente entre Tammam Salam et Hariri. La bataille étant inévitable, il choisit son camp et il est pratiquement l’un des rares colistiers de Hariri doté d’une popularité non négligeable. «Au cours de cette campagne, nos relations se sont consolidées et nous sommes passés d’un partenariat de fait à une alliance de conviction». Michel Pharaon ne craint pas l’ombre que peut faire M. Hariri. «Le président du Conseil respecte ma marge de manœuvre et elle lui est utile puisqu’elle lui permet d’élargir son horizon». Nommé ministre d’État chargé des questions parlementaires, Michel Pharaon a beaucoup de projets mais a des moments de doute. Un conseil que son père lui avait donné en 1995 lui revient alors en mémoire : «Ne te lance pas dans la politique, c’est un milieu pollué. Parfois la pression sur moi et sur ma famille me semble intolérable, mais ces moments passent vite et je suis repris dans un tourbillon qui ne me laisse pas le temps de souffler». Ce qu’il regrette, c’est de n’avoir pas pu prendre des vacances après les élections. Il avait même réservé des places pour 15 jours de ski en Autriche et 15 autres jours en Thaïlande, mais sa nomination au gouvernement a compromis ce projet et c’est au Vatican et en France qu’il se retrouve en mission gouvernementale. Au fond, cela ne lui déplaît pas. Michel Pharaon aime ses fonctions et, surtout, il a le sentiment de respecter la tradition familiale. Son père a été ministre et son grand-père Jean Sehnaoui avait tracé la voie en Syrie. «La politique, c’est la façon dont ma famille a choisi de servir son pays», déclare Michel Pharaon. Ainsi, il respecte ses deux priorités.
Il aurait sans doute préféré le portefeuille de la Jeunesse et des Sports ou celui du Tourisme. Mais depuis longtemps Michel Pharaon a appris à tout relativiser. Avec son look de jeune homme et ses enfants déjà largement adolescents, il sait où sont les priorités. Pour lui, elles demeurent familiales. Sans doute parce que la politique lui sourit dès son plus jeune âge… Le...