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Actualités - CHRONOLOGIES

CINÉMA - Projection au CCF de « Lumumba » en présence de son réalisateur, Raoul Peck - Une génération face à son passé

1991 : Raoul Peck enquête sur la mort de Patrice Lumumba. Sans doute des raisons personnelles l’ont-elles poussé à en savoir plus : son propre père avait activement aidé, en tant qu’intellectuel, le jeune Congo devenu indépendant en 1960. Lumumba, la mort d’un prophète était une simple enquête sur les trois mois de pouvoir du jeune politicien, puis sa chute, son enlèvement et son assassinat. Patrice Lumumba était le Premier ministre du plus riche État d’Afrique et profondément idéaliste. Il n’a pas tardé à être liquidé par ses plus proches amis. Mais le réalisateur a fait ce qu’il appelle modestement des «découvertes», qui lui ont donné envie de revenir, 9 ans plus tard, sur un sujet, un pays et un homme qui ne l’ont jamais quittés. Un film entre le «thriller» et le documentaire politique. Dans une interview donnée au quotidien L’Humanité le 17 mai 2000, Raoul Peck constatait que «Lumumba n’a pas eu le temps d’avoir une réelle pensée politique. Il a toujours eu plutôt une pensée humaniste qui vient de son éducation chrétienne, même s’il était plutôt athée. Il avait face à lui une Église catholique assez virulente, soutenue par la France, qui cherchait à le renverser. Ses références étaient la Révolution française, la liberté, la justice. Parfois il a eu des attitudes assez naïves». Réveil politique Après la projection de son film au CCF, Raoul Peck a répondu aux questions du public, qui portaient sur le personnage de Lumumba et sur sa façon d’envisager les faits historiques. Le réalisateur a d’abord rappelé que «c’est en 1958 que Patrice Lumumba a connu son réveil politique alors qu’il assistait à une conférence panafricaine au Ghana». Et d’ajouter : «C’est par la suite qu’il a fondé le MNC. Malgré son charisme et sa foi dans l’indépendance raisonnée, son gouvernement n’avait aucun moyen et ses membres aucune expérience politique : les hommes du Premier ministre avaient à peine 26 ou 27 ans, et pour le voyage que Lumumba avait entrepris avec le Président Kasa-Vubu, l’avion affrété avait été loué à la Sabena. C’était un gouvernement solitaire, qui n’avait aucun appui». La préoccupation constante du réalisateur était axée autour de deux thèmes : rester politiquement incorrect et regarder le passé en face. «Lumumba est ouvertement politique, en montrant au grand jour que la démocratie n’est pas là où elle clame être», explique-t-il en rappelant le rôle des États-Unis dans le dossier congolais. «D’un autre côté, pour l’intégrité du projet, je tenais à ce que la Belgique y fût partie prenante, et c’est ce qu’elle a fait, poursuit-il. Non seulement les deux télévisions belges (flamande et wallonne) ont participé activement au film, mais les anciens colons ont mis leurs archives à notre disposition». Un homme, pas un mythe Quant à l’intégrité face aux faits historiques, Raoul Peck a raconté les mois de recherche et les centaines de témoignages consignés, comme celui de la liquidation du corps de Lumumba, filmée par les deux frères, militaires belges, qui se sont chargés des basses œuvres. «Pour éviter la mythification de Lumumba, explique-t-il, j’ai raconté son histoire par rapport à l’homme, celui qui commet des erreurs et possède ses parts d’ombre, et non par rapport au héros d’une nation». D’un point de vue cinématographique, la solution est simple : «J’ai suivi pas à pas Lumumba, et le spectateur vit avec lui et reste à ses côtés tout au long du film, dit-il. Les passages flous et les méconnaissances des événements congolais ont été ressentis tant par le personnage que par le spectateur. Ce que Lumumba ne sait pas, le spectateur l’ignore autant que lui».
1991 : Raoul Peck enquête sur la mort de Patrice Lumumba. Sans doute des raisons personnelles l’ont-elles poussé à en savoir plus : son propre père avait activement aidé, en tant qu’intellectuel, le jeune Congo devenu indépendant en 1960. Lumumba, la mort d’un prophète était une simple enquête sur les trois mois de pouvoir du jeune politicien, puis sa chute, son...