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Actualités - ANALYSES

DÉVELOPPEMENT - Coopération État libanais-Nations unies pour la réforme de l’Administration - Combattre la corruption : une décision politique avant tout

Lutter contre la corruption au Liban. L’enjeu est de taille. Et, dans un pays comme le nôtre, une telle œuvre pourrait être comparée aux douze travaux d’Hercule. Encore faut-il trouver un demi-dieu grec capable de remplir une telle tâche… Pourtant, secondé par les Nations unies, représentées par le Centre de la prévention internationale du crime (CPIC), le gouvernement libanais a décidé d’agir. En octobre dernier, il a approuvé, par le biais du ministre d’État chargé de la Réforme administrative, un protocole de coopération avec le CPIC visant à lutter contre la corruption politique et administrative. Le Liban a décidé donc de relever le défi et de devenir le premier pays de la région à entamer un tel projet, dont la première étape consiste à mettre en place une stratégie de lutte contre la corruption. Organisée par le Centre d’information des Nations unies (Unic), une conférence s’est tenue hier place Riyad el-Solh afin de présenter à la presse la «coopération entre l’Onu et le Liban pour la lutte contre la corruption». Une coopération dont les prémices ont été la création d’un «Comité de direction pour l’intégrité nationale», approuvé par le Conseil des ministres. Formé de cinq personnes, notamment le député Boutros Harb, le juge à la retraite et le Premier président honoraire de la Cour de cassation Philippe Khairallah, l’expert en matière financière et budgétaire et le membre du syndicat des experts comptables Gina Chammas, et l’expert en matière de développement administratif auprès du Pnud Rahif el-Haj Ali, ce comité devrait ultérieurement être remplacé par une institution relevant de l’État. Au cours de la conférence tenue hier, l’accent a été mis sur la transparence, la protection des libertés et surtout la volonté du gouvernement de lutter contre la corruption. Trois responsables se sont adressés aux journalistes hier, notamment le ministre de l’Information Ghazi Aridi, le ministre d’État chargé de la Réforme administrative Fouad el-Saad, et le président Khairallah. M. Aridi, qui a relevé – à plusieurs reprises – que «le système confessionnel est le moteur de la corruption au Liban», a souligné que «le pays connaît plusieurs formes de corruption depuis bien longtemps». D’où la difficulté de trouver une solution radicale de lutte contre ce phénomène. Et le ministre de l’Information de poursuivre que «les fonctionnaires corrompus ont bien eu droit à des protecteurs influents. Combattre la corruption est devenu - avec le temps – une tâche difficile ; elle s’est incrustée dans la structure du système libanais». Pour M. Aridi, «éradiquer la corruption dépend, notamment, d’une décision politique centrale, d’une loi électorale permettant aux Libanais de choisir librement leurs représentants ; il faudra également renforcer le rôle de la société civile, protéger la liberté de la presse et des syndicats et soutenir l’indépendance du judiciaire». Le ministre d’État chargé de la Réforme administrative a pour sa part indiqué que «la corruption est devenue un fléau qui touche la sécurité des sociétés. Avec les nouvelles technologies, ce phénomène n’est plus limité à un pays où à une région donnée». Et de rappeler que «le Liban a été l’un des premiers pays du monde à répondre au programme mis en place par le CIPC. En 1997 déjà, le ministère d’État chargé de la Réforme administrative a organisé le premier séminaire relatif à la lutte contre la corruption ; en 1999 la coopération avait commencé avec le CICP». «Le protocole signé en octobre dernier a été rédigé conjointement par le ministère d’État chargé de la Réforme administrative et l’organisme onusien», a-t-il poursuivi. «Est-ce que nos efforts aboutiront ? En fait, c’est le premier pas dans un projet de longue haleine, qui réussira tant qu’il sera soutenu sur les plans officiel et populaire», a souligné M. Saad. Quant au président Khairallah, il a cité les noms des membres du Comité de direction pour l’intégrité nationale, présents tous hier à la Maison des Nations unies. Indiquant que «le Comité est une entité complètement indépendante, possédant des capacités morales, légales, financières et administratives», il a noté que son rôle consiste «à évaluer la situation, la nature et les raisons de la corruption qui sévit dans le pays». «C’est cette entité qui convoquera à une réunion d’experts internationaux et une réunion de donateurs. Elle discutera et mettra en place également une stratégie de lutte contre la corruption», a-t-il dit. Et le magistrat à la retraite de préciser que le «comité ne remplacera pas une institution administrative de contrôle ou un organe judiciaire de la lutte contre la corruption. L’organisme aura essentiellement pour rôle d’assurer les informations nécessaires aux services étatiques concernés». «Le comité qui est en cours de formation regroupe actuellement cinq bénévoles qui travaillent à mi-temps, plus tard, il devrait être remplacé par un organisme relevant de l’État», a-t-il souligné en conclusion. La parole a été ensuite donnée aux journalistes. À la question de L’Orient-Le Jour de savoir combien de temps faudra-t-il pour éradiquer la corruption au Liban, le ministre chargé de la Réforme administrative a indiqué : «C’est une question à laquelle personne ne pourrait répondre». Dans un entretien à L’Orient-Le Jour, M. Alexandre Schmidt, coordinateur du Centre de la prévention du crime au Liban, a indiqué que «dans le monde entier, tout comme au Liban, les protocoles libellés pour la lutte contre la corruption s’appliquent à toutes les administrations publiques». Afin de parvenir au but recherché, il faut «évaluer la corruption, mettre en place un instrument semblable au Comité de direction pour l’intégrité nationale et élaborer enfin une stratégie de lutte contre le phénomène». «Pour le Liban, le plan préliminaire de cette stratégie sera discuté et finalisé la semaine prochaine à la Maison des Nations unies en présence d’experts libanais, internationaux et onusiens», a-t-il indiqué. La réunion du Comité de direction pour l’intégrité nationale aura pour but de présenter le plan finalisé au gouvernement et au secteur public. C’est ensuite que l’on tiendra la conférence des donateurs qui pourront financer le programme de lutte contre la corruption. «Le programme du CIPC pour la mise en place d’une stratégie de lutte contre la corruption a été présenté pour la première fois au gouvernement en juin dernier», a indiqué M. Schmidt. «Réunions et activités préparant la mise en place de cette stratégie devraient s’achever en mars prochain», a-t-il relevé. Faire appel au CIPC prouve la véritable intention de l’État libanais de lutter contre la corruption. Certes la tâche sera difficile et ce n’est pas dans un avenir proche que tous les fonctionnaires de l’Administration auront les mains propres. Espérons enfin que les douze travaux d’Hercule ne se métamorphosent pas – dans notre pays – en une autre légende grecque : le mythe de Sisyphe.
Lutter contre la corruption au Liban. L’enjeu est de taille. Et, dans un pays comme le nôtre, une telle œuvre pourrait être comparée aux douze travaux d’Hercule. Encore faut-il trouver un demi-dieu grec capable de remplir une telle tâche… Pourtant, secondé par les Nations unies, représentées par le Centre de la prévention internationale du crime (CPIC), le gouvernement...