Rechercher
Rechercher

Actualités - REPORTAGES

INSTALLATION - Imad Issa à Zico House jusqu’au jeudi 11 janvier - Sang pour sang

«Comment peut-on dire que la guerre est finie ?», une question que Imad Issa ne cesse de poser. Parler de son travail, qu’il a commencé au début de la guerre, c’est évoquer le conflit libanais et, plus exactement, celui qui oppose les habitants du Sud aux soldats israéliens. Originaire d’un village situé à quelques kilomètres de Maghdouché, Imad Issa vit la guerre, bien qu’installé depuis 1985 à Kantari, à Ras-Beyrouth. De 1979 à 1985, il apprend le dessin auprès de Jurdi et d’Irani. Mais rapidement, il s’intéresse à l’installation qui est, selon lui, «un moyen de transmettre sa pensée plus directement». Or, l’opinion de l’artiste est simple : les illusions sont inutiles, le mensonge omniprésent et la guerre vivace et inéluctable. Une conviction qui se renforce avec un incident personnel : «En 1985, la télévision allemande décide de filmer une de mes installations, raconte-t-il. Je voulais fabriquer 15 cercueils qui auraient été portés par des hommes habillés d’une robe longue et d’une cagoule blanches, pour représenter la mort de notre pays. En allant chercher le bois pour les confectionner, j’ai été gravement blessé et j’ai presque perdu l’usage de mon bras et de ma main». Observation active Deux années de convalescence plus tard, Imad Issa se remet au travail, avec une conviction et une audace intactes. Lors d’une performance, en 1990, à l’Institut culturel russe, il s’en prend ouvertement aux artistes libanais de la génération précédente : des photos d’artistes comme Rachid Wahbé sont déchirées puis recollées dans un tableau, tandis qu’à l’entrée, les reproductions de certaines de leurs œuvres sont jetées par terre pour qu’elles soient piétinées. Imad Issa montrait du doigt le peu d’engagement que ses confrères pouvaient manifester à l’égard du conflit, préférant peindre des paysages ou des natures mortes. Pour forcer son public à ce qu’il appelle une «observation active», l’artiste, lors de la même exposition, place des tables, recouvertes de draps et sur lesquelles sont posés des objets du quotidien (coupe de fruits, lampe, livres, etc.). Devant ces tables, des cadres en bois travaillés à l’ancienne : «Chaque jour, je remplissais les coupes de fruits qui se sont vidées dès que les gens ont compris de quoi il s’agissait», se souvient-il. La même année, il présente une rétrospective de cent travaux. Il ne manque pas, au passage, et pour signifier que la révolte est, malgré son succès très polémique, toujours de rigueur, de brûler quelques-unes de ses toiles. Vide abyssal De 1992 à 1998, Imad Issa poursuit son chemin : exposition sur le vide au Goethe Institut : télévisions sur des canaux brouillés, troncs d’arbres creux, cadres vides. Nouvelle tentative (réussie cette fois-ci) en 1993 et filmée de nouveau par la télévision allemande de l’installation de cercueils : «Cette fois-là, je les avais remplis de livres, raconte-t-il. Ils rentraient dans l’église Saint-Georges des maronites, alors dévastée et sans toit, et dont on avait entouré l’espace intérieur de bougies, tandis que les murs avaient été recouverts, à la place des tableaux, de travaux réalisés avec Greta Naufal». Puis il travaille sur l’absence dans les ruines du Grand Théâtre, puis sur l’ombre, lors d’une performance, en 1996, à la galerie 50x70. En 1998, il pense s’occuper de manière plus sereine et plus pacifique, mais rien à faire : «Mes oiseaux de céramique semblaient toujours morts», confie-t-il. Sélectionné à «Ayloul» 1998, il présente 2 petits films sur le vide et sur la destruction. Et cette année, alors que la plupart des Libanais seraient tentés de rêver à un début de paix avec Israël, Imad Issa les refroidit en 10 minutes. Jusqu’au 11 janvier, à Zico House, de 16 à 18 heures, il présente une courte performance, au cours de laquelle il est filmé en train d’arracher, avec les dents, le cou d’une colombe, avant de la dévorer crue. Une déclaration de barbarie ouverte contre «l’ennemi». Explication de l’intéressé : «Mais de quelle paix nous parle-t-on ?, s’exclame-t-il. «Une fois encore, c’est une paix qu’on nous a imposée, pleine de mensonges». Un électrochoc, c’est sûr, qui entraîne celui qui regarde le film au bord de la nausée, où le sang appelle le sang. Mais Imad Issa poursuit son combat. Inexorablement.
«Comment peut-on dire que la guerre est finie ?», une question que Imad Issa ne cesse de poser. Parler de son travail, qu’il a commencé au début de la guerre, c’est évoquer le conflit libanais et, plus exactement, celui qui oppose les habitants du Sud aux soldats israéliens. Originaire d’un village situé à quelques kilomètres de Maghdouché, Imad Issa vit la guerre, bien...