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Actualités - OPINIONS

Un homme de foi

Pendant près de soixante-dix ans, le président Charles Hélou a occupé une place de premier plan sur la scène libanaise. Personne n’ignore les détails de sa carrière exceptionnelle depuis le jour où le prix d’honneur était venu couronner la fin de ses études chez les pères jésuites. Brillant avocat, redoutable journaliste et polémiste, diplomate consommé dont le souvenir est resté vivace à la Cité du Vatican, parlementaire réputé et ministre exigeant, son élection à la tête de l’État en 1964 n’avait été que l’aboutissement naturel d’un parcours hors du commun initié sous l’égide d’un grand homme et d’un grand chrétien dont il se plaisait à dire qu’il s’efforçait d’être le fils spirituel : Michel Chiha. On ne répétera pas assez ce que le Liban doit à Michel Chiha. Et c’est à lui que Charles Hélou doit en particulier l’affirmation, la sincérité et la profondeur de sa foi chrétienne. Car la vie publique de Charles Hélou n’aurait jamais revêtu cet éclat si elle n’avait été imprégnée de son engagement chrétien de tous les instants. Aujourd’hui qu’il n’est plus parmi nous, je considère qu’il est de mon devoir d’apporter maintenant mon témoignage. Charles Hélou se remettait en question tous les jours. Il considérait que c’était là le devoir de tout chrétien, qui ne devait en aucun cas avoir la «bonne conscience» héritée des pharisiens, alors que son prochain continuait à souffrir des séquelles de la guerre ou qu’il était réduit au chômage et incapable de subvenir aux besoins des siens. Ces scrupules, et je dirai même cet excès de scrupules, qui confinaient parfois à l’angoisse, étaient la marque la plus frappante de la personnalité du président Hélou. C’est dans cet esprit qu’il avait fondé, au plus fort de la guerre, l’Association des amis des restaurants du cœur, qu’il a portée à bout de bras jusqu’à son dernier jour, aidé en cela par sa fidèle Antoinette Kazan. Lui qui était en réalité d’un naturel timide et qui n’avait jamais rien demandé à personne devenait audacieux et parfois même quelque peu agressif lorsqu’il s’agissait de collecter des fonds pour ses chers vieillards et enfants et pour tous les déshérités. Ce que d’aucuns ont pu regretter être le prétendu «caractère hésitant» du président Hélou ou sa «lenteur» à prendre des décisions était en fait son souci permanent d’éviter la précipitation et l’improvisation et de donner le temps à la réflexion. Mais quand il s’était agi de défendre les libertés et de garantir le libre fonctionnement des institutions, il s’était montré intransigeant, en dépit des inimitiés que ses positions tranchées avaient pu parfois lui valoir. «Priez pour nous pauvres pêcheurs, maintenant et à l’heure de notre mort» : cette prière à la Vierge que Charles Hélou a répétée avec ferveur sa vie durant et qui gardait pour lui une signification profonde et réelle l’aura accompagné à l’heure où il se confiait à Dieu et que son âme entrait dans une nouvelle Vie.
Pendant près de soixante-dix ans, le président Charles Hélou a occupé une place de premier plan sur la scène libanaise. Personne n’ignore les détails de sa carrière exceptionnelle depuis le jour où le prix d’honneur était venu couronner la fin de ses études chez les pères jésuites. Brillant avocat, redoutable journaliste et polémiste, diplomate consommé dont le...