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Actualités - CHRONOLOGIES

THÉATRE - Au Casino du Liban - « Master Class Maria Callas » : paroles et leçons de diva

Une pièce de théâtre originale et intense signée Terrence McNally (d’après une adaptation d’Erna Hurli Collins), sobrement mise en scène par Didier Long et inspirée des «Master Classes» sur les plus grands airs du répertoire lyrique, donnés par Maria Callas à la fin des années soixante à la Julliard School of Music de New York. Pour les fervents belcantistes et les fans de la grande cantatrice voilà une occasion en or pour «décortiquer» une partition musicale et un personnage entré vivant dans la légende. Incarnée d’une manière saisissante par une Marie Laforêt surprenante et aux milles facettes séduisantes, Maria Callas nous apparaît ici sous les traits d’une impitoyable et redoutable diva pour qui l’art de chanter est l’affaire d’une vie. Tout en nous accordant dans ce flot de paroles et de commentaires, les clefs d’une existence houleuse où rien n’a manqué, le bonheur comme le malheur, des grandes tourmentes d’une femme qui a difficilement «conquis» sa beauté tout autant que les terribles combats qu’elle a dû livrer pour rayonner sur scène sans oublier ses amours tardives et tapageuses avec un Onassis insolemment riche et d’une déplorable inconstance. Sur une scène presque nue mis à part une table, une chaise et un grand piano à queue noir (accompagnateur Marc-Antoine Pingeon), Callas-Laforêt, toute de noir vêtue comme la Colomba de Mérimée avec toutefois ce «chic» unique qui la caracterisait (ne jamais oublier le «look» insiste-t-elle !), un collier à double rang en perles blanches terminé par le brillant d’une petite croix, la diva dispense généreusement et énergiquement son cours à deux sopranes et un ténor (Françoise Tison-Meens, Nathalie Labry et Claude Minich). Le temps de raconter en deux actes toute la révolution callassienne commencée en 1949 avec le triomphe de la cantatrice qui remplace au pied levé Margherita Carosio, à la Fenice de Venise, dans Elvira des Puritani, alors qu’elle a été engagée pour y chanter la Brunhilde de Die Walkyrie ! L’étendue et la robustesse de sa voix, ainsi que la sûreté de sa technique vocale lui permettaient de passer avec un égal bonheur de la Constance de Mozart et des rôles de Gluck à ceux de Verdi et Puccini. À cela s’ajoute la noblesse des attitudes, la science du geste, la justesse expressive du style et bien sûr cette stupéfiante colorature vocale d’une grande diversité. Sans oublier ses dons innés de tragédienne qui ont littéralement fasciné Luchino Visconti (qui la comparait à la Duse) ainsi que Franco Zeffirelli. Elle a régné sans partage jusqu’en 1958 sur les plus grandes scènes lyriques du monde et c’est souffrante qu’elle n’a pu terminer Norma en présence du président de la République Giovanni Gronchi. Après cela commence un inexorable déclin vocal, dû au surmenage, à la vulnérabilté psychologique de la cantatrice et surtout à son déboire amoureux avec l’armateur grec. Il est dit qu’aucune prima donna n’a connu pareil engouement depuis la Malibran et la Patti. C’est un peu tout cela, comme des braises incandescentes, que revit sous les feux de la rampe à travers les propos de celle qui fut l’incomparable et cruelle Médée de Pasolini. Odieuse, impériale, irrésistible, féroce, pointilleuse mêlant moments d’humour et crise d’autorité, tigresse blessée et cantatrice sublime et d’une exigence sans rémissions, la Callas, tyrannique, didactique, outrancière, chaleureuse, blessante, nostalgique, reine en exil et cœur en écharpe, virtuose même dans ses petites phrases aux dards acérés qui ne laissent de répit à rien ni à personne, terrorise, hypnotise, fascine ses élèves et son public qu’elle met délicieusement à contribution dans une performance menée tambour battant à travers la présence d’une Marie Laforêt débordante de vitalité et d’émotions. Côté cour, les applaudissements, les fleurs, la gloire. Côté jardin : le travail acharné, les incertitudes de la voix, le trac. Pour ce sujet, à la curiosité jamais assouvie, on reprend les confidences livrées à Elle en février 1970 où celle qui assuma avec une souveraine «élégance» la pitoyable tournée en compagnie de Guiseppe di Stefano s’explique sur les secrets de son art et de son personnage «mythifié» en ces termes : «Suis-je une diva ? Oui, et j’en suis ravie ! Mais dans le bon sens : la diva, c’est celle qui apporte l’exemple d’un travail, d’une discipline et d’une grande maîtrise du métier. Mais on a souvent fait de moi une diva dans le mauvais sens… La gloire est dangereuse, parce que je sais très bien que je ne peux pas toujours être à la hauteur de ce qu’on attend de moi. Je fais mon travail le plus sérieusement possible, mais je suis un être humain». Humaine sans nul doute, car l’émotion et l’humour étaient constamment au rendez-vous de cette œuvre au brio percutant.
Une pièce de théâtre originale et intense signée Terrence McNally (d’après une adaptation d’Erna Hurli Collins), sobrement mise en scène par Didier Long et inspirée des «Master Classes» sur les plus grands airs du répertoire lyrique, donnés par Maria Callas à la fin des années soixante à la Julliard School of Music de New York. Pour les fervents belcantistes et les...