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Actualités - REPORTAGES

CINÉMA - Premier film universitaire en 16 mm réalisé par Hady Zaccah et produit par l'Iesav "Les mille et mille nuits" ou l'imaginaire au service d'un engagement politique et identitaire

Les mille et mille nuits* (Alf layla… wa ya layali) n’est pas la énième version du célèbre conte arabe, mais bien le premier court-métrage universitaire en 16 mm. Tout chaud sorti de la boîte à montage, ce docu-fiction offre au spectateur une version des Mille et une nuits adaptée à la réalité d’aujourd’hui. Histoire de rafraîchir un imaginaire dont on s’est trop éloigné, Hady Zaccak, auteur réalisateur de ce 15 minutes, nous replonge dans l’atmosphère fantasmagorique de Shéhérazade, princesse arabe qui, pour éviter le funeste sort que lui réservait son époux, le souverain Shéherayare, lui raconte des histoires qui se poursuivent de crépuscule en crépuscule. Sauf que là, notre princesse modifie le récit, mélangeant plusieurs personnages des différents contes originaux. Et alors que, dans les Mille et une nuits, l’intelligence et la finesse de la jeune femme lui valent mansuétude et clémence, dans Les mille et mille nuits, les traîtrises et les lâchetés n’en finissent pas de s’enchaîner, provoquant maintes désillusions. «Il était une fois…», commence à raconter la belle Shéhérazade (Myrna Maakaron), assise aux pieds de son souverain et époux. La voix chaude, l’élocution claire, elle dévide, en arabe, le fil des histoires. Ce sont, ainsi, les premières phrases des contes des Mille et une nuits qu’elle récite. Avec d’abord Aladin qui découvre la lampe magique. Mais tout se gâte quand il la perd. Il arpente alors les souks, la recherchant sur les étagères encombrées des marchands. Malchance ou roublardise, l’Israélien réussit à acquérir la lampe sous le nez et à la barbe d’Aladin. De son côté, Ali Baba, qui trouve le sésame pour ouvrir les robinets de pétrole et par là même les vannes de gros sous, vient en aide au pauvre Aladin. Alors que Sindbad, pour sa part, chevauche les océans, plaidant la cause de l’infortuné. Mais rien n’y fait. Et notre homme qui n’a plus qu’une tente pour toit et le désert pour vaste pays, prend les armes. L’adversité s’acharnant sur Aladin, il est même contraint, au bout du compte, de pactiser avec l’ennemi. Les portraits que brosse Hady Zaccak sont caricaturaux et satiriques. L’originalité du film résidant essentiellement dans l’idée d’utiliser les contes des «Mille et une nuits». Histoire de l’histoire Les mille et mille nuits a été écrit «l’année passée, à l’occasion du cinquantenaire de la nakba du peuple palestinien et de la création de l’État d’Israël, indique Hady Zaccak. J’étais révolté de voir que, du côté israélien, il y avait une sorte d’unanimité autour des festivités, alors que du côté arabe, c’était le vide ou presque». Il décide donc d’axer son projet de maîtrise sur cette lutte israélo-arabe. «J’ai voulu mélanger fiction et réalité. Puiser dans l’imaginaire arabe et l’adapter à aujourd’hui». Il se lance donc dans l’adaptation du texte, «dont j’ai emprunté de larges extraits auxquels je n’ai apporté aucune modification», précise-t-il. «Cette œuvre contient tout notre imaginaire. Une richesse dont nous nous sommes considérablement éloignés. Il n’y a plus de mythe, plus de rêve arabe», affirme-t-il. Pour Hady Zaccak, c’est un idéal, une identité autour de laquelle il dit souhaiter voir les peuples de la région se retrouver. «Le monde est un village, affirme-t-il, on a besoin d’une identité. La nôtre peut être construite sur une langue et une histoire communes». Pour Hady Zaccak, le cinéma dans nos contrées ne peut qu’être engagé. «Contrairement à l’Occident, le cinéma chez nous a un rôle à jouer» insiste-t-il. «Nous avons des problèmes d’identité et le 7e art doit inciter à la réflexion». Pour ce faire, «nous devons avoir une approche honnête de la réalité». Il s’insurge contre «les films coup de poing». «Toutes ces productions qui mettent en scène un super héros arabe, style Rambo, qui défait le vilain gringalet israélien et l’écrase par sa force». Cette vague qui a connu ses heures de gloire à la fin des années soixante semble aujourd’hui réinvestir les salles obscures. Koulouna Fidaiyoun (Nous sommes tous des Fedayyins) de Gary Garabédian est l’un des plus célèbres films réalisés au Liban en 1969. «La dernière production en date, indique Hady Zaccak, est le film égyptien, Fatat min Israïl (Une fille d’Israël)». Étalage de muscles et histoire de trahisons parfumée à l’eau de rose, telle semble être la solution adoptée par le cinéma arabe. Et c’est bien ce qui désole la jeune génération. Avec Les mille et mille nuits, Hady Zaccak raconte la réalité politique d’un monde arabe auquel il s’identifie. «Il ne sert à rien de se cacher derrière notre doigt», affirme-t-il. Aline GEMAYEL
Les mille et mille nuits* (Alf layla… wa ya layali) n’est pas la énième version du célèbre conte arabe, mais bien le premier court-métrage universitaire en 16 mm. Tout chaud sorti de la boîte à montage, ce docu-fiction offre au spectateur une version des Mille et une nuits adaptée à la réalité d’aujourd’hui. Histoire de rafraîchir un imaginaire dont on s’est trop...