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Actualités - CHRONOLOGIE

SOCIÉTÉ - Frénésie de déménagement le1er juillet Ces nomades de Montréalais

Les touristes en restent bouche bée et la ville en est toute congestionnée, mais chaque 1er juillet de l’année, tout Montréal est frappé d’une frénésie du déménagement. En cette première journée de juillet, presque le cinquième du million d’habitants que compte la deuxième plus grande ville du Canada déménage sous un nouveau toit. Le chaos qui en résulte est patent, d’innombrables camions de déménagement obstruant les rues de cette ville insulaire baignée par le fleuve Saint-Laurent. Dans certains quartiers en vogue, les gens déménagent dans une maison sur deux, certains ne déplaçant leurs pénates que quelques portes plus loin. Un étrange jeu de «chaises musicales» s’ensuit, le nouvel arrivant devant attendre que l’ancien occupant libère les lieux. «Si jamais cela arrivait à New York, ça serait l’enfer», observe Steve Verras, vice-président de l’agence immobilière new-yorkaise Thompson Kane Realty. À la différence des résidents de grandes capitales comme Paris ou New York, les Montréalais sont touchés par une forme de «nomadisme» qui les poussent à changer régulièrement de logis, parfois aussi souvent que chaque année. Et par une tournure inexpliquée de l’Histoire, ces nomades modernes ont adopté le 1er juillet comme date fétiche pour déménager. «La moitié de la population de la ville a déménagé au cours des cinq dernières années», indique Danielle Dionne, du service d’habitation de la ville de Montréal. La forte concentration de déménagement à cette date est une bénédiction pour l’industrie de la location de camions, qui n’hésite pas à doubler ou trip ler ses tarifs aux alentours du 1er juillet. Soudainement, des parents éloignés possédant une camionnette redeviennent très populaires. La fièvre du déménagement, qui frappe, alors que Montréal est envahi par les touristes attirés par les nombreux festivals, force aussi les compagnies d’électricité et de téléphone à appeler en renfort des centaines de travailleurs pour effectuer les nouveaux raccordements. Une tradition écossaise? Alors que le soleil se couche sur Montréal, les camions de déménagement laissent le pavé aux véhicules de livraison des restaurants, essentiels pour nourrir les parents et amis venus donner un coup de main. Le festival du déménagement de Montréal, qui a des échos dans le reste de la province, à majorité francophone, laisse les sociologues pantois. Certains expliquent ce phénomène par le penchant des Québécois pour l’incertitude, évident dans le débat politique sur l’indépendance de la province qui fait les manchettes depuis quarante ans. D’autres croient que le grand nombre de logements inoccupés peut inciter les Montréalais à tenter de trouver un toit plus confortable. Le taux d’inoccupation des logements montréalais oscille autour de 5 %, alors qu’il est de moins de 1 % à Toronto, la plus grande ville canadienne. «Les trois quarts de Montréalais sont locataires, et ceux-là déménagent plus facilement que les propriétaires», souligne Danielle Dionne, ajoutant que les immigrants et les étudiants forment également des groupes sociaux moins sédentaires. Un Montréalais sur quatre est né à l’extérieur du Canada, et plus de 200 000 étudiants vivent dans la région métropolitaine de quelque 3,4 millions d’habitants. Une équipe de télévision de la BBC est même venue 10 jours à Montréal l’été 1998 pour tourner un documentaire sur cette folie du déménagement. Les chercheurs n’ont trouvé aucune explication concluante au phénomène, sinon un lien avec une vieille tradition écossaise voulant que chaque 1er mai, les gens avaient le droit de dénoncer leur bail pour trouver un meilleur logis. Les immigrants écossais au Québec auraient importé cette tradition, qui a été déplacée au 1er juillet afin de ne pas perturber l’année scolaire des enfants. Une autre explication est beaucoup plus politique. Le 1er juillet est en effet jour férié en raison de la fête nationale du Canada. Au Québec, où près de la moitié de la population s’est prononcée pour la souveraineté de la province lors du référendum de 1995, les festivités sont assez discrètes. «En ce jour de la fête du Canada, la meilleur chose qu’un Québécois puisse faire, c’est de déménager», résume Jean-Nicolas Champagne, un étudiant de 25 ans en enseignement du théâtre qui arbore fièrement un chandail orné de la fleur de lys, emblème national du Québec.
Les touristes en restent bouche bée et la ville en est toute congestionnée, mais chaque 1er juillet de l’année, tout Montréal est frappé d’une frénésie du déménagement. En cette première journée de juillet, presque le cinquième du million d’habitants que compte la deuxième plus grande ville du Canada déménage sous un nouveau toit. Le chaos qui en résulte est patent,...