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Actualités - ANALYSE

La chambre actuelle est le produit d'une loi bancale Le changement tributaire des prochaines législatives

Cinq mois depuis l’avènement du présent régime. Ce n’est pas beaucoup. Mais c’est assez pour cerner la coloration, et les capacités du nouveau pouvoir. Pourra-t-il vraiment créer, à partir d’une anarchie chronique et de mentalités rétrogrades, l’État des institutions dont il se proclame le champion ? La bonne renommée du président de la République finira-t-elle par habiller l’État lui-même ? Le régime saura-t-il être fort sans user de la force, cette arme des faibles ? Trouvera-t-il dans des institutions qu’il n’a pas forgées, l’armée exceptée, l’instrument adéquat pour exécuter ses plans ? Des questions qui ont l’air plutôt spécieuses. Mais qui impliquent, à y regarder de près, des données politiques précises, des rapports de force déterminés. On ne s’étonnera pas dès lors d’entendre un néo-loyaliste avouer ingénument que «le changement voulu ne pourra en pratique intervenir qu’avec l’émergence d’une Chambre issue d’élections aussi libres que propres, organisées à l’ombre d’un code qui assure l’égalité de droits de tous les votants ainsi qu’une saine représentation des différentes composantes de la collectivité et de ses générations». Une façon assez claire de souligner que la législature actuelle, qui est le produit d’une loi électorale bancale, n’est pas vraiment à la hauteur et ne peut servir de courroie de transmission utile pour la transformation du Liban en un État de droit et des institutions. C’est aussi, assez visiblement, une pierre dans le jardin des principaux chefs de blocs parlementaires, dont les présidents Nabih Berry et Rafic Hariri. Cependant, le loyaliste cité pousse l’idéalisme un peu trop loin en affirmant que le futur Parlement «pourra librement exercer ses prérogatives démocratiques de base, légiférer comme il l’entend, contrôler les actes du gouvernement, lui réclamer des comptes, sanctionner un ministre ou même renvoyer tout le Cabinet dans ses foyers le cas échéant en votant la défiance». C’est en effet oublier que le système issu de Taëf ne permet pas à la Chambre, pour hostile qu’elle puisse se montrer à l’égard d’un gouvernement, de l’obliger à la démission, s’il n’y a pas dans ce sens de mot d’ordre des décideurs. Cette personnalité, qui laisse donc de côté la question capitale du vrai pouvoir de décision, insiste ensuite sur un point de droit. À son avis, avec une Chambre qui aura enfin trouvé sa vocation de censeur impartial «il n’y aura plus besoin de recourir aux organismes de contrôle administratif et à la justice ordinaire pour traiter éventuellement le cas de ministres qui auraient failli et se seraient laissé corrompre. En effet, ils passeraient automatiquement sous les fourches caudines des députés et leur procès serait aussi politique que décisif. De plus la présence d’une Assemblée ferme serait évidemment d’une grande utilité préventive et il n’y aurait probablement plus de scandales, de détournement de deniers publics, de gaspillage, de gabegie, de clientélisme et de dilapidation. Cela sans compter que, le cas échéant, les sanctions commenceraient à pleuvoir au niveau du Conseil des ministres qui peut révoquer un ministre fautif, le traduire en justice ou saisir la Chambre de son cas». Ce loyaliste regrette ensuite que «le rôle de contrôle effectif de la Chambre, voire la mission d’autocensure que le Conseil des ministres doit assumer par rapport à l’intégrité de ses membres aient été jusque-là bloqués. Sous prétexte que les circonstances ne permettaient pas la révocation des ministres ou leur mise en minorité par l’Assemblée.» Des «circonstances» qui, rappelons-le, étaient éloquemment baptisées «lignes rouges» par les taëfistes, très soucieux de ne rien faire sans l’aval de leurs patrons. Si un tournant est en train d’être abordé, ce dont il faut tirer espoir, c’est essentiellement parce que le nouveau régime jouit de la confiance de tous et a reçu pour ainsi dire carte blanche pour moraliser un peu le domaine public. Le tout est de savoir si l’essai va pouvoir être transformé, comme on dit au rugby, pour déboucher vraiment sur une réalisation politique essentielle : l’émergence d’un État de droit. Et des institutions.
Cinq mois depuis l’avènement du présent régime. Ce n’est pas beaucoup. Mais c’est assez pour cerner la coloration, et les capacités du nouveau pouvoir. Pourra-t-il vraiment créer, à partir d’une anarchie chronique et de mentalités rétrogrades, l’État des institutions dont il se proclame le champion ? La bonne renommée du président de la République finira-t-elle...