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Actualités - REPORTAGES

Loisirs - Les nageurs d'hiver n'ont pas peur de se mouiller La mer, cet éternel compagnon (photos)

À l’heure où les Libanais, dans leur écrasante majorité, sont encore au lit, bien au chaud, un petit groupe d’irréductibles sportifs est déjà dans l’eau. Georges, Osman, Mohammad, Kamil et Waël plongent, depuis des années, dans la mer glacée de l’hiver. Ils ne font relâche que les dimanches. Histoire de passer quelques heures avec la famille… Leur journée commence tôt. À 6 heures du matin, ces incorruptibles nageurs sont déjà debout. Ils s’échauffent au pas de course sur le trottoir de Manara. Une demi-heure plus tard, serviettes et shampooing sous le bras, ils se dirigent vers le centre balnéaire Ajram. Traversant un dédale de couloirs et de salles sombres, ils atteignent une petite terrasse en béton qui surplombe la mer. Aucun accès à la plage n’est visible… pour une personne qui ignore l’endroit, du moins. Osman, le chef du groupe des cinq, se penche par-dessus le bord de la terrasse et ajuste une échelle en bois contre le mur sur lequel se détache, en gros caractères verts et jaunes, le nom du centre balnéaire, Masbah Ajram lilsayidat (centre balnéaire Ajram pour les femmes), ainsi que quelques slogans. Les uns après les autres, ils enjambent le parapet de la terrasse, descendent l’échelle en position instable et plongent dans la mer. Pour eux, la natation est un exercice vital, «aussi important que la nourriture», affirme Kamil, 25 ans. «Je nageais en été et faisais de la plongée sous-marine», poursuit-il. «Une fois, j’ai tenté la natation hivernale. J’ai aimé la sensation produite par le contact de l’eau. Depuis, je n’ai plus arrêté. Ça va faire bientôt un an. C’est mon pain quotidien». Une fois en mer, le rituel impose cinq minutes de jeux «enfantins». Ils s’éclaboussent les uns les autres, font les fous, puis effectuent quelques longueurs près d’un semblant de jetée. De temps en temps, un éclat de rire fuse dans l’air et vient troubler le paisible silence de la ville à moitié endormie. Ils nagent par amour pour ce sport. Mais aussi car la natation a ses aspects bénéfiques. «C’est une excellente thérapie pour les maux de dos et pour la circulation sanguine», précise Osman, 41 ans. Osman nage, toute l’année, depuis l’âge de 9 ans. Il n’a pas arrêté un seul jour, même pendant la période de guerre, sous la pluie torrentielle des obus. Par contre Waël, 20 ans, qui ne nage quotidiennement que depuis un an et demi, est devenu un adepte de cette activité, devenue hivernale, pour des raisons médicales. «J’avais subi une opération à la jambe et le médecin m’avait conseillé de faire de la natation», explique-t-il. De thérapie, la nage est devenue presque une profession. Actuellement, Waël s’exerce régulièrement deux fois par jour, «le matin, pour maintenir la forme physique. Les après-midi, je m’entraîne pendant une heure et demie pour le championnat», précise-t-il. Une dose de «morphine» salutaire Pour certains, ce sport s’est vite transformé en une accoutumance. S’ils ratent un jour, ils se sentent en manque. C’est notamment le cas de Mohammed, 34 ans. «La natation, c’est ma morphine», avoue-t-il. Et de poursuivre : «Si un jour passe sans que je ne plonge dans l’eau, je me sens en manque. Mon corps me gratte et je ne me sens vraiment bien dans ma peau que lorsque je suis en contact avec la mer. Toute ma fatigue se dissipe alors. J’oublie pour quelques instants tous mes soucis. Se lier d’amitié avec la mer est une chose importante. La mer ne fait pas peur. C’est une bonne amie. C’est d’ailleurs une excellent thérapie psychique et physique». Mohammed nage depuis dix-huit années. «J’ai été obligé d’arrêter pendant une certaine période à cause d’une intervention chirurgicale. Mais depuis 6 ans j’ai repris d’une façon régulière». Quant à Georges, 40 ans, c’est un habitué. Ancien maître-nageur, il pratique quotidiennement ce sport depuis deux ans et demi. «Même quand la mer est très agitée», souligne-t-il. «Dans de pareilles situations, nous nageons à l’abri des vagues hautes», note-t-il. «Nous prenons nos précautions. De toute façon, ça ne sert à rien de prendre des risques pour une chose vécue au quotidien. Si on rate une journée de nage ce n’est pas la fin du monde. D’ailleurs, Osman, notre chef, ne nous laisse pas nous aventurer». À 7 heures, ils sortent de la mer et, pleins de vigueur, ils remontent vers la terrasse. Waêl, devance le groupe et se précipite pour puiser un sceau d’eau glacée d’un bassin situé dans un coin de la terrasse et… il verse le contenu sur Georges. «Georges déteste l’eau froide», indique-t-il. «À ce rythme-là, il finira par la supporter». Osman, Kamil, Mohammed et Waêl se dirigent vers le bassin. Ils prennent, durant quelques minutes, une douche spartiate. Un quart d’heure plus tard, ils quittent le centre balnéaire, se lancent les mots d’adieu habituels et reprennent chacun leur chemin. La ville, toujours égale à elle-même, se réveille sous les regards nouveaux de ceux qui ont fait de la mer leur éternel compagnon.
À l’heure où les Libanais, dans leur écrasante majorité, sont encore au lit, bien au chaud, un petit groupe d’irréductibles sportifs est déjà dans l’eau. Georges, Osman, Mohammad, Kamil et Waël plongent, depuis des années, dans la mer glacée de l’hiver. Ils ne font relâche que les dimanches. Histoire de passer quelques heures avec la famille… Leur journée commence tôt. À...