Tribune

En survolant le Journal officiel de la République libanaise que je parcours de temps en temps, mes yeux ont accroché par hasard une loi No 7 relative à la modification de cet article 562 du Code pénal sur l’excuse absolutoire des crimes dits d’honneur qu’on devrait appeler d’horreur. Quelle ne fut ma déception en lisant les quelques lignes du nouveau texte. J’ai pensé à ce comité formé il y a 25 ans de Mes Laure Moghaizel, Abdallah Lahoud et moi-même, faisant campagne pour la modification de cet article ; j’ai pensé à toutes les avocates, les associations, les juristes qui avaient œuvré dans ce domaine; j’ai pensé à tous les efforts, les requêtes, les lettres, les démarches, les réunions faites pour obtenir cette modification... qui a abouti au même texte, avec un mot de changé, au lieu de l’excuse absolutoire, l’excuse atténuante. De plus, cette excuse reste accordée non seulement au mari, mais aussi au père, grand-père et frère de la femme. On constate que cet article modifié reste en contradiction avec les droits de l’être humain et comporte une discrimination préjudiciable aux femmes, qu’il est une incitation au meurtre donnant aux hommes seuls le droit d’être juges et qu’il est plus conforme à le mentalité actuelle, le Code pénal étant un code vivant qui doit s’adapter au chargement du monde moderne. Et dire que dans la plupart des pays arabes, l’excuse atténuante est depuis longtemps seule en vigueur et seulement en faveur de l’époux – le Liban gardant dans son Code pénal ce honteux héritage d’un passé qui faisait de la femme un être mineur. Quelle triste victoire! C’est une défaite, un échec, une déroute, aurait dit Laure Moghaizel, qui a tant combattu pour les femmes... Elle voulait que cet article soit complètement supprimé. Mais connaissant le pays, elle avait proposé un texte de rechange ainsi conçu: «Bénéficie de l’excuse atténuante l’époux ou l’épouse qui surprend son conjoint en flagrant délit d’adultère et se rend coupable d’homicide ou de lésion sans préméditation». Il faudra peut-être attendre 25 ans pour que ce texte soit adopté. Et pour que les facteurs humains, tels que la misère et l’illettrisme, soient éradiqués...