Rechercher
Rechercher

Actualités - REPORTAGES

Municipalités - Moukhtara, un havre vert Des fonds pour le développement, la probité pour l'administration(photos)

Il est jeune, tenace, et occasionnellement révolté. Le président de la municipalité de Moukhtara, M. Roger Achi, qui a fraîchement débarqué sur la scène publique et qui s’est acquitté de ses premières tâches municipales, a déjà fait le tour de la question, tirant les leçons des bévues commises par les ministères concernés sur le plan du mode de financement des entités locales. Mais, il faut dire que les habitants de Moukhtara sont plutôt chanceux. Car leur municipalité, contrairement à d’autres, a réussi à contourner en partie le problème du manque des fonds, en sollicitant «ailleurs» des aides diverses. Refusant de nous dévoiler l’origine de ces aides, qui se répartissent entre dons privés et contributions du secteur public, Roger Achi expose fièrement les projets de développement du village déjà mis en route, dont celui de l’épuration de l’eau de source et de son exploitation de manière à assurer en permanence les besoins de la localité. Le projet d’installation des filtres permettra ainsi, d’ici un an, «d’avoir une eau des plus propres». La seule installation des filtres coûtera 60 millions de LL, une somme reçue à titre de donations et qui reste en dehors du budget municipal. Le même mode de financement s’applique pour le reste des projets de développement : celui, par exemple, de la réfection de la route principale de Moukhtara avec les trottoirs adjacents (140 millions LL), l’embellissement de la place de l’église, du Majles druze, l’installation de pavés sur certaines routes du village (30 millions LL), et enfin la réfection des vieux escaliers qui relient les différents quartiers du village (30 millions LL), le tout dans un esprit de respect du patrimoine et du cachet rustique qui caractérise Moukhtara. La municipalité n’a fait qu’appliquer, dans ce domaine, les recommandations faites lors du congrès des municipalités du caza du Chouf qui s’est tenu en août dernier, où les responsables municipaux de la région s’étaient alors mis d’accord sur les grandes lignes à suivre sur le plan de l’environnement, de la préservation du patrimoine, de l’urbanisme et de la question sempiternelle de la décentralisation. Lourdeur administrative Sur cette question, Roger Achi s’étend longuement. Car, non seulement il reprend le leitmotiv de l’absence d’autonomie et d’un espace de liberté, mais il dénonce également la lourdeur administrative caractérisant toutes les démarches qui passent obligatoirement par la hiérarchie traditionnelle, caïmacam, mohafez et enfin ministère des Affaires municipales et rurales, lesquels échelons doivent tous donner leur aval pour permettre au projet soumis de se concrétiser. Cette procédure, non seulement retarde l’exécution des tâches les plus simples, comme l’installation d’une ligne téléphonique, l’achat d’une photocopieuse ou d’un ordinateur, mais elle assujettit les municipalités à l’autorité centrale qui va, elle, imposer ses propres fournisseurs et donc ses propres prix pour ce qui concerne les équipements requis. «L’installation de spots lumineux pour assurer l’éclairage dans une localité donnée coûtera, par le biais de l’État, 500 000 LL la lampe, alors qu’elle ne vaut pas plus de 225 000 LL sur le marché», explique M. Achi, qui dénonce l’existence d’une véritable ristourne à ce niveau. Une première solution peut déjà être trouvée à ce problème, dit-il et qui est de relever le plafond des dépenses dont le président de la municipalité peut légalement disposer. En effet, ce plafond étant de 350 000 LL (233 dollars !) par facture, il a été proposé dernièrement qu’il soit augmenté de 1 800 dollars, pour permettre au président de la municipalité d’effectuer des dépenses urgentes sans passer par toute une série de signatures. Ceci peut constituer une solution momentanée avant de parvenir à une véritable décentralisation, qui pourra libérer les entités locales de l’emprise de l’autorité centrale. Mais avant même d’engager le débat sur la question des municipalités, il faudra peut-être commencer par éclaircir l’énigme autour des fonds des municipalités qui se sont volatilisés, lesquels fonds, une fois restitués, pourront déjà assurer une bonne part d’autonomie aux municipalités. Car cette autonomie, on ne le répétera jamais assez, passe nécessairement par l’indépendance financière. Et comme le disait l’ancien ministre M. Walid Joumblatt il y a quelque temps, les deux questions sont étroitement liées. Car jusque-là, le budget (ou ce qui en restait ) était dépensé «comme le veulent les patrons de la politique», affirme M. Joumblatt, en faisant référence au fameux pourcentage de 75% retenu (de façon illégale d’ailleurs) par la Caisse municipale autonome. Lui, n’a toutefois pas attendu que la municipalité de son village natal perçoive sa part des deniers en projets de développement, mais il s’est lancé très tôt déjà dans une politique de mécénat qui avait pour cible l’environnement et la culture. L’écologie en priorité Près de 25 000 arbustes sont plantés tous les ans depuis une décennie dans la région du Chouf, dont 4 000 pour le seul village de Moukhtara, une véritable politique de reforestation qui explique la prolifération des espaces verts dans cette partie du Liban. M. Joumblatt a déjà mis en chantier la construction d’un Club House, une sorte de havre sportif et culturel destiné aux habitants de la région. Conscients de leur chance, du fait des dons dont ils bénéficient, les «Moukhtariens» participent à cette solidarité locale en se soumettant de bon gré au payement de leurs taxes municipales, dont certaines (comme la valeur de location) ont d’ailleurs été augmentées de manière progressive. Cette solidarité est également exprimée par le refus du président et de son Conseil municipal de toucher une rémunération quelconque, alors même qu’elle est autorisée par la loi. «C’est un choix tout à fait personnel», explique Roger Achi qui recommande par ailleurs que les rémunérations prévues pour les fonctionnaires et présidents de municipalités soient relevées afin de ne pas exposer ces derniers à la tentation et «pour éviter les dérapages», comme il dit. Décidément, ce sont les mots de «transparence» et «probité» qui reviennent souvent sur la bouche de cette nouvelle génération de respondables municipaux, dont M. Achi fait partie.
Il est jeune, tenace, et occasionnellement révolté. Le président de la municipalité de Moukhtara, M. Roger Achi, qui a fraîchement débarqué sur la scène publique et qui s’est acquitté de ses premières tâches municipales, a déjà fait le tour de la question, tirant les leçons des bévues commises par les ministères concernés sur le plan du mode de financement des entités locales....