Rechercher
Rechercher

Actualités - CHRONOLOGIE

Souvenir - Un ouvrage exhaustif est consacré à l'ancien ministre Maurice Gemayel, à la taille des cèdres(photo)

Rêveur, utopiste ? Cet homme avait les pieds sur terre plus que quiconque. Un ouvrage nouvellement publié vient de lui être consacré. L’édition luxueuse, une admirable couverture, d’abondantes illustrations, un travail relativement exhaustif, c’était le moins qu’on puisse faire pour rendre hommage à Maurice Gemayel. Le livre, réalisé à l’initiative de sa fille aînée Mona, a le mérite de mettre la pensée et les projets de cet ancien ministre des Finances (en 1960, sous la présidence du général Fouad Chéhab), puis du Plan (sous la présidence de Charles Hélou), à la portée de la nouvelle génération, de lui permettre d’en mesurer l’importance et de s’en inspirer (*). Phalangiste de la première génération, Maurice Gemayel était aux antipodes de ce que la caricature politique a tenté de faire de ce parti. Son patriotisme n’avait rien d’«isolationniste», mais se conciliait parfaitement avec une ouverture d’esprit, un esprit de tolérance et un humanisme qui n’ont jamais été pris en défaut. La rigueur intellectuelle et une insatiable curiosité, doublées d’une capacité extraordinaire de synthèse, la compassion, sur le plan social, la tendresse sur le plan humain complètent le portrait de cet homme à la taille des cèdres, de ce député dynamique (du Metn, dès 1960) , parti trop tôt. À côté d’«idées» qui peuvent faire sourire, comme ce réseau de tapis roulants conçu pour Beyrouth, Maurice Gemayel a élaboré, en homme de planification et de méthode, des projets parfaitement crédibles, tels celui du percement d’un tunnel sous le Mont-Liban pour relier la côte à la Békaa. Le projet est toujours d’actualité, quoi qu’on en dise. Les millions qu’on devra mettre sur le percement de l’autoroute arabe, sans parler des expropriations et des crises sociales que ce projet soulève, sont là pour le prouver. Pour bien moins de trafic auto et de tonnage de fret, les Européens ont percé le tunnel sous le Mont-Blanc, puis le tunnel sous la Manche. Du reste, certaines des vues futuristes de ce Jules Vernes libanais qui inventait un projet par jour se sont avérées singulièrement fertiles. Vingt-huit ans après sa mort, le Centre des sciences de l’homme dont il souhaitait la création, à Jbeil, a finalement vu le jour. La place manque pour répertorier les projets de Maurice Gemayel. Certains élaborés, d’autres tout à fait schématiques. Pour l’essentiel, son plan de développement conçu pour le Liban reposait sur les données géographiques et géologiques d’un pays-carrefour. Partant de la nécessité d’exploiter adéquatement les ressources hydrauliques, Maurice Gemayel remontait de là vers le réseau routier et les structures institutionnelles, dans leurs diverses ramifications : économique, sociale, fiscale, juridique et politique. Il pensait que le confessionnalisme politique était facteur de stabilité, mais redoutait son exploitation à des fins politiques. Il anticipait la globalisation des échanges et les défis que cela constituait pour des conceptions «périmées» de souveraineté, mais pensait que cela se ferait sous l’égide de l’Onu. Et qui dit développement dit émancipation des hommes et des esprits des résidus d’une mentalité médiévale, et entrée de plain-pied dans le mouvement de démocratisation de la vie publique. Plusieurs décennies après la mort de Maurice Gemayel, on en est encore à balbutier sur certains des projets qu’il brossait à grands traits. Voilà un homme qui, s’il avait été écouté, aurait épargné à nos oreilles bien de discours sur la nécessité d’un «développement équilibré» des régions. Directeur de la FAO, entre 1965 et 1969, sait-on encore que l’homme a été l’un des créateurs du Centre d’études palestiniennes (1963), et du Conseil du Sud (1970). La mort de Maurice Gemayel elle-même a quelque chose de «moderne». C’était le 17 octobre 1970 et, pour la première fois dans l’histoire du Liban, les caméras de télévision filmaient les circonstances du vote de confiance au gouvernement des «jeunes» présidé par Saëb Salam. À son tour de parole, Maurice Gemayel se dirige vers la tribune, puis s’effondre. Le 31 octobre 1970, à l’âge de 60 ans, il s’éteignait, laissant derrière lui de solides projets, des dizaines d’ébauches et un vide que nul n’a su combler. (*) Grands du Liban – Maurice Gemayel – Librairie du Liban - publications.
Rêveur, utopiste ? Cet homme avait les pieds sur terre plus que quiconque. Un ouvrage nouvellement publié vient de lui être consacré. L’édition luxueuse, une admirable couverture, d’abondantes illustrations, un travail relativement exhaustif, c’était le moins qu’on puisse faire pour rendre hommage à Maurice Gemayel. Le livre, réalisé à l’initiative de sa fille aînée Mona, a...