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Actualités - ANALYSE

L'insoutenable légèreté ...

Bizarre ! L’éventualité d’un retrait de l’Armée du Liban-Sud de Jezzine semble terroriser le gouvernement au lieu de le réjouir. N’est-ce pas pourtant pour libérer la terre occupée qu’une génération de Libanais a versé son sang et que des centaines de femmes ont pleuré leurs fils et leurs maris tombés au champ d’honneur ? Il est affligeant de constater avec quelle maladresse, voire quelle légèreté, le gouvernement traite le dossier de Jezzine. Il ne suffit pas de se réfugier derrière le refrain du «piège israélien qu’il faut éviter» pour convaincre l’opinion publique de sa lucidité et de sa clairvoyance. On ne désamorce pas un piège en restant inactif, en disant la chose et son contraire en l’espace de 24 heures et en ressassant une pitoyable rhétorique dans l’attente d’un signal émanant de telle chancellerie ou de telle capitale. Au premier coup d’œil, le problème paraît simple à cerner. Démoralisée, affaiblie, incapable de défendre ses positions, l’ALS n’a d’autre choix que la fuite. Au lieu de saluer cette victoire, car c’en est une, le gouvernement est pris de panique, comme un enfant abandonné au milieu de la foule. Il multiplie les déclarations contradictoires : mardi, le président du Conseil assure que l’État serait prêt à combler le vide en cas de repli ; le lendemain, le ministre de l’Information déclare que «l’armée ne sera pas entraînée» dans cette affaire. «Que l’ennemi se retire et nous exposerons nos plans. Nous n’allons pas abattre nos cartes», ajoute, mystérieusement, le porte-parole du gouvernement. Mais de quelles cartes s’agit-il ? «Le Liban réagira à un retrait total de tous les territoires occupés conformément à la résolution 425 (…). Nous ne nous laisserons pas entraîner dans le jeu israélien. C’est nous qui prendrons les initiatives (…)», déclare el-Khalil. Brillante stratégie. Il suffisait d’y penser… D’abord, Jezzine n’est concernée ni de près ni de loin par la 425. Cette région a en effet été occupée en 1982 dans le sillage de l’invasion israélienne et l’ennemi n’y maintient pas une présence directe permanente. Ensuite, nous avons cru comprendre que le Liban n’était plus tellement attaché à la mise en œuvre de cette résolution : le président de la République, le général Émile Lahoud, n’a-t-il pas affirmé dans son discours d’investiture, et à plusieurs autres occasions, que les retraits du Liban-Sud et du Golan devraient être simultanés ? Du moins a-t-il eu le mérite d’exprimer tout haut le fond de sa pensée. Voilà la véritable position officielle du Liban. Dans ce cas de figure, la résistance n’est plus destinée à libérer le Sud, mais à contraindre Israël à conclure un accord global qui porterait aussi sur le Golan occupé. On comprend, dès lors, d’où vient le désarroi du gouvernement. En se retirant unilatéralement et sans négociations préalables avec Damas, Israël chercherait à dissocier les volets libanais et syrien. Cela, évidemment, le Liban ne peut pas l’accepter. Pour des raisons de principe d’abord : l’occupation du Liban-Sud est un des résultats du conflit israélo-arabe dont la solution ne peut être que globale. Pour des raisons pratiques ensuite : la Syrie ne se laissera pas isoler sans réagir. Et le Liban n’a aucun intérêt à contribuer à l’isolement de Damas. Les plaies de l’accord du 17 mai et des événements tragiques qui ont suivi ne sont pas encore cicatrisées. Il est vrai que la position du gouvernement n’a rien de confortable. Mais sa maladresse et sa légèreté n’ont fait que compliquer la situation. Au train où vont les choses, il ne manquerait plus qu’il supplie Israël de ne pas procéder à un retrait unilatéral. Du jamais-vu dans l’histoire. Pourtant, les choses auraient pu être plus simples. Cela fait quatre ans qu’Israël parle d’un retrait de Jezzine. Beyrouth et Damas auraient dû entre-temps se préparer à tous les scénarios. Ils pourraient agir au lieu de réagir. Ils pourraient tester les intentions de l’État hébreu au lieu de subir constamment ses ballons d’essai. Ils auraient dû aussi, et surtout, penser aux milliers d’habitants de la région de Jezzine. Beaucoup d’entre eux préfèrent aujourd’hui cohabiter avec le mal qu’ils côtoient, plutôt que de faire un saut dans un inconnu qui pourrait être pire.
Bizarre ! L’éventualité d’un retrait de l’Armée du Liban-Sud de Jezzine semble terroriser le gouvernement au lieu de le réjouir. N’est-ce pas pourtant pour libérer la terre occupée qu’une génération de Libanais a versé son sang et que des centaines de femmes ont pleuré leurs fils et leurs maris tombés au champ d’honneur ? Il est affligeant de constater avec...