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Actualités - CONFERENCES INTERNATIONALES

ONG - Séminaires sur les alternatives à l'emprisonnement Diversification de la réforme pénale et justice réparatrice

À l’initiative de l’Institut des droits de l’homme du Barreau de Beyrouth et dans le cadre d’un programme de collaboration avec le Comité de coordination pour l’action auprès des prisonniers (Cap), en faveur des réformes pénale et pénitentiaire au Liban, l’Association internationale de réformes pénale et pénitentiaire, Penal Reform International (PRI) a participé à la tenue de deux séminaires consacrés aux alternatives à l’incarcération. Cinq conférenciers étrangers ont contribué aux travaux de ces séminaires tenus à Beyrouth du 9 au 12 juin 1999 : trois magistrats français, MM. Rémi Heitz, Ludovic Fossey et Alzin Blanc, chargés de mission par le ministère de la Justice, M. Rob Allen, représentant d’une ONG britannique (Nacro) travaillant pour la réinsertion des délinquants et le président de PRI et M. Ahmed Othmani. PRI part du constat général que la réforme pénale est essentielle à tout bon gouvernement, que la prison est souvent utilisée de façon inconsidérée au lieu d’être le dernier recours comme le recommandent les textes des Nations unies et que les systèmes pénitentiaires sont partout en crise et doivent être par conséquent réformés. La contribution de PRI a été donc d’apporter son appui aux initiatives prises par ses partenaires libanais : le Barreau de Beyrouth et les ONG qui se mobilisent pour la réforme du système de justice et des prisons. Cette manifestation vise en particulier à promouvoir une nouvelle approche de l’administration de la justice favorable à la mise en œuvre de modèles et pratiques qui soient conformes aux normes internationales, adaptées et peu coûteuses ; qui mettent l’accent sur l’accès à la justice pour les plus démunis et qui encouragent et renforcent la coopération entre les organes gouvernementaux concernés, les praticiens et les organisations non gouvernementales. Les trois magistrats français ont présenté les peines et les mesures alternatives existant en France. Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, pour répondre tant à la surpopulation carcérale qu’au souci d’accroître l’efficacité de la peine et la sécurité publiques, ont été mises en place de nouvelles réponses pénales. Avant le jugement, il s’agit d’alternatives aux poursuites. Le procureur de la République peut décider de ne pas saisir le tribunal et de recourir à un avertissement ou à une procédure d’indemnisation de la victime effectuée sous son autorité et son contrôle. Le juge d’instruction peut pour sa part prononcer une mesure de contrôle judiciaire confiée à une association au lieu de recourir à la détention provisoire. Au moment du jugement, le tribunal lui-même peut décider d’une peine alternative à l’emprisonnement : il peut s’agir d’un Travail d’intérêt général (Tig) au bénéfice de la communauté, mis en œuvre avec le soutien d’une association ou d’une collectivité locale ou d’une mise à l’épreuve assortie de conditions précises (obligation de soins, de travail, d’indemnisation de la victime, ...), ou encore d’autres solutions ponctuelles (retrait du permis de conduire, interdiction d’émettre des chèques, ...). Enfin, pour les personnes détenues y compris pour des délits plus graves, des mesures permettent au juge de décider d’une sortie anticipée du condamné si celui-ci se plie à certaines contraintes. Bien acceptées par l’opinion Les intervenants français ont souligné que ces peines, inscrites par le législateur dans le code pénal, avaient été rendues possibles grâce au soutien des associations de défense des droits de l’homme et à l’adhésion des différentes professions concernées (policiers, magistrats, avocats, administration pénitentiaire...). Elles sont aujourd’hui bien acceptées par l’opinion publique, qui perçoit toute leur efficacité pour les délinquants comme pour la victime. Outre les économies qu’elles génèrent, ces solutions alternatives, qui évitent le prononcé de courtes peines d’emprisonnement aux effets déscolarisants, ont amené l’opinion, les décideurs publics et la société civile dans son ensemble, à s’intéresser davantage au système pénal. Le représentant de Nacro a décrit la manière dont la mesures de «diversion» et de justice réparatrice peuvent contribuer à la réduction de la population carcérale. En Angleterre, les petits délits commis par les catégories vulnérables (mineurs, personnes ayant des problèmes de santé ou d’intoxication à la drogue...), sont traités par d’autres moyens que le système de justice formelle. Cela peut être l’avertissement par la police accompagné ou non par un programme d’assistance et de conseil, de traitement médical ou psychologique qui aident à prévenir la récidive. Le programme peut aussi inclure des mesures de justice réparatrice, des méthodes de réponse au crime qui encouragent la réconciliation dans certaines conditions entre le délinquant et la victime et qui permettent d’arriver à un accord sur la manière de redresser les torts subis. Il peut s’agir de réunions de médiation mettant face à face les protagonistes et présidés par un médiateur indépendant, qui aide à convenir de la réparation que le délinquant doit faire. De tels meetings peuvent apporter la réconciliation et aider à oublier l’offense. À côté des alternatives connues (probation, travail d’intérêt général...) ou d’autres moins utilisées (obligation d’être chez soi à partir d’une certaine heure ou «couvre-feu» avec contrôle électronique, obligation de suivre un traitement de désintoxication pour les drogués, avec visites de contrôle), la justice réparatrice pourrait connaître un usage grandissant dans les prochaines années. Le représentant de PRI a présenté de son côté les grandes lignes de ce que pourrait être le rôle des ONG, des associations professionnelles et de la société civile en général dans la promotion et la mise en œuvre des alternatives à l’emprisonnement. Au-delà des spécificités, une collaboration efficace entre les acteurs institutionnels du système de justice pénale et la société civile est indispensable et est essentielle à réussite de l’œuvre commune. Cette collaboration est basée sur la complémentarité de ces institutions. Le rôle des ONG Les ONG, les associations professionnelles et les collectivités locales se caractérisent à cet égard par leur proximité par rapport aux victimes, aux délinquants et à leurs proches. Il en découlent les rôles suivants : 1. Un rôle de sensibilisation d’abord : les ONG sont insérées dans la collectivité. Elles peuvent contribuer efficacement à sensibiliser l’opinion, l’aider à adhérer à l’idée, la gagner à la cause. Elles doivent donc être encouragées à intégrer leurs programmes une dimension de sensibilisation de l’opinion publique, – par des débats publics, des séminaires, etc. 2. Un rôle d’encadrement, de contrôle et de conseil ensuite : grâce justement à cette proximité comme partie de la collectivité, les ONG sont mieux à même de placer et d’encadrer les délinquants faisant l’objet de mesures alternatives. Le suivi du délinquant est plus aisé dans la mesure où elles se rendent plus facilement sur leurs lieux de travail, auprès de leurs familles. La proximité permet aussi aux ONG d’encourager les délinquants à respecter les règles, de les aider à se réconcilier avec la victime, avec la collectivité et avec la loi. Elles agissent bien souvent comme conseil. Lorsqu’elles s’impliquent vraiment, et grâce encore à cette proximité, les ONG participent également avec beaucoup plus de facilité à s’assurer la collaboration des institutions de placement des délinquants. Elles sont également plus efficaces à rassurer, à calmer les inquiétudes, à trouver des solutions plus adaptées. 3. Un rôle incitatif à l’économie : par définition, les ONG sont fournisseurs de travail volontaire, bénévole, gratuit. Leur implication permet de minimiser les coûts. Elles sont plus rapides à mobiliser des ressources et compensent les délais d’une administration nécessairement plus lourde. Elles arrivent en général à fournir des services souvent très professionnels, rentables, de bonne qualité, plus souples, plus rapides, adaptés aux besoins et de la victime et du délinquant. 4. Un rôle de mobilisation des fonds : de plus, en offrant gratuitement leurs services, les ONG donnent à l’action de l’administration une plus grande capacité, plus d’ampleur et d’échos, ainsi que la souplesse nécessaire pour convaincre, présenter des succès et gagner l’adhésion des décideurs et bailleurs (ce faisant, elles mobilisent des fonds plus aisément que ne pourrait le faire l’administration). 5. Un rôle pionnier d’expérimentation : il est aussi admis que les ONG, à des exceptions près, ont l’avantage de pouvoir agir en dehors de tout cadre politique ou gouvernemental, en dehors des contraintes administratives, en dehors de la raison d’État. Grâce justement à cette autonomie, à l’esprit communautaire de volontariat, et à des fonds propres, les ONG peuvent donc utilement et plus facilement s’employer à l’expérimentation. Elles peuvent donc avoir quelques chances de convaincre et d’influencer bénéfiquement les politiques officielles.
À l’initiative de l’Institut des droits de l’homme du Barreau de Beyrouth et dans le cadre d’un programme de collaboration avec le Comité de coordination pour l’action auprès des prisonniers (Cap), en faveur des réformes pénale et pénitentiaire au Liban, l’Association internationale de réformes pénale et pénitentiaire, Penal Reform International (PRI) a participé...