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Actualités - CHRONOLOGIE

Arnoun, village fantôme à la lisière de la zone occupée (photo)

À part quelques vieux, une poignée d’enfants et des dizaines de chats errants, le village d’Arnoun au Liban-Sud est désert, figé dans le froid et la peur : retranchés sur une colline qui surplombe la bourgade, les Israéliens y ont rasé 14 maisons il y a quelques jours. Quelques amas de pierre d’où émergent des tiges métalliques tordues sont tout ce qu’il reste des maisons passées au bulldozer le 7 janvier, a constaté un journaliste de l’AFP. À portée de tir, le château de Beaufort, la forteresse croisée transformée en position militaire par Israël, étire ses imposantes ruines sur lesquelles flotte l’Étoile de David. Deux puissants projecteurs sont braqués sur le village, même en plein jour. Une route descend vers le village le long de la crête, protégée par de gros blocs de béton verticaux. «J’avais deux maisons sur la colline. Le 6 au soir, ça a bombardé sec. On est tous allés dormir ailleurs», raconte Mohammad, un chauffeur de taxi de 60 ans. «Voilà ce qu’il en reste», dit ce père de huit enfants en montrant les gravats à flanc de colline. Le 28 décembre, un commandant israélien avait déjà rasé sept maisons. «Il y avait encore 35 familles, il n’en reste plus que 26», affirme le mokhtar d’Arnoun, Afif Hamdane. «Les destructions ne datent pas d’hier. Ça a commencé en 1987», raconte-t-il. Dans les ruelles étroites, plus une voiture ne peut circuler depuis 1985. À la suite d’un attentat à la voiture piégée en 1984, l’accès principal au village a été barré par un épais remblai de terre hérissé de gros blocs de béton. Depuis, tout se transporte à dos d’homme ou en brouette, comme ces lourds bidons de mazout qu’une femme frigorifiée se presse de rentrer chez elle. En hiver, le village grelotte sous 50 cm de neige. Le seul véhicule qui a peut-être une chance de pouvoir circuler est l’unique tracteur du village, si des négociations entamées il y a deux semaines par la Croix-Rouge internationale (CICR) et l’Armée du Liban-Sud (ALS) aboutissent. Les gens d’Arnoun survivent essentiellement de l’agriculture : tabac, blé, oliviers. «Comment voulez-vous qu’on s’en sorte?. Ils (les Israéliens ou l’ALS) détruisent aussi les champs et les oliviers depuis des années, et l’État ne nous indemnise pas», tonne Abdallah. «L’État et le monde entier se fichent de nous», bougonne une septuagénaire. «À part le CICR et quelques journalistes, personne ne vient nous voir. On nous dit de rester mais ils ne font rien pour nous aider», fulmine un vieillard. L’État paraît effectivement absent dans ce qui fut autrefois une bourgade de 7 000 habitants et qui en compte aujourd’hui moins d’une centaine. «J’ai la trouille jour et nuit», dit Samira, la quarantaine, condamnée à rester ici pour soigner son père. «Moi, je veux partir, me marier, vivre quoi! Je tremble à chaque fois que les Israéliens ou les types de l’ALS viennent ratisser les rues du village en tirant par terre», dit Mona, 20 ans. Arnoun a été pratiquement déserté en novembre. Et pourtant quelques personnes s’accrochent encore, donnant un mince filet de vie au village fantôme, dont le silence n’est troué que par le bruit sec d’une mitrailleuse lointaine ou celui, plus lourd et plus proche, de l’artillerie israélienne. Il reste tout de même une école avec 4 écoliers, dont l’équipement est dérisoire : quelques tables, un tableau, un vieux dictionnaire français-arabe éventré, une clochette en cuivre pour sonner la fin de la classe. Il n’y a peut-être que ces enfants, protégés par leur insouciance, qui n’ont pas peur à Arnoun.
À part quelques vieux, une poignée d’enfants et des dizaines de chats errants, le village d’Arnoun au Liban-Sud est désert, figé dans le froid et la peur : retranchés sur une colline qui surplombe la bourgade, les Israéliens y ont rasé 14 maisons il y a quelques jours. Quelques amas de pierre d’où émergent des tiges métalliques tordues sont tout ce qu’il reste des maisons...