Quand Madeleine et Evguéni rejouent West Side Story

L’Américaine Madeleine Albright et le Russe Evguéni Primakov ont interprété hier soir à Manille un duo d’amoureux transis sur l’air de West Side Story, devant les ministres de l’ASEAN hilares. Les réunions ministérielles annuelles de l’ASEAN (Association des nations du sud-est asiatique) et de leurs partenaires occidentaux se terminent traditionnellement par un dîner où chaque délégation doit présenter un sketch ou une chanson. L’an dernier, Mme Albright avait fait sensation en interprétant le grand air de la comédie musicale Evita déguisée en Madonna. Cette année, tout de blanc vêtue, une rose dans les cheveux, elle était Maria dans un remake intitulé «East-West Story», donnant la réplique à un Primakov coiffé d’une casquette de marin russe, selon un compte-rendu donné par des membres de la délégation américaine. Le nouveau texte de la chanson America avait été truffé d’allusions plus ou moins subtiles à l’élargissement de l’OTAN ou aux essais nucléaires indiens et pakistanais. «J’élargis l’OTAN jusqu’en Hongrie», lance Albright. «C’est l’erreur du siècle», lui répond Evguéni. Ou encore: «En Inde, ils aiment faire la bombe... le Pakistan fait de même, c’est un comble...». Un des couplets se moque du manque de charisme du futur premier ministre japonais Keizo Obuchi, qui n’assistait pas au dîner: «Aussi excitant qu’une froide pizza... il a un air de Mona Lisa». Au final, les deux bandes rivales, les Yankees et les Ruskies, ont entonné en chœur «Tonight, Tonight». Cette prestation, à laquelle la presse n’était pas conviée, «a fait un tabac», a affirmé un diplomate américain. Une cassette pirate a permis aux journalistes de constater que Madeleine et Evguéni, malgré une incontestable complicité, n’étaient pas prêts de détrôner Sinatra ou Céline Dion. La délégation indienne avait préparé une chansonnette au ton plus grinçant pour justifier les cinq essais nucléaires menés par New Delhi en mai: «Nous allons gagner, dit un couplet, rien ne peut plus nous arrêter... arrêtez de faire des chichis, parlons plutôt de Bikini» (île du Pacifique utilisée par les Etats-Unis pour des essais nucléaires). (AFP)