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Actualités - REPORTAGE

Les femmes dans la mêlée municipale Nada Sehnaoui : des idées et beaucoup de conviction pour humaniser la capitale

Une artiste-peintre lancée dans la bataille des municipales? Mme Nada Sehnaoui s’étonne qu’on puisse lui poser la question. Selon elle, toutes les volontés doivent s’associer pour que Beyrouth redevienne une cité à visage humain. Car, pour l’instant, ce n’est qu’une jungle de béton, où chaque jour, l’espace-nature et les lieux de rencontre se réduisent comme une peau de chagrin. Mère d’un garçon de onze ans, Abdallah — que la candidature de sa maman amuse d’ailleurs énormément — elle est particulièrement consciente de l’importance des espaces verts et publics, afin que les enfants puissent respirer, se détendre et être en contact avec leur ville. Militante écologique, essayant depuis un an de créer un groupe de pression pour lutter contre la pollution, Mme Sehnaoui a beaucoup d’idées pour améliorer la vie quotidienne des Beyrouthins. Elle les a d’ailleurs exposées dans un tract, distribué dans la plupart des quartiers de la ville. S’adressant directement à l’électeur, Nada Sehnaoui explique son programme à travers des questions directes qui peuvent paraître élémentaires, mais qui montrent à quel point, à Beyrouth, les habitants manquent de tout. En dépit de son apparence fragile, Mme Sehnaoui ne manque pas de détermination lorsqu’il s’agit de défendre son point de vue. Brusquement, ses yeux s’animent et sa voix, habituellement douce, devient forte. Elle sait qu’entre la liste du pouvoir et celle de l’opposition, il y a peu de place, pour les indépendants, mais elle veut quand même mener la bataille, «parce que tout vaut mieux que de rester les bras croisés, à se lamenter sur son sort». Et surtout parce qu’elle espère, en présentant son programme, participer à l’éducation de l’électeur. «D’une part, il prendra l’habitude d’exiger à l’avenir des programmes et d’autre part, il se familiarisera avec des projets d’utilité publique». La candidate Sehnaoui milite ainsi pour l’adoption d’une législation réduisant le prix de l’essence sans plomb (le plomb étant très nocif et polluant) et obligeant les vendeurs de voitures à n’importer au Liban que les véhicules munis de catalyseur (filtre) qui réduit la toxicité de certains produits. «Ces législations sont passées aux Etats-Unis depuis 30 ans. Et si elles peuvent paraître onéreuses, en réalité, elles feront faire des économies au Trésor public et aux citoyens, puisque la santé coûte cher au Liban». Ceinture piétonne Mme Sehnaoui projette aussi de planter entre un et deux millions d’arbres à Beyrouth. «C’est tout à fait faisable, dit-elle, et ce n’est pas seulement destiné à embellir l’environnement. Les arbres absorbent la pollution et, en hiver, ils réduisent le froid, alors qu’en été, ils atténuent la chaleur. En conséquence, les habitants utiliseront moins leurs chauffages ou leurs climatiseurs et consommeront moins d’énergie». La candidate propose aussi de fermer certaines artères à la circulation, le dimanche, de manière à créer «une ceinture piétonne» permettant aux gens de se déplacer dans les rues, de faire du vélo ou des patins, en toute sécurité. «Naturellement, il faut étudier cela sur une carte, afin de ne pas provoquer des bouchons. Mais de la sorte, la rue deviendra une fête et un lieu de rencontre pour les Beyrouthins de toutes les confessions et de toutes les classes sociales». Mme Sehnaoui pense qu’ainsi, les gens des classes défavorisées pourront offrir des loisirs agréables et peu coûteux à leurs enfants, alors que pour l’instant, il n’y a ni terrain de jeux, ni jardins publics suffisants pour les absorber. En artiste-peintre, attirée par tout ce qui est beau, elle compte aussi décorer certaines rues, en peignant joliment les rideaux de fer des magasins. «Cela permettrait de donner une âme à une rue grise et impersonnelle. Si je suis élue au conseil municipal, je ferai en sorte que la peinture soit offerte par la municipalité. Sinon, il faudra solliciter les commerçants eux-mêmes...». Mme Sehnaoui connaît quelques peintres, dont elle-même, que l’idée intéresse et qui seraient prêts à travailler bénévolement. Des projets de ce genre, simples et réalisables, Mme Sehnaoui en a beaucoup, car elle a longuement réfléchi à la manière d’améliorer les conditions de vie dans la capitale. Et c’est parce qu’elle y a beaucoup pensé qu’elle a décidé, il y a quelques jours, de présenter sa candidature au conseil municipal. Certes, elle aimerait bien être élue, et elle estime que jusqu’à présent, et dans la mesure de ses moyens, les Beyrouthins ont favorablement accueilli son projet, mais elle n’abandonnera pas la lutte en cas d’échec. «Je compte continuer à éveiller les Beyrouthins sur leur droit à un cadre de vie plus sain. J’estime d’ailleurs que les candidats qui ne présentent pas de programme, manquent de respect à leurs électeurs». Mais y a-t-il une place pour les indépendants comme elle (et ses colistiers), dans la bataille ultra-politisée qui se jouera dimanche à Beyrouth? «On verra bien, dit-elle avec un sourire. J’espère qu’on laissera les gens choisir librement et on ne peut pas déjà faire des pronostics, surtout qu’il n’y a pas eu d’élections municipales depuis 35 ans». Ne croit-elle pas que dans une bataille de cette importance, les gros intérêts écraseront les petits? «Si l’on pense ainsi, on n’agit plus. Or, moi, je ne veux pas me croiser les bras. Si chacun assume sa part de responsabilité, aussi petite soit-elle, les choses finiront par changer».
Une artiste-peintre lancée dans la bataille des municipales? Mme Nada Sehnaoui s’étonne qu’on puisse lui poser la question. Selon elle, toutes les volontés doivent s’associer pour que Beyrouth redevienne une cité à visage humain. Car, pour l’instant, ce n’est qu’une jungle de béton, où chaque jour, l’espace-nature et les lieux de rencontre se réduisent comme une...