Rechercher
Rechercher

Actualités - CONFERENCES ET SEMINAIRES

Séminaire sur l'ordre public à l'USJ Eddé : l'Etat doit assurer la protection des droits des faibles

Un séminaire juridique sur le thème de «L’ordre public: Aspects nouveaux» est actuellement organisé à l’Université Saint-Joseph (USJ) par l’Association Henri Capitant des amis de la culture juridique française, sous le patronage du ministre de la Justice, Bahige Tabbarah. Ce séminaire a commencé hier et durera jusqu’au 28 mai. Les dernières «Journées libanaises» avaient été organisées en 1974, à la veille de la guerre. Celles-ci se caractérisent par une participation aussi massive que variée de juristes venant de plusieurs pays du monde. L’ordre public sera étudié sous quatre angles différents lors de ce séminaire: au niveau de l’économie, des relations de famille, des relations de travail et des procès. Hier, la séance d’inauguration a eu lieu, en présence de M. Michel Eddé, ministre de la Justice par intérim en l’absence de M. Tabbarah qui a subi une opération chirurgicale aux Etats-Unis, du RP Sélim Abou, recteur de l’USJ, de M. Daniel Jouanneau, ambassadeur de France, M. Philippe Malinvaud, président de l’Association Henri Capitant, M. Pierre Gannagé, président du groupe libanais de l’Association, et M. Richard Chémaly, doyen de la Faculté des droits et des sciences politiques de l’USJ. Dans son allocution, M. Eddé a insisté sur l’intérêt des «contributions des honorables et distingués participants, qui portent sur les aspects nouveaux de l’ordre public tels qu’ils sont perçus ou appliqués dans certains pays d’Occident, où l’évolution des moeurs et des relations économiques, familiales et sociales ont connu et connaissent encore un développement et même un bouleversement dont les conséquences restent encore inconnues, sinon incertaines à ce jour». Et d’ajouter: «Je pense que nous devons tirer profit de nos expériences mutuelles, tant en Occident qu’en Orient, pour que la notion d’ordre public qui est en évolution et en mutation de plus en plus accélérée en Occident, parvienne à concilier la nécessité d’établir et de préserver l’ordre nécessaire au fonctionnement satisfaisant d’une société juste et équilibrée, avec l’exercice indispensable des libertés, dans le maintien de la cohésion du tissu social». M. Eddé a par ailleurs souligné que «dans le domaine de l’économie et des relations du travail, l’Etat doit, par le biais de réglementations impératives d’ordre public, assurer la protection des droits des faibles». «De son côté, la notion d’ordre public dans les relations de famille connaît une évolution, pour ne pas dire une révolution, qui pourrait heurter les croyances ou bouleverser les traditions de peuples ou de groupements sociaux ou religieux fermement attachés au maintien de la cellule familiale et au rôle qu’elle a joué dans la préservation du tissu social», a-t-il dit. Selon M. Eddé, «l’effondrement des valeurs et la très grave recrudescence de la criminalité chez les jeunes générations en particulier, sont perçus par certains comme les conséquences de l’affaiblissement ou de la désintégration de la cellule familiale. Beaucoup continuent à penser que si l’instruction est dispensée à l’école, l’éducation devrait en grande partie rester assurée par les parents au sein de l’environnement familial». M. Eddé conclut: «A une époque où l’explosion démographique dans certains pays ou certains continents, ainsi que les problèmes économiques et sociaux qui en découlent, provoquent des mouvements et des déplacements de populations d’une ampleur inconnue jusqu’à ce jour et, à l’heure où des pays dont les populations ont, de tout temps, été homogènes, doivent faire face aux problèmes posés par la présence sur un même territoire d’autres populations de culture et de civilisation très différentes, il est indispensable que la notion d’ordre public dans les relations de famille tienne compte de ces données nouvelles pour permettre une convivialité réelle dans le respect et l’acceptation de l’Autre, sans laquelle nos sociétés seraient exposées à des secousses et à des bouleversements graves». Autres allocutions Pour sa part, M. Malinvaud, rendant hommage au groupe libanais et à son président, M. Gannagé, demeurés actifs au sein de l’Association en dépit des événements qui ont déchiré le Liban, a exprimé son immense plaisir d’être de nouveau à Beyrouth. L’importance de l’assistance revêt, selon lui, une double signification: un signe de la présence toujours effective de la culture juridique française, et l’affection que les juristes francophones ressentent pour le Liban. M. Gannagé a souligné, quant à lui, que l’Association Henri Capitant retrouve aujourd’hui un Liban en pleine reconstruction tant dans le bâtiment que dans le domaine de la culture. «Si une nation pluraliste trouve la source de sa richesse dans l’approfondissement de sa culture, le caractère pluraliste de cette même nation la rend plus sensible aux contacts extérieurs», a-t-il affirmé. «C’est donc naturel que le Liban trouve dans la communauté francophone un lieu privilégié au développement de ses échanges, notamment juridiques», a-t-il poursuivi. Il a ajouté que l’ordre public, plus particulièrement, serait une de ces notions permettant de manifester, face à une inflation législative, les originalités des droits des pays d’Orient et de souligner en même temps leurs points de convergence avec les droits occidentaux. D’autre part, M. Chémaly a rappelé qu’«il y a près de 25 ans, en mai 1974, les premières journées libanaises de l’Association Henri Capitant se sont déroulées à l’USJ». Il a évoqué le fait que depuis cette date, et malgré «les années de cendre», le Liban a toujours participé aux journées annuelles de l’Association. «C’est ainsi que, sous le double signe de la fidélité et de la continuité, le Liban reçoit les congressistes venus témoigner que l’Association Henri Capitant, à la fois soucieuse d’universalité et respectueuse des particularités, est un creuset de civilisations», a-t-il conclu. Ordre public dans l’économie Après la séance d’inauguration, M. Fayez Hage-Chahine, professeur à l’USJ, a présenté le rapport libanais général rédigé par M. Ghaleb Mahmassani. Chaque délégation présentera d’ailleurs son propre rapport national. M. Hage-Chahine a commencé par donner une définition originale de l’ordre public. Selon lui, l’ordre public est une norme, fondée sur des raisons d’ordre religieux, moral, politique, social et économique, jugées indispensables à l’organisation et la sauvegarde de la société, qui impose le commandement qu’elle contient ou qui évince tout acte de volonté, toute décision ou toute autre règle qui lui est contraire. Il a constaté ensuite que par «aspects nouveaux de l’ordre public» il ne faut pas comprendre «métamorphoses» ni «déclin». Les aspects nouveaux de l’ordre public, selon les différents rapports nationaux, se ramènent à l’idée de «renouveau dans la continuité», il y aurait ainsi en la matière, deux constantes (l’ordre public demeure d’un côté une notion indispensable, et de l’autre une notion relative qui varie avec l’espace et le temps) et deux changements (le premier changement est constaté au niveau de la perception de l’ordre public; il est perçu aujourd’hui comme étant le protecteur de la liberté et non plus son opposé. Le second changement a évolué en deux sens opposés: le retour aux sources, en ce sens qu’il redevient protecteur des hommes pas du Prince; et le dépassement des frontières en ce sens qu’il se débarrasse de plus en plus de son particularisme et s’ouvre sur l’universalisme). M. Hage-Chahine, synthétisant les différents rapports nationaux, s’est attelé ensuite à la tâche de vérifier la présence de ces deux constantes et ces deux changements en envisageant successivement la primauté de l’ordre public sur la volonté individuelle, sur la règle de droit et sur la décision juridictionnelle. La séance de l’après-midi du lundi 25 mai a été consacrée aux débats pendant lesquels les différents rapporteurs nationaux de l’Argentine, de la France, de l’Italie, du Liban et de la Turquie, ont fait part de leurs observations et ont exposé les particularismes de leurs systèmes juridiques nationaux, notamment en ce qui a trait à l’examen des tendances actuelles de l’ordre public sur le plan du droit des sociétés, du droit bancaire, du droit de la consommation et de la concurrence.
Un séminaire juridique sur le thème de «L’ordre public: Aspects nouveaux» est actuellement organisé à l’Université Saint-Joseph (USJ) par l’Association Henri Capitant des amis de la culture juridique française, sous le patronage du ministre de la Justice, Bahige Tabbarah. Ce séminaire a commencé hier et durera jusqu’au 28 mai. Les dernières «Journées libanaises»...