Bateaux en bouteille

Le musée du bateau en bouteille de Port-en-Bessin, en France, œuvre d’un passionné, visible dans le Calvados depuis deux ans, cherche les moyens de subsister faute d’une clientèle suffisante pour venir admirer une collection unique. Installé à proximité du port de pêche de Port-en-Bessin, le plus grand de Normandie, le musée du bateau en bouteille a du mal à attirer les foules: 4.700 entrées en deux ans, «c’est peu dans une région qui attire tant de touristes sur les plages du Débarquement», déplore Paul Leguedey, créateur du musée et botéliste passionné. Pourtant, une fois poussée la porte du musée – qui ressemble de l’extérieur à un pub anglais – l’admiration est souvent au rendez-vous pour les familles venues découvrir les 140 bateaux exposés derrière les vitrines. «Mais comment font-ils pour faire rentrer le bateau?», demande une fillette. La question est aussi ancienne que les bateaux en bouteille, apparus au milieu du siècle, lorsque le verre est devenu translucide. «Le botéliste veut réaliser quelque chose de beau devant lequel on se demande toujours comment c’est possible», explique Paul Leguedey. Bar-bu, d’allure imposante, cet homme de 58 ans, qui arbore à l’oreille un anneau de pirate, a contracté sa passion au contact d’un bateau en bouteille légué par son grand-père. Brocanteur de profession et «seul paysan – terrien – d’une famille de marins» cherbourgeois, il a mis en bouteille et amassé une collection impressionnante de bateaux. Le refuge des marins restés à quais. Tous ont été réalisés à la main, selon des techniques traditionnelles de pliage: les pièces sont préparées à côté de la bouteille, les voiles sont repliées et montées grâce à des fils tirés de l’extérieur du goulot. Un art dans lequel excellaient les cap-horniers qui faisaient du bateau en bouteille «car ce qui comptait, c’était de passer le temps». Les marins tricotaient même les capuchons de laine qui ferment les récipients. Ex-voto Une grande partie des bateaux présentés à Port-en-Bessin sont l’œuvre de marins passionnés, comme celui qui a signé sa bouteille d’une dédicace sans équivoque: «Lud Lefort t’a vidée, t’a remplie, on est quite». Les marins ne mettaient pas en bouteille que des bateaux. Certains réalisaient des ex-voto. Un autel porte ainsi la mention: «En remerciant Dieu de m’avoir sauvé». Paul Leguedey parle avec beaucoup d’émotion de «ses» bateaux. Il raconte l’histoire du «Sébastien-Laurent» qu’il a mis en bouteille à la demande d’une famille de Barneville-Carteret qui voulait voir reproduire ce chalutier disparu en mer avec son équipage en 1987. Il y a aussi ces bateaux créés par des marins retraités nostalgiques. Après tout, «le bateau en bouteille, c’est le refuge des marins qui restent à quai», disait Jacques Prévert. Paul Leguedey se donne encore un an pour renflouer son musée. A partir de la saison prochaine, au prix de quelques cloisons abattues, les bateaux seront visibles de l’extérieur. «L’entrée sera gratuite, les gens donneront ce qu’ils veulent», assure-t-il. (AFP)