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Actualités - CHRONOLOGIE

Kirienko a une semaine pour former une équipe qui devra faire des miracles

Le nouveau premier ministre russe, Sergueï Kirienko, doit former d’ici la fin de la semaine un gouvernement qui devra tenter d’imposer à un président tout-puissant, un Parlement hostile et un pays méfiant une politique de rigueur pour sortir la Russie du gouffre Juste après sa victoire vendredi soir, le jeune technocrate de 35 ans, qui n’était encore il y a un peu plus d’un mois qu’un ministre débutant, annonçait qu’il présenterait dès mardi au président Boris Eltsine les grandes lignes de sa future équipe. De la formation de ce nouveau gouvernement on n’attend guère de surprises. Tout juste quelques indications: le retour ou non d’Anatoli Tchoubaïs, patron des privatisations et jusqu’à récemment chef de file des libéraux. Celui, plus probable car M. Kirienko était son protégé, de Boris Nemtsov, étoile montante des réformateurs et l’un des possibles dauphins de Boris Eltsine. Et puis l’éventuelle arrivée de ministres issus d’une partie de l’opposition, dont le soutien de dernière minute vendredi se trouverait ainsi récompensé. L’ultranationaliste Vladimir Jirinovski expliquait sans ambages la semaine dernière qu’il était prêt «à voter «oui» en échange d’un ou deux postes de ministres, quitte à ce qu’on les mette dehors très vite s’ils se révèlent incompétents». Quant aux postes principaux, Intérieur, Défense, Affaires étrangères et Finances, Boris Eltsine a déjà laissé entendre qu’ils ne changeraient pas de mains. Mais la formation du gouvernement est de loin la plus facile des tâches qui attendent le nouveau premier ministre. Car si le vote de vendredi a mis fin à la crise politique ouverte par le brusque limogeage le 23 mars de Viktor Tchernomyrdine, M. Kirienko prend en main la direction quotidienne d’un pays en profonde crise économique et sociale. Pour en sortir, une seule solution, a-t-il martelé depuis un mois: une politique de rigueur budgétaire, avec un rouble fort et une réforme des marchés financiers. Mais il va trouver face à lui des adversaires de taille. La Douma tout d’abord, qui n’a fini par dire oui vendredi à celui qu’elle avait par deux fois jugé inacceptable que par ce qu’un député a appelé «l’instinct de conservation», face à la menace de la dissolution. Elle en sort humiliée, et aura à cœur de le faire payer au nouveau premier ministre. Elle ne peut le limoger sans provoquer sa propre perte, mais elle peut faire de chaque projet de loi une longue course d’obstacles, là où la situation exigerait en fait la rapidité. Moins visibles, mais plus puissantes et dangereuses, sont deux forces majeures. Tout d’abord les grands barons financiers, déterminés à garder, augmenter ou reprendre leur influence sur le gouvernement, et à préserver, ensemble, leurs intérêts corporatistes et, en se faisant la guerre, la position de leurs groupes respectifs. A la tête d’empires financiers qui dominent le pays et en contrôlent les médias, ils sont a priori favorables à un gouvernement réformateur, mais à condition que celui-ci ne tente pas trop d’échapper à leur influence. Et puis, dans les régions, le lobby mouvant mais incontournable des potentats locaux, politiques, fonctionnaires ou directeurs des énormes combinats hérités de l’URSS. Beaucoup d’entre eux reconnaissaient en Tchernomyrdine, l’ancien directeur soviétique du géant gazier Gazprom, l’un des leurs. Les relations seront moins faciles avec le jeune favori du FMI, qui pourtant aura besoin d’eux pour appliquer les décisions prises à Moscou. Face à tous ces puissants, il a pour l’instant un soutien de taille: celui de Boris Eltsine, qui vient de faire en un mois la démonstration éclatante de son pouvoir absolu. Mais le président russe a toujours, tout au long de sa carrière, laissé ses ministres seuls en première ligne dès que les décisions à prendre devenaient trop impopulaires. Face à un pays plongé dans la pauvreté alors qu’une petite oligarchie s’enrichit de façon spectaculaire, où les usines tournent au ralenti et où des millions de salariés ne sont plus payés, Sergueï Kirienko risque fort, lorsqu’il faudra annoncer de nouvelles restrictions budgétaires, de se retrouver très vite tout seul.
Le nouveau premier ministre russe, Sergueï Kirienko, doit former d’ici la fin de la semaine un gouvernement qui devra tenter d’imposer à un président tout-puissant, un Parlement hostile et un pays méfiant une politique de rigueur pour sortir la Russie du gouffre Juste après sa victoire vendredi soir, le jeune technocrate de 35 ans, qui n’était encore il y a un peu plus...