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Actualités - ANALYSE

Gouvernement - Les députés peuvent-ils s'en remettre au président élu ? Le caractère impératif des consultations en balance

Rien de plus simple, de plus clair qu’une loi fondamentale. En principe. Parce que, quand on veut, et dans les pays méridionaux, on veut souvent, on peut toujours couper les cheveux en quatre. «Interpréter», comme on dit. Et détourner la Constitution comme un vulgaire Taëf. Ainsi un «grave» débat prend forme aujourd’hui : un député a-t-il le droit de s’en remettre au chef de l’État pour la désignation d’un nouveau président du Conseil? Ne doit-il pas, par respect de la responsabilité qui lui est confiée par ses mandants – par le peuple –, choisir quelqu’un ou s’abstenir, exprimer en somme un avis propre? Impérativement,les consultations étant définies comme impératives dans la Constitution. Réponses très variées à cette question que nous avons posée aux présidents Berry, Husseini et Hoss ainsi qu’à nombre de députés et de juristes. Certains s’en tiennent à la lettre de l’article 53C ( Constitution). D’autres affirment qu’il faut en saisir plutôt l’esprit. Autrement dit interpréter. En se référant aux discussions des réunions de Taëf, donc selon eux aux intentions des législateurs. l Le président de l’Assemblée nationale M. Nabih Berry va loin dans l’abandon des prérogatives de cette institution, alors qu’on aurait pu en attendre le contraire. Il affirme en effet que le président de la République garde le droit de désigner un autre président du Conseil que celui choisi par la majorité parlementaire, si son analyse de la situation générale du pays le conduit à cette conclusion. Il s’agit donc d’une question d’opportunité. L’alinéa 2 de l’article 53C précise que le chef de l’État «désigne le président du Conseil en consultation avec le président de l’Assemblée sur la base de consultations parlementaires impératives et dont il tient ce dernier informé». M. Berry, presque plus royaliste que le roi, pousse le sacrifice jusqu’à soutenir que cette consultation entre les deux présidents ne porte pas sur la ratification des résultats des consultations parlementaires, qui n’ont pas besoin d’être analysées. Mais signifie au contraire que les deux hommes peuvent librement choisir entre eux un président du Conseil sans tenir compte de l’avis de la Chambre! On croit rêver. Aussi pour atténuer un peu l’effet de surprise, M. Berry se hâte de préciser que cette liberté entre gens de bonne compagnie s’exerce surtout quand les consultations parlementaires n’ont pas dégagé de majorité écrasante et que les candidats se retrouvent pratiquement à égalité. Ou encore –on y revient– si le nombre le plus élevé est celui des députés qui s’en sont remis au chef de l’État. l Le président Hussein Husseini, artisan des accords de Taëf et qui garde d’ailleurs par devers lui les minutes des réunions de cette conférence fondatrice, refuse de donner une réponse définitive avant de réexaminer ces mêmes procès-verbaux. Mais il laisse quand même entendre qu’il ne partage pas l’avis de M. Berry. Il reconnaît franchement qu’en instituant des consultations impératives pour les imposer au chef de l’État, on voulait parachever le transfert de l’autorité exécutive de la présidence de la République au Conseil des ministres. l Le président Sélim Hoss, tout aussi légaliste sinon plus, veut empêcher l’extension des pouvoirs de la présidence de la République par souci d’en préserver la quiétude. Il indique en effet qu’à son avis, il ne faut pas impliquer le chef de l’État dans les rivalités entre premiers ministrables, en l’amenant à préférer tel candidat à tel autre par le biais du paquet de voix que les députés lui auraient confiées. L’ancien chef de gouvernement estime qu’en tout cas on doit sauvegarder les formes légales et si des députés veulent faire plaisir au président de la République, ils n’ont… qu’à le consulter pour savoir qui ils doivent nommer! Le texte constitutionnel retourné, en somme. l C’est la même opinion que soutiennent le député M. Mohammed Youssef Beydoun et M. Hassan Rifaï, juriste et ancien député, pour qui un parlementaire ne peut faire procuration du mandat qui lui est confié. l Pour les mentors que sont MM. Fouad Boutros , Edmond Naïm et Nasri Maalouf, un député peut laisser au président de la République le soin de choisir. Ils estiment que c’est là aussi un choix en soi et que d’ailleurs le parlementaire peut ne pas avoir autant d’éléments d’appréciation que le chef de l’État. On peut estimer qu’il y a là une réponse à l’Ouest traditionnel, dans la mesure où ce sont les prérogatives de la présidence de la République qui sont en jeu. l Le vice-président de la Chambre M. Élie Ferzli répète que les députés sont libres de s’en remettre au président de la République puisque, autrement, les consultations seraient des élections qu’on pourrait tout aussi bien organiser place de l’Étoile. Même point de vue du juriste Émile Bejjani.
Rien de plus simple, de plus clair qu’une loi fondamentale. En principe. Parce que, quand on veut, et dans les pays méridionaux, on veut souvent, on peut toujours couper les cheveux en quatre. «Interpréter», comme on dit. Et détourner la Constitution comme un vulgaire Taëf. Ainsi un «grave» débat prend forme aujourd’hui : un député a-t-il le droit de s’en remettre au...