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Actualités - REPORTAGE

Grave pollution maritime et atmosphérique

Des milliers de tonnes de carburant dans l’eau, des émissions de fumée chargées de métaux lourds dans l’atmosphère, l’incendie, hier, du pétrolier maltais Giovanna au large de Dora constituent, selon Greenpeace, le plus grave désastre écologique au Liban. Le ministre de l’Environnement, M. Akram Chéhayeb, a estimé que les retombées de cette catastrophe se feront sentir pendant des années. Mais le représentant d’une société d’importation de dérivés pétroliers a pour sa part minimisé les répercussions de l’accident sur l’environnement. Le représentant de Greenpeace au Liban, Fouad Hamdane, estime que les conséquences de l’incendie du Giovanna sont plus graves que celles de l’explosion, pendant la guerre en 1989, des réservoirs de carburant de Dora. L’accident d’hier a provoqué une pollution atmosphérique et maritime, alors qu’en 1989, la pollution s’est limitée à des émissions toxiques. Le Giovanna transportait 26 000 tonnes de gazoline-essence. Sept mille tonnes avaient déjà été transférées dans les réservoirs de Dora lorsque l’incendie s’est déclaré, selon M. Chéhayeb, qui s’est rendu sur les lieux. Le tiers seulement a brûlé, une partie est restée dans les dépôts du navire et des milliers de tonnes se seraient déversées dans la mer, information que certaines sources ont démentie. Selon Fouad Hamdane, l’épaisse fumée qui a enveloppé pendant des heures Dora Achrafieh et d’autres quartiers de la capitale, contient des métaux lourds extrêmement toxiques comme le vanadium et le plomb, ainsi que des produits organiques chimiques comme les hydrocarbures aromatiques polycycliques. «Lorsque les particules refroidissent, elles retombent sur le sol, fait-il observer. Après sept heures d’incendie, Beyrouth a été recouverte par cette poussière toxique». Le militant écologiste confirme l’évaporation «au bout de quelques heures» d’une partie du carburant déversé dans la mer, précisant toutefois que des résidus toxiques contenant des métaux lourds très polluants «provoquent des ravages terribles dans la faune maritime». M. Hamdane déclare que la baie de Bourj Hammoud est la région la plus polluée du Liban. «Les sources de pollution sont nombreuses dans ce secteur, dit-il. Les égouts de Beyrouth et du Metn et les déchets industriels s’y déversent. Le dépotoir de Bourj Hammoud est situé dans la baie qui est par ailleurs polluée par le fuel des réservoirs». Greenpeace avait procédé, il y a deux ans, à des prélèvements d’eau dans ce secteur et les analyses effectuées avaient démontré l’existence d’importantes quantités de métaux lourds comme le mercure, le cadmium, le plomb et le vanadium. «Jusqu’à 50 mètres du rivage, il n’y a plus de vie sous-marine parce qu’il n’y a plus d’oxygène», dit-il. L’accident d’hier a aggravé la pollution et M. Hamdane a proposé d’interdire la pêche dans le périmètre pendant un ou deux jours, le temps de permettre à la nappe de carburant d’être diluée par les courants marins. Le représentant de Greenpeace estime que l’incendie du Giovanna pose le problème des centrales électriques fonctionnant au fuel et celui des normes de sécurité appliquées pour le déchargement du carburant. «La politique énergétique du gouvernement est obsolète, dit-il. Aujourd’hui, plus personne ne produit de l’électricité grâce au fuel. Pourtant au Liban, deux centrales fonctionnant à l’aide de ce carburant ont été construites après la guerre à Baalbeck et à Zahrani. Partout, le fuel est remplacé par le gaz ou l’énergie solaire». Le ministre Chéhayeb tient à peu près le même discours. «Cet accident va aggraver les problèmes dans une région qui souffre déjà beaucoup de la pollution, dit-il. Les retombées seront très négatives sur la faune marine». Le Dr Bernard Jerbaka, membre de la commission de l’environnement de l’Ordre des médecins et de la municipalité de Beyrouth, pense qu’il faudra des années pour effacer les traces de cet accident. Le responsable d’une société d’importation de carburant qui a requis l’anonymat qualifie de son côté d’ «excessivement sombre» le tableau brossé par MM. Chéhayeb, Hamdane et Jerbaka. Selon lui, la quantité de carburant qui s’est déversée dans la mer ne peut pas être précisée tant que le niveau des réservoirs du pétrolier n’a pas été vérifié. «Nous avons fait le tour du navire plusieurs fois et nous n’avons pas vu de nappes flottant dans le secteur, mais seulement des plaques de carburant, ajoute-t-il. De plus, l’écoulement est très lent et l’essence s’évapore au bout de 12 heures». Quoi qu’il en soit, l’accident du Giovanna pose de nombreux problèmes liés aussi bien à l’écologie, aux normes de sécurité qu’à la préparation insuffisante pour la lutte contre les catastrophes. Il rappelle également l’existence de régions sinistrées par la pollution et oubliées par l’État.
Des milliers de tonnes de carburant dans l’eau, des émissions de fumée chargées de métaux lourds dans l’atmosphère, l’incendie, hier, du pétrolier maltais Giovanna au large de Dora constituent, selon Greenpeace, le plus grave désastre écologique au Liban. Le ministre de l’Environnement, M. Akram Chéhayeb, a estimé que les retombées de cette catastrophe se feront...