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Actualités - INTERVIEWS

Environnement - Un entretien avec un expert allemand en traitement des déchets Une règle d'or pour en finir avec les ordures : trier et recycler

Cela coûte moins cher d’avoir de bonnes habitudes que de mauvaises… surtout en matière de traitement de déchets. C’est ce qu’on apprend en gros lorsqu’on discute avec M. Reinhard Schu, un expert allemand dans une compagnie spécialisée dans le traitement des déchets, «Deutsche Babcock», qui a bien voulu nous exposer la situation dans son pays, mais également nous parler des différentes techniques. Ce faisant, il a détruit bien des mythes auxquels on a toujours cru, ou voulu croire : celui qui dit que jeter des ordures dans un dépotoir coûte moins cher que s’en débarrasser par d’autres moyens… encore celui qui fait croire que l’incinération peut être sans danger si elle obéit à des règlements très stricts. Même en Allemagne, la question des déchets domestiques soulève encore des débats passionnés. Et pourtant, ce pays a suivi de près les évolutions successives dans ce domaine, étant lui-même un pionnier du traitement des ordures ménagères. Les solutions qu’il a adoptées : le tri à partir des maisons, le recyclage du plus grand nombre de déchets possible, des techniques avancées d’incinération et de compostage et la fermeture définitive des dépotoirs d’ici à l’an 2005. Mais, surtout, l’idée maîtresse du système adopté en Allemagne et dans d’autres pays d’Europe: la responsabilisation par le paiement d’une taxe mensuelle qui oblige les gens à se sentir concernés par le problème. Chaque maison a son conteneur Rien que des mesures impopulaires ! M. Schu confirme : «Quand on demande aux gens de trier leurs ordures à partir de la maison, ils n’aiment certainement pas ça, surtout s’ils habitent les grandes villes, dans des espaces exigus. Mais tout est une question d’habitude. D’ailleurs, comme ce n’est pas facile de séparer les matières organiques et les matières recyclables tous les jours, la solution que nous avons trouvée en Allemagne consiste à ramasser les ordures chaque semaine. Cela ne dérange pas, parce que chaque maison a son propre conteneur et qu’il fait moins chaud qu’ici. D’ailleurs, cela coûte moins cher». Quant au coût et à l’exécution des opérations, ils sont assumés par les municipalités qui les incluent dans leur budget et dans les taxes qu’elles imposent. Mais les rapides progrès techniques, nécessaires pour la protection de l’environnement, ne plaisent pas à tout le monde. «La décision de fermer les dépotoirs d’ici à l’an 2005 et de les remplacer par des techniques plus coûteuses a suscité des réactions passionnées de la part de certaines municipalités moins nanties que d’autres, notamment celles de l’ex-RDA», nous a expliqué M. Schu. Certes, le fait de participer aux frais de l’évacuation des déchets sensibilise non seulement aux problèmes écologiques, mais aussi à l’économie globale. M. Schu met en garde, à ce propos, contre le mythe selon lequel les dépotoirs coûtent moins cher que l’incinération par exemple : «En fait, si on calcule tous les frais relatifs au dépotoir comme le transport, le réaménagement… on trouve qu’ils coûtent finalement plus cher que d’autres techniques, bien que le dépotoir soit réputé moins coûteux. D’autant plus que c’est un fléau qu’on lègue aux générations futures. L’avantage avec l’incinération ou le compostage, c’est que le coût peut être déterminé facilement, et les taxes calculées en conséquence». Un processus très lent M. Schu poursuit : «En d’autres termes, avec l’incinération ou le compostage, les gens savent ce que leur coûte exactement l’évacuation des déchets. Ils deviennent plus favorables au recyclage par exemple, qui est une technique extrêmement rentable à la longue. Ils comprennent mieux également l’intérêt du tri des déchets à la source». Pour arriver à traiter efficacement les déchets, il faut suivre un processus qui est très lent. M. Schu nous explique le cheminement dans son pays: «Après la guerre, beaucoup de dépotoirs ont été créés en Allemagne. Nous avons alors reconnu la nécessité de réduire les déchets. Au début, nous avons essayé le compostage, en séparant les matières organiques (les plus polluantes) des autres. Mais le problème est que nous ne pouvions pas les vendre facilement parce que les matières métalliques ne pouvaient y être réduites. D’autres erreurs ont été faites, comme l’installation de bon nombre d’incinérateurs qui, sans mesures de protection, ont apporté leur lot de pollution». Et d’ajouter : «Mais l’Allemagne a fini par opter pour deux solutions radicales : d’une part réduire les déchets à la base, et, d’autre part, recycler le plus possible. Le recyclage devient facile d’ailleurs avec le tri. Aujourd’hui, seules les matières inertes sont enterrées dans les dépotoirs. Et la technologie avancée d’incinération, qui sera installée partout après la fermeture des dépotoirs, prévoit 5% de matières organiques et 95% de cendres». Prendre la peine de trier à la base et de recycler : quelle que soit la technique adoptée par le Liban par la suite, ces deux constantes seront les seules à nous permettre de réduire les ordures produites dans le pays. Mais cela demande deux choses : des législations plus fermes et une conscience de la part des citoyens du fait que le sort de la communauté est lié au leur. Un changement si radical de mentalité pourrait-il être initié, paradoxalement, par ce dont nous croyons nous débarrasser?
Cela coûte moins cher d’avoir de bonnes habitudes que de mauvaises… surtout en matière de traitement de déchets. C’est ce qu’on apprend en gros lorsqu’on discute avec M. Reinhard Schu, un expert allemand dans une compagnie spécialisée dans le traitement des déchets, «Deutsche Babcock», qui a bien voulu nous exposer la situation dans son pays, mais également nous...