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Actualités - ANALYSE

Vie politique - Taëf a haché menu les pouvoirs du chef de l'Etat Le nouveau régime pourra-t-il redorer le blason de la présidence ?

Parlons peu, parlons bien : Lahoud aura-t-il ou non «ses» ministres dans le prochain Cabinet ? À cette question, le premier cercle de proches avoue n’être pas encore en mesure de répondre… Autrement dit, on ne sait toujours pas si, sur le plan de la composition politique, la mise sur pied du nouveau gouvernement se fera sur la base traditionnelle du partage. A priori, même à l’ère du changement, il paraît difficile de changer d’entrée de jeu certaines règles, certaines coutumes. C’est ce qu’indirectement Omar Karamé indique quand il se félicite de ce que l’avènement du général va rétablir l’équilibre entre les pouvoirs. Entendre en faveur de la présidence maronite. Ce qui est, soit dit en passant, une attitude remarquable de fair-play venant de la part d’un pôle sunnite… L’équilibre des pouvoirs, en termes de Taëf, c’est un certain dosage de voix au sein du Conseil des ministres, instance qui détient l’autorité exécutive. On peut, dès lors, penser que le chef de l’État qui, lui, ne vote pas, devrait au titre de cet équilibre disposer au sein du Cabinet d’un certain nombre de ministres. Pour défendre ses vues ou bloquer le cas échéant les visées d’autrui. Par extension, on se demande si le nouveau chef de l’État sera le mentor, place de l’Étoile, d’un bloc parlementaire prêt à soutenir ses projets Pratiquement ce double contrôle serait utile. Mais certains pensent que le général Émile Lahoud préférerait se dégager complètement d’un tel système de micro politique, pour promouvoir une stature d’arbitre au-dessus de toute mêlée, de président pour tous les ministres comme pour tous les députés… Un vétéran parlementaire rappelle cependant que Taëf a modifié le rôle du chef de l’État. Auparavant, il bénéficiait de prérogatives quasi régaliennes. Au point que dans la pratique il évitait d’en user ! L’exemple le plus frappant résidait dans la question ministérielle. L’article 53 de l’ancienne Constitution stipulait en effet que «le président de la République désigne les ministres et nomme parmi eux un chef. Il les révoque. Il attribue aux fonctionnaires les postes de l’État, sauf ceux pour lesquels la loi prévoit un mécanisme différent d’affectation. Il préside les cérémonies officielles». Si de telles dispositions devaient être appliquées, le système serait ultra-présidentiel, comme aux États-Unis, et le gouvernement ne serait là que pour assister le chef de l’État, unique détenteur de l’autorité exécutive. Sagement, tous les chefs de l’État qui se sont succédé avant Taëf ont préféré suivre une tout autre procédure. Ils procédaient à des consultations parlementaires, non contraignantes il est vrai, désignaient d’abord un président du Conseil qui, en accord avec eux, formait sa petite liste de ministres. Il reste que les Conseils de ministres ne se tenaient qu’exclusivement sous la présidence du chef de l’État. Sinon, pour le travail de routine, il y avait ce que l’on appelait des Conseils de Cabinet, dirigés par le chef du gouvernement et qui ne pouvaient prendre que des arrêtés mineurs, pas des décrets, ni des décisions majeures. Une liste Taëf a donc changé tout cela, la théorie comme la pratique. Il a dénudé le roi : – Le chef de l’État ne désigne plus le président du Conseil que dans la forme, puisqu’il est obligé de s’en tenir au choix que les parlementaires lui auront indiqué lors de consultations préliminaires contraignantes. – Ensuite, il ne peut plus récuser un chef de gouvernement désigné s’il ne s’entend pas avec lui sur la composition du Cabinet. – Enfin, le Conseil des ministres peut se tenir sans lui s’il n’est pas présent et il n’y a en tout cas plus le droit d’y voter. – Il perd également le droit de proposer des lois, initiative que gardent le Conseil des ministres et l’assemblée législative. – Il ne peut plus par ailleurs dissoudre la Chambre sauf sous des conditions rarissimes : refus du Parlement d’approuver le Budget ou défaut de quorum pendant une session entière. – Il reste nominalement le commandant suprême des armées, mais le même texte se hâte d’ajouter qu’elles sont soumises à l’autorité du Conseil des ministres. – Il négociait seul les traités internationaux et les ratifiait, n’en donnant connaissance au Conseil des ministres que lorsque l’intérêt du pays et la sûreté de l’État le permettaient. Il ne peut plus négocier ces traités internationaux qu’avec le concours du chef du gouvernement et ils ne sont ratifiés qu’après approbation du Conseil des ministres. – Cette instance ne se réunissait qu’à la présidence. Taëf lui a prévu un siège bien à elle, qu’on ne lui a d’ailleurs toujours pas assuré, le chef du gouvernement se hâtant de lui donner asile dans ses locaux officiels du Grand Sérail. – Toujours sur le plan du pouvoir exécutif, le détenteur en devient donc le Conseil des ministres. Qui a besoin pour se tenir d’un quorum des deux tiers et ne prend également les décisions majeures qu’à une majorité de 66%, conditions que l’ancienne Constitution ne prévoyait pas. – Le chef de l’État ne peut plus renvoyer le gouvernement…
Parlons peu, parlons bien : Lahoud aura-t-il ou non «ses» ministres dans le prochain Cabinet ? À cette question, le premier cercle de proches avoue n’être pas encore en mesure de répondre… Autrement dit, on ne sait toujours pas si, sur le plan de la composition politique, la mise sur pied du nouveau gouvernement se fera sur la base traditionnelle du partage. A priori, même...