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Actualités - CHRONOLOGIE

Sarajevo : le dangereux pari des démolisseurs en plain champ de mines

Un champ de mines sur l’ancienne ligne de front, chaos de ruines et de broussailles qui surplombe Sarajevo. Au beau milieu, quatre hommes achèvent de démolir, brique par brique, les restes d’une villa. Quelques dizaines de mètres plus haut, une cinquantaine de démineurs de l’organisation humanitaire Norwegian People’s Aid ont commencé leur méticuleux travail. Pas de place, ici, pour ce jeu de roulette russe: le déminage doit être sûr à 100%. A pas comptés, Akif Dedic, l’un des démineurs, avance sur le terrain vague, armé d’une tige métallique: «Pour être sûr que le sol ne cache plus une seule mine, il faut planter la sonde 900 fois par mètre carré». Pas question, comme partout en ville, d’utiliser un détecteur à métaux, à cause des canalisations souterraines qui fausseraient les repérages. Etrangers à ce luxe de précautions, Almir Demirovic et ses trois compagnons, soldats démobilisés, sans travail, n’ont qu’une idée en tête: survivre à la misère, au mépris du danger. Fermant les yeux sur les rubans jaunes marqués «Mines» qui entourent chaque terrain sur cette colline du quartier de Grbavica, ils ont commencé début mars à récupérer une à une, pour les revendre, les briques d’une maison détruite. «Bien sûr, il y a toujours un risque de marcher sur une mine. Mais pendant la guerre nous étions soldats, nous avons combattu dans ce secteur et nous savons quelles sont les zones sûres»: Almir veut se rassurer avant d’admettre qu’il n’a, de toute façon, «pas le choix». Avec leur seul outil, un long fil de fer, les quatre hommes abattent un pan de mur qui s’écroule dans un nuage de poussière. Puis nettoient, une par une, les briques et les empilent soigneusement, en attendant le client avec qui ils ont par avance négocié l’affaire, en général un réfugié de retour à Sarajevo désireux de reconstruire sa maison à moindres frais. «Nous vendons quatre briques pour un mark, en cinq jours je gagne environ 150 marks» (85 dollars), raconte Almir, qui, à 27 ans, fait vivre ainsi sa femme, son fils et son père. Démolisseurs «kamikazes» Çà et là, le ruban jaune est arraché, signe du passage d’une de ces équipes de démolisseurs kamikazes qui donnent des sueurs froides aux démineurs travaillant sur un terrain voisin. «Ces gens qui traversent les champs de mines ajoutent au problème. Mais ils ont vécu l’enfer. Alors comment leur expliquer qu’aujourd’hui encore il y a des risques», souligne un responsable de l’organisation norvégienne, Oddbjorn Flem. Les multiples campagnes de sensibilisation «se heurtent aux nécessités de la vie quotidienne», ajoute-t-il. D’où le nombre toujours élevé d’accidents: une cinquantaine de victimes, morts ou blessés, chaque mois en Bosnie, selon les organisations internationales. Sur cette colline, l’un des quartiers les plus luxueux de la ville avant guerre, trois ans et demi de combats entre Serbes et Musulmans ont laissé un décor de villas éventrées et calcinées. Les démineurs bosniaques formés par NPA y ont trouvé, depuis fin février, une trentaine de grenades, cinq mines antipersonnel et trois obus. A la fin de l’été, trois hectares auront été nettoyés, moyennant quatre millions de marks (2,3 millions de dollars). Quelques-uns des points rouges qui, sur la carte, enserrent Sarajevo dans une ceinture presque continue de champs de mines, auront alors disparu. Mais au total, les spécialistes ont dénombré environ 900 de ces champs de mines, beaucoup en zones habitées. Pour tout nettoyer, Oddbjorn Flem estime qu’il faudrait «trois ou quatre ans si 250 personnes travaillent à plein temps». Une utopie vu le coût de ces chantiers et le manque de fonds alloués au déminage. (AFP)
Un champ de mines sur l’ancienne ligne de front, chaos de ruines et de broussailles qui surplombe Sarajevo. Au beau milieu, quatre hommes achèvent de démolir, brique par brique, les restes d’une villa. Quelques dizaines de mètres plus haut, une cinquantaine de démineurs de l’organisation humanitaire Norwegian People’s Aid ont commencé leur méticuleux travail. Pas de...