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Actualités - CHRONOLOGIE

Russie : Primakov soigne les équilibres politiques avant de combattre la crise

Le nouveau premier ministre Evgueni Primakov a tenté, pour sa première semaine de travail, de contenter à la fois la gauche procommuniste qui le soutient et les bailleurs de fonds internationaux, au risque d’apparaître indécis au plus fort de la crise. Le premier ministre œuvre par ailleurs à calmer la presse qui le soupçonne de vouloir réimposer la censure sur les médias (VOIR AUSSI PP. 10 ET 14). M. Primakov, diplomate de carrière, sait qu’il doit à la fois conserver le soutien politique de la majorité de gauche à la Douma et la confiance du FMI, dont le prêt de 22 milliards de dollars — versé par tranches — est indispensable à la survie de son gouvernement. Les premières nominations, le 11 septembre, ont été accueillies avec satisfaction par les uns, et horreur par d’autres, comme «un retour vers l’URSS». Viktor Guerachtchenko, l’ancien gouverneur de la Banque centrale soviétique surnommé le «banquier rouge» par ses ennemis, a retrouvé sa place à la tête de la Banque centrale de Russie, la BCR. Le poste prestigieux de premier vice-premier ministre a été confié au communiste Iouri Maslioukov, ministre de la Planification sous Mikhaïl Gorbatchev. On s’orientait alors vers une politique «de gauche», mêlant protectionnisme et émission monétaire inflationniste. Cinq jours plus tard, M. Primakov nommait trois centristes, réformateurs modérés, aux postes de vice-premiers ministres chargés des Finances, des Affaires sociales et de l’Industrie. Au point que la presse russe accusait le nouveau chef du gouvernement de reformer le cabinet de son prédécesseur Viktor Tchernomyrdine. M. Guerachtchenko appelait pour sa part au poste de numéro deux de la BCR Tatiana Paramonova, connue pour ses positions monétaristes. Vendredi, une semaine après son investiture par la Douma (chambre basse), M. Primakov n’avait toujours pas fini de former son équipe. «En diplomate expérimenté, il a dit exactement ce qu’il fallait pour satisfaire à la fois la scène politique intérieure et les créditeurs étrangers», notait cette semaine le quotidien libéral Sevodnia. Le recentrage du gouvernement et la distance prise avec la première image «rouge» du gouvernement «sont évidemment des gestes envers les Occidentaux et le FMI», commentait le rédacteur en chef de la radio Echo de Moscou, Alexeï Venediktov. Les Occidentaux perturbés Ces signaux contradictoires ont pourtant perturbé les Occidentaux. Le secrétaire adjoint au Trésor américain Larry Summers a pressé jeudi la Russie de présenter une stratégie économique «cohérente» et de clarifier son plan de réformes. «Il est d’abord primordial que le gouvernement présente une stratégie économique cohérente que les Russes eux-mêmes endossent, a-t-il dit. Le gouvernement doit expliquer son approche pour restaurer la stabilité et remplir ses obligations internationales». Selon les observateurs, la nouvelle équipe s’oriente vers une politique centriste, abandonnant la rigueur budgétaire et monétaire pour permettre une certaine inflation — afin de payer salaires et retraites — sans toutefois se mettre à dos les financiers étrangers. L’Occident, qui a préconisé et défendu jusqu’au bout la rigueur et la politique de défense du rouble en Russie, commence en outre à changer son fusil d’épaule. «Il est clair que le programme que nous avons soutenu pour la Russie a subi un sérieux revers. Il est temps de réfléchir à ce qui s’est passé et d’en tirer les conséquences», a dit cette semaine un haut responsable du G7 à Londres, à l’issue d’une réunion dans la capitale britannique des hauts fonctionnaires des ministères des Finances et des Affaires étrangères. Même le très rigide FMI, selon des banquiers moscovites, est désormais prêt à accepter une certaine dose d’inflation pour soulager la tension sociale et permettre à l’économie de redémarrer. Le résultat le plus spectaculaire, finalement, de la nomination de M. Primakov a été de mettre fin d’un seul coup au sentiment de panique qui avait gagné les Russes fin août et début septembre. Les magasins de nouveau approvisionnés, la peur des pénuries a disparu, et même les dizaines de milliers de nouveaux sans-emploi, mis au chômage depuis la mi-août, n’ont pour l’instant pas fait entendre leurs voix sur la scène sociale.
Le nouveau premier ministre Evgueni Primakov a tenté, pour sa première semaine de travail, de contenter à la fois la gauche procommuniste qui le soutient et les bailleurs de fonds internationaux, au risque d’apparaître indécis au plus fort de la crise. Le premier ministre œuvre par ailleurs à calmer la presse qui le soupçonne de vouloir réimposer la censure sur les médias...