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Actualités - CHRONOLOGIE

La Mostra, reflet d'une fin de millénaire en crise (photo)

De Belgrade sur un baril de poudre à Buenos Aires noyée sous la pluie et les nuages en passant par Lisbonne, les écrans de la 55e Mostra sont le reflet de sociétés en crise en cette fin de millénaire. Métaphore sociale et politique sur l’Argentine de Carlos Menem, fraîchement accueillie, «La nube» (Le nuage) de Fernando E. Solanas était en compétition hier à Venise avec «Trafico» (Traffic) du Lusitan Joao Botelho, une comédie sardonique et colorée sur le Portugal d’aujourd’hui. «Baril de poudre» du Yougoslave Goran Paskaljevic, terminé il y a seulement cinq jours, figure dans la section Perspectives. A mi-parcours du festival, lancé jeudi dernier par l’électrochoc de Steven Spielberg sur les horreurs de la guerre, onze candidats au Lion d’or décerné dimanche prochain par le jury présidé par Ettore Scola ont fait leur tour de piste au Lido. Dans le peloton de tête, se détache «Conte d’automne» du vétéran français Eric Rohmer, déjà lauréat avec «Le Rayon vert». Selon une classification établie par une douzaine de critiques italiens, ce conte de saison, qui a enchanté les festivaliers, arrive en tête avec 92 points, devant «Le silence» de l’Iranien Mohsen Makhmalbaf (81), «Rounders» de l’Américain John Dahl (76) et «Run Lola run» (Lola rennt) de l’Allemand Tom Tykwer, un des benjamins de la Mostra. Parmi les films attendus figurent «Bulworth» de Warren Beatty, «New Rose Hotel» d’Abel Ferrara, «Chat noir, chat blanc» d’Emir Kusturica, «Place Vendôme» de Nicole Garcia avec Catherine Deneuve. Avec «Trafico» placé sous le signe de «Don Luis» (Bunuel), Joao Botelho réalise à sa façon, chaotique et ironique, un néo-charme discret de la bourgeoisie, à travers une galerie de personnages extravagants pris dans les différentes strates de la société portugaise: riches et pauvres. Dans son éventaire, il y a un couple modeste avec enfant, qui va découvrir un trésor, deux prêtres qui, devant la désaffection de leurs fidèles, vendent aux enchères leurs statuettes et prennent la route, un général qui se livre au trafic d’armes pendant que sa femme se pâme devant une artiste branchée, un banquier qui a des hallucinations chaque fois qu’il est question d’argent, une mystérieuse espionne à la chevelure flamboyante qui met le feu au cœur des hommes... Le réalisateur de «Conversa acabada», «Aqui na terra», «Tres palmeiras» se livre avec une jubilation provocante à une attaque en règle du pouvoir de l’argent et de toutes les institutions, avec comme morceau de bravoure iconoclaste l’hymne national portugais chanté comme un fado par un jeune prêtre homosexuel en soutane dans une maison close. Et cette comédie «fin-de-siècle», aux couleurs éclatantes — bleu, rouge, vif, jaune canari — se conclut sur «Les malheurs de Sophie» de la Comtesse de Ségur, lus par deux SDF (sans domicile fixe) sur une décharge. Dommage qu’il n’y ait pas de fil pour relier entre eux tous ces personnages comme dans «Baril de poudre», chronique tragique et grinçante de «gens ordinaires» dans une société où règne la loi du plus fort. Quant à Fernando Solanas, il file une longue métaphore sur une ville où il pleut depuis plus de 1.600 jours et où certains marchent à reculons tandis que d’autres avancent. Pour le réalisateur de «L’heure des brasiers», «Tango: l’exil de Gardel», «Sur» et «Le Voyage», «La nube» est un film de «résistance culturelle», constat désabusé sur les oubliés d’une société régie par l’économie de marché, la corruption et la bureaucratie: les retraités, les chômeurs et les artistes, qui, dans le film, se battent pour défendre leur théâtre. (AFP)
De Belgrade sur un baril de poudre à Buenos Aires noyée sous la pluie et les nuages en passant par Lisbonne, les écrans de la 55e Mostra sont le reflet de sociétés en crise en cette fin de millénaire. Métaphore sociale et politique sur l’Argentine de Carlos Menem, fraîchement accueillie, «La nube» (Le nuage) de Fernando E. Solanas était en compétition hier à Venise avec...